Chapitre 18

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Partie IX : « La vérité est rarement pure et jamais simple »

- Attendez cette Shera Amin, c'est...

- C'est l'ado qui a demandé une injonction d'éloignement contre Harold, confirme le capitaine Ullers, mains sur ses jumelles.

- Et vous l'envoyez là-bas ? C'était ça votre plan ?

- Cette fille l'obsède, il ne lui fera pas de mal. S'il existe une personne capable de raisonner ce malade, c'est elle.

À quelques mètres de la foule, devant le grillage du lycée, Shera Amin s'apprête à accomplir un exploit inédit ; elle va franchir les portes d'Euzhan Rhimes. Patiemment postée devant l'interphone, elle a attendu qu'Harold concède à sa venue, ce qu'il a fait après de longues secondes de réflexion qui ont permis à l'étudiante de se concentrer avant son entrée en scène. Pas après pas, et les mains bien en évidence, elle avance vers l'établissement, suivis par l'objectif des caméras braquées sur elle. Lentement, mètre par mètre, elle s'enfonce dans l'établissement jusqu'à disparaitre complètement des radars. Ça y est, il y a un nouveau pion sur l'échiquier – et ce n'est pas n'importe lequel.

- She... Shera ? croit halluciner Harold lorsqu'elle pénètre dans la salle.

- No way, je rêve ou c'est Shera Amin ? chuchote Adam, ébahi.

Déroutée par sa présence, la classe se questionne à grands coups de messes basses que le preneur d'otage, abasourdi, laisse circuler tant sa confusion le rend inapte à déterminer si elle se tient véritablement en face de lui, ou si elle est le fruit d'une divagation.

- J'ai ce que t'as demandé, le stylo est dans ma poche.

Secoué par cette visite impromptue, l'esprit d'Harold s'égare en vagues à l'âme, mais l'évocation d'Hercule le refocalise sur sa mission. Il a des représailles à satisfaire – ça, personne ne peut le lui faire oublier.

- Je vais devoir vérifier que tu ne portes pas d'armes ou de micros.

- Je n'ai rien de tout ça, nie-t-elle.

- Je vais quand même devoir m'en assurer. Ça te va si je te fouille ?

- Je t'en prie.

Spectateurs de la scène, les captifs s'émerveillent presque devant la courtoisie dont il vient de faire preuve. Demander la permission est un privilège auquel seule elle semble avoir le droit, puisqu'il n'a jamais été si prévenant ou délicat avec ses autres prisonniers. Ils s'en rendent compte, au même titre que la principale intéressée elle-même, la jeune femme est sa faiblesse.

- Lève les bras s'il te plait.

Précautionneusement, le garçon inspecte ses jambes, tapote le dos de sa main contre son ventre et le haut de sa poitrine, ausculte les contours de son voile, puis termine par récupérer son bien, niché dans une poche de son manteau.

- Maintenant qu'il est tout à toi, tu peux peut-être... accepter la nourriture.

- Qui me dit que la clé USB à l'intérieur n'héberge aucun virus ?

- Moi je te le dis. La police n'y a pas touché.

Jouissant d'un semblant de confiance, Shera commence furtivement à occuper son rôle de médiatrice en incitant Harold à consentir à la requête. Au vu du piteux état de ses captifs, affamés depuis près de dix heures, elle n'a pas à longtemps persister pour qu'il charge Firmin Baruche, son loyal rapporteur, de réceptionner les sacs de provision entreposés par les secours au-devant du bâtiment.

La persona non grata - FROù les histoires vivent. Découvrez maintenant