26. Free Fall

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Noah me regarde avec ses yeux bleus et pétillants. L'expression de ses yeux veux dire bien plus que les mots qu'il accepterait de prononcer. Il est ravi de me voir, plus, il n'attendait que ça.

— Tu n'imagine pas à quel point tu m'as manqué, Lee. » Commence mon enfer alors qu'il me prend les mains.

Ni une ni deux, révoltée par son toucher, je retire mes mains de son emprise douce-amère. Il fronce les sourcils un court instant avant de retrouver son sang froid et me regarder avec sa bonne humeur habituelle.

Il semble chaleureux, sûr de lui, comment se fait-il qu'il soit un tel connard quand il paraît si doux et gentil ?

Une tonne de souvenirs m'assaillent, je tente de les refouler en faisant comme je le faisais il y a peu, en pensant à Chan. Mais notre dispute me revient en tête et je ne suis plus assez bien pour y échapper.

Un feu de cheminée, à Noël. Notre amour — à moi et Noah — qui réchauffait mon coeur bien plus que n'importe-quelle flamme dansante. Je revois nos mains se lier et nos baisers devenir de plus en plus expressifs.

Finalement, tout s'était prématurément arrêté quand j'y ai mis fin. Le même schéma s'était produit avec Chan. Mais avec lui ou avec Noah, il n'y aura maintenant plus de deuxième chance, je ne donnerais jamais ma virginité à l'un des deux amours de ma vie. Je suis en chute libre. Je perds tous mes repères uns à uns, et je désespère à l'idée de vivre l'un de ces amours que l'on ne voit que dans les comédies romantiques.

— Je t'ai manqué..? » Répétais-je, sans savoir quoi dire d'autre à une personne comme Noah.

Ce qui le rend dangereux, c'est qu'il est imprévisible. Il ne recule devant rien et est tout à fait manipulateur, il pourrait convaincre n'importe-qui d'aller dans son lit, et je ne plaisante pas.

Alors que mes pensées se bousculent, il s'approche dangereusement de moi, me dépassant d'une tête, il baisse son visage pour me regarder dans les yeux alors que son index caresse doucement ma joue. Ma respiration se coupe et je le regarde dans les yeux, bien malgré moi.

Cet homme est certainement l'un des plus beaux êtres que je n'ai jamais vu, même si, en comparaison, il n'arrive pas à la cheville de Chan. Je souffle et essaye d'enlever son index de ma joue.

Visiblement satisfait que je sois sur la défensive, il m'attrape les poignets avec un demi-sourire détestable. Toute ma répulsion envers lui me donne envie de lui vomir au visage, il me dégoute. Sentir sa peau chaude contre la mienne me donne des vertiges.

— Lâche-là, pauvre type ! » Crâche une voix venant de derrière moi.

Un coup violent s'abat sur Noah, celui-ci recule de plusieurs mètres et dévisage tour à tour l'homme qui m'a sauvé et moi-même. Il secoue la tête, mécontent, avant de faire demi-tour pour retourner d'où il vient. Au fond de moi, je sais que je suis de nouveau dans une boucle, je vais le revoir, j'en ai la certitude.

— Tout va bien ? » Me demande mon sauveur.

Je hoche la tête et remercie la personne. La personne qui se trouve être Na-eun.

— Hein ? Na-eun ? Pourquoi tu m'as aidé, toi ?

— Ça s'appelle l'amitié, en général ça va avec la confiance et le respect, j'aurais dû me douter que tu ne connaissais pas ces thermes.

Je la regarde avec énervement, je n'ai qu'une envie, lui coller une nouvelle raclée.

— Plus sérieusement, Lee. J'ai fais ça car j'ai vu un homme te toucher et ça n'avait pas l'air de te plaire, j'ai vu tes yeux empreints de détresse. Je n'ai pas vraiment réfléchi avant de t'aider. Tout le monde te cherche, tu sais ? Enfin, pas tout le monde. Hannah est parti de l'autre côté. Elle voulait absolument te parler. Mais je suis contente d'être tombée sur toi, nous devons avoir une conversation toutes les deux, nous aussi, pas vrai ? » Na-eun me regarde intensément et je comprends que je n'ai même pas le droit de refuser cette discussion.

— Sûrement. » Finis-je par répondre, excédée.

— Ok. Je te rassure, tu peux relâcher la pression Lee-lee. Je ne compte pas t'en mettre plein la gueule. Le seul problème, c'est que je me fais du soucis pour toi et Chan. Tu sais qu'il tient beaucoup à sa famille, pas vrai ? Et aussi, il n'aime pas les erreurs de jugement. Et là, tu as combiné les deux. Tu vois ce que je veux dire ?

— En gros, il me déteste doublement.

Je laisse échapper une sorte de sanglot, alors même que mes yeux commencent déjà à se remplir de larmes. J'attrape Na-eun par le pull alors que ma voix se brise pour lui dire ce que j'ai à dire :

— Je veux rentrer à la maison, Na-eun. Avec Chan. Je veux rentrer en Corée et retrouver Cooper, ainsi que toutes mes affaires. Je veux revenir en arrière, retourner à mon appel avec Chan. Je ne veux pas t'avoir giflé, je ne veux pas avoir fait cette connerie. Pourquoi je ne l'ai pas écouté, pourquoi ?!

Ma gorge se serre, m'empêchant de poursuivre, mes genoux rencontrent le sol avec qu'un cri sort directement de mes poumons, à m'en déchirer les cordes vocales. Na-eun s'abaisse immédiatement à mon niveau et me prend dans ses bras en me caressant lentement le dos.

— Lee, tu ne perdras pas Chan. Il ne t'arrivera rien qui me soit déjà arrivé. Chan est en bonne santé, toi aussi. Et vous vous aimez bordel. Il n'y a aucune raison que ça ne fonctionne pas, tu m'entends ?

— Je ne sais pas comment aimer, Na-eun. J'ai l'impression de n'être bonne à rien !

— Shh, plutôt que de dire des bêtises, on ferme sa gueule. OK ?

Je réprime un rire au milieu de mes sanglots. Seule au milieu de la rue et dans les bras de Na-eun, je me sens plus que vulnérable, mais cela me permets de me donner une dose de force que je ne me soupçonnais pas. Fini de se laisser marcher dessus, fini de se laisser gueuler dessus, je vais devenir une autre personne.

Laissant échapper un soupir, je me relève, tant bien que mal. Na-eun se redresse en même temps que moi et me sourit du mieux qu'elle peut, essayant sans aucun doute de ne pas comparer ma situation avec la sienne et Hea-jung.

Je la prends dans mes bras à mon tour, elle ne laisse pas échapper une seule larme. Étonnée par son insensibilité, je réalise qu'elle essaye simplement de s'endurcir, tout comme moi, pour ne pas finir, hurlant, au milieu des autres.

Je puise dans mes derniers forces pour faire le chemin inverse vers la maison. En marchant, d'autres souvenirs me reviennent. Na-eun, hurlant à l'hôpital. Ce cri qui avait déchiré l'air et avait du alerter une masse de médecin.

Ce cri qui avait élevé Na-eun au rang de légende à mes yeux. Une survivante, retenant sa souffrance à l'intérieur d'elle pendant toute une journée avant d'exploser une fois enfermée dans sa chambre.

Des tonnes de cris n'avaient rien de douloureux comme celui qu'elle avait poussé. Le sien était alarmant, empreint d'une tristesse et d'une rage que je n'aurais jamais cru entendre de ma vie. Être témoin d'un tel appel à l'aide ne m'as pas changé pour autant, il a fallut que ce soit moi qui arrive à mon point de rupture pour en saisir l'essence.

Devant la porte de la maison de Chan, je respire une dernière fois. Il est temps de mettre fin à toutes ces histoires. Je veux une dernière conversation, un point c'est tout.

Si, durant cette conversation, il exprime l'idée de me quitter, tout s'arrêtera. Dans le cas contraire, je ferais tout pour faire durer notre idylle.

Lovely Seven | Bang ChanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant