Jour 1 : Rêves

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Ascalyphia fit un premier pas, puis un deuxième. Elle ne reconnaissait pas le lieu où elle se trouvait, mais il lui était étrangement familier. Le souvenir des nombreuses lectures lui revint en mémoire et ses yeux s'ouvrirent d'émerveillement. Était-elle vraiment sur l'île mystérieuse ?

L'herbe, mouillée par la rosée, lui chatouillait ses pieds nus tandis qu'elle flânait dans la plaine qui s'étendait à perte de vue. Derrière elle se tenait une forêt aux proportions inimaginables, les arbres géants s'étendant en une canopée dense, filtrant la lumière sur le sol couvert de mousse et de fougères. Une rivière argentée s'en échappait en clapotant gaiement. La jeune femme plissa les yeux et détailla la montagne qui occupait l'horizon, où son sommet, dépassant de plusieurs centaines de mètres le toit feuillu de la forêt millénaire, effleurait les nuages avant de s'y perdre.

Elle tournoya sur elle-même, respirant une joie étrangère qui la perturba. Elle ne savait pas exactement où elle était, l'île n'étant répertoriée sur aucune carte, mais tout son être lui signalait qu'elle était chez elle.

Ascalyphia baissa les yeux, et sursauta de surprise. Ses habits chauds, qui la protégeaient du vent froid, avaient cédé la place à une robe longue, agrémentée de plusieurs voiles dorés qui flottaient autour d'elle, animée par la brise, ses chaussures avaient disparu et ses sacs étaient également introuvables. L'affolement se manifesta pour être aussitôt remplacé par de l'euphorie. Son corps se mut seul et sa tête se redressa pour observer le ciel qui rougissait par le coucher de soleil et les silhouettes brillantes s'imposèrent à son regard.

Trop éloignée pour que la jeune femme ne puisse les identifier, elle ne put que suivre les élans
de son cœur qui ne semblait plus lui appartenir. L'extase et la passion qui lui embrasait le corps eurent pour conséquence de colorer ses joues et elle baissa les yeux. Pour y apercevoir des enfants qui babillaient.

Elle se pinça brusquement le bras. La douleur lui irradia la peau, mais elle fut convaincue. Et rassurée. Ce corps n'était pas le sien, l'absence de teint halée par le soleil le lui confirmait. Et la personne qui descendait vers elle également.

Ylea, le dieu Lofea n'était plus sur Abelexan depuis des générations.

Elle le regarda approcher, maintenue par deux autres hommes, puis ils posèrent les pieds au sol et Ascalyphia, ou plutôt Anaeil l'épouse d'Ylea, se précipita sur lui pour lui embrasser la joue.

— Elle est ici. lui chuchota-t-elle à l'oreille. C'est le moment de lui parler.

La divinité se plongea dans ses yeux et la jeune femme tenta de sa cachée dans les replis de la conscience du corps qu'elle habitait sans le vouloir.

— Sache que rien n'est perdu, petit ange. souffla le dieu. Aie confiance en toi, rien n'est de ta faute.

Ascalyphia frissonna et cligna rapidement des yeux.

— Tu m'as demandé d'aller la chercher pour ces deux simples phrases ?

— Elle comprendra. Crois-moi.

Puis elle se sentit défaillir. Ses yeux se fermèrent et elle chuta.

— Asca !

Elle sursauta et se redressa. Eleo se tenait au-dessus d'elle et la secouait dans tous les sens.
— Je viens de faire un rêve très étrange. lâcha-t-elle laconiquement.

Mais était-ce seulement un rêve ?

Writober 2023Où les histoires vivent. Découvrez maintenant