Chapitre 20

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Yume

Je me douche et m'habille avant de sortir de la salle de bain, bien réveillée de cette nuit.

Je déjeune avec Mikey qui ne touche pas à grand chose.

Moi: Mange plus, tu maigris à vue d'œil.
Mikey: J'ai plus faim.

Les choses ont irrévocablement changé depuis qu'on est petits, l'estomac sur pattes qu'il était est devenu un presque cadavre. Ses cernes creusées et sa peau pâle témoignent de la vie difficile qu'il a traversé, sans parler de son regard vide.

J'espérais que renouant peu à peu avec lui il redeviendrait ne serait-ce qu'un peu plus celui qu'il est vraiment, mais il a l'air de s'être éteint. Pourtant, les rares moments qui me font penser au passé regonflent mon cœur d'espoir.

Un jour il sera heureux, il n'est jamais trop tard.

L'après-midi qui suit, on fait le tour des derniers clubs qu'il nous reste. On a démasqué deux fraudes et deux trahisons. Encore et toujours les Serpents Blancs.

Ils commencent à me taper sur les nerfs, j'ai l'impression d'être bloquée dans une boucle infernale. Je ne serais pas totalement tranquille tant qu'il ne sera pas mort.

Le chauffeur nous dépose devant la piste où nous attend notre jet, je lui file un supplément. Finalement, l'unité que j'avais sollicité pour ce séjour n'a pas dû intervenir, même s'ils assuraient nos arrières à distance.

L'avion décolle et je pose ma tête sur l'épaule de Mikey.

Moi: Qu'est-ce qu'on va devenir?
Mikey: Tu philosophes, toi?
Moi: Hm...

Les minutes s'écoulent, l'avion vole haut dans le ciel alors que le soleil se couche.

Mikey: Aucune idée.
Moi: Est-ce que tu attends que la mort vienne te cueillir?
Mikey: Probablement.
Moi: Et si la vie le fait avant?
Mikey: Ça n'arrivera pas.

Il refuserait le bonheur même si on le lui offrait sur un plateau d'argent, voilà l'insécurité qu'il enfouit au plus profond de lui.

Moi: Et toi, Sanzu?
Sanzu: Je suis très heureux, moi.

...je ne vais pas me lancer dans ce débat avec lui, je le crois sur parole. Il n'a jamais été très net de toutes façons.

Je sirote mon verre les dix minutes qui suivent, le silence me relaxe jusqu'à ce que ça fasse tilt dans ma tête. Je croise les regards de Sanzu et Mikey qui ont l'air d'avoir déjà compris.

Sanzu braque son arme sur le steward qui vient d'entrer. Il sursaute et lève les mains en l'air.

Sanzu: Parle.

Il tremble un moment, mais quand il comprend que ça ne prend pas son masque tombe.

On a toujours une musique de fond quand on voyage, quand ce n'est pas le cas ça veut dire que l'équipage ne l'a pas activé, que donc il n'est pas l'habituel.

– Votre pilote s'est pris une balle dès qu'il est entré dans le cockpit. Vous allez sagement rester assis et la fermer jusqu'à ce que je nous fasse atterrir.
Moi: Serpent blanc?
– En chair et en os.
Sanzu: Ça pèse sérieux, ils sont collants ces fanatiques.
– Tu la fermes si tu veux pas te retrouver par dessus bord.

Sanzu fronce les sourcils, s'il le tue on n'aura plus de pilote et notre avion sera notre cercueil. Il doit s'être débarrassé des parachutes pour nous garder prisonniers.

Le téléphone dans sa main vibre, il sourit et répond avant de m'approcher. Mikey se place en travers de son chemin, son aura effrayante fait pâlir notre ravisseur qui se racle la gorge à plusieurs reprises en espérant se donner du courage.

Pathétique.

– Quelqu'un a l'autre bout veut s'entretenir avec la femme, je te conseille de t'asseoir si tu ne veux pas mourir.

J'attrape le téléphone qu'il me tend et le cale contre mon oreille.

– Bonjour mon cœur.
Moi: J'espère que tu es bien caché sombre merde.
– J'aime quand tu te donnes un genre. Ta réputation de femme fatale m'est parvenue, tu sais.

Il semblerait qu'il ait effectivement trouvé quelques petits potins.

Moi: Qu'est-ce que tu veux?
– J'ai bien compris que tu ne coopèreras pas. Tu m'obliges à employer les grands moyens.
Moi: Abrège.
– Si je dois te priver du peu qui compte à tes yeux pour te retrouver je le ferais. Alors sois docile et obéis, tu descendras la première de l'avion et seule. Résiste un temps soit peu et je liquide tes deux camarades.

Je découvre dans son ton et ses menaces une facette que je ne lui connaissais pas, son vrai visage sûrement.

Moi: Écoute bien les dernières paroles que je vais t'adresser, parce que la prochaine fois que je parlerai ce sera face à toi pour te souhaiter d'aller en enfer.

D'ici, je le sens sourire face à ma réplique.

Moi: Je ne pardonnerai jamais ce que tu as fait.

La seconde qui suit est rythmée par un coup de feu.

Moi: Et tu sembles oublier à qui tu as affaire.

Je raccroche et me lève, les gars sont perturbés par mon geste.

Sanzu: Pourquoi tu l'as tué?

Il fixe notre ex-ravisseurs, sur lequel j'ai percé un troisième un œil.

Moi: Il y a des milliers de soldats à l'armée, ce n'est pas en sachant seulement me battre que j'ai pu entrer dans l'unité d'élite. Junta a fait une connerie en l'oubliant.

Je passe dans le couloir et croise le regard de l'hôtesse effrayée.

Moi: Attachez vos ceintures, je vais faire atterrir cette conserve.

Sanzu

Rindou: Sérieux?!
Ran: Fais voir!

Je serre les bords du fauteuils pendant que les gars se foutent de moi.

Moi: Rigolez pas!

Le micro de Yume résonne dans la cabine.

Yume: Mesdames, messieurs. On est dans la merde il pleut, si vous vous sentez mourir ne vous en faites pas, ce ne sont que les turbulences. Merci d'attacher vos ceintures et de prier fort, on en aura besoin.

Quelle garce.

N'empêche, elle réussit à amuser Mikey qui met sa ceinture.

Ran: On est ravi d'avoir fait votre rencontre les gars.

Je me lève et rejoins vite Yume dans le cockpit avant qu'elle n'entame les procédures d'atterrissage.

Moi: Je rêve ou tu découvres le tableau de bord?
Yume: Non, je réfléchis.

Je m'installe sur le siège à côté et boucle ma ceinture. Yume remarque qu'elle est en direct.

Yume: J'ai la classe, hein?
Rindou: Carrément!

Son casque lui donne un drôle d'air. Elle discute quelques minutes avec eux qui ont pris la route vers l'aéroport avant de raccrocher et éteindre mon téléphone.

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