Mardi

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    Le vent soufflait et l'air était frais. Le soleil brillait dans le ciel depuis quelques heures. La ville se réveillait peu à peu, les voitures roulaient, les gens marchaient, les commerces ouvraient. L'ambiance au cœur de Moscou était très agréable, les habitants semblaient heureux.
    Fyodor et Chûya marchaient main dans main depuis une vingtaine de minutes en direction du théâtre Bolchoï, là où l'orchestre dans lequel était Fyodor avait fait une performance, la veille au soir. Ils avaient voulu prendre leur temps, pour passer un moment rien qu'à deux, et ils y arrivaient tout juste. C'était un grand et magnifique bâtiment, dans lequel il avait toujours voulu entrer quand il était enfant. Aujourd'hui, il pouvait fièrement dire qu'il y était allé et qu'il s'y était produit. C'était quelque chose qu'il n'oublierait jamais, il avait réalisé l'un de ses plus grands rêves. Il avait même pu y jouer l'une de ses compositions.
    En voyant un sourire heureux se dessiner sur son visage, Chûya prit la parole.
    – À quoi tu penses ?
    Fyodor tourna la tête vers lui. Ses cheveux roux avaient été attachés en une queue de cheval sur sa nuque mais quelques mèches de cheveux retombaient sur le devant de son visage. Il avait ancré son regard bleuté dans le sien, une cigarette coincée entre ses lèvres rosées. Et sa main de libre était dans sa poche de manteau. Aujourd'hui encore, Chûya portait sa chapka, et il ne pouvait pas s'empêcher de le trouver aussi adorable que magnifique. Chûya avait un charme doux et chaleureux, son teint était lumineux et ses joues souvent rougies, ses cheveux roux renforçaient cette idée. Au contraire, ses prunelles étaient claires et froides, donnant l'impression qu'il avait deux diamants à la place des yeux. Fyodor pourrait le regarder pendant des heures, il ne s'en lasserait jamais.
    – Pas grand chose. Je me dis juste que j'ai de la chance.
    Chûya prit son bâton de nicotine entre ses doigts et souffla un petit nuage de fumée blanche. En même temps, il tourna légèrement la tête pour ne pas que Fyodor le respire. Puis, il le regarda à nouveau tout en souriant.
    – De la chance ? Pourquoi, demanda-t-il.
    – Parce que je réalise l'un de mes rêves de gosse, et tu es avec moi.
    Pour accompagner ses mots, il vint déposer un doux baiser sur sa joue. Il fut quelque peu surpris par la froideur de sa peau. Il fronça un peu les sourcils et serra un peu la main de Chûya dans la sienne.
    – Tu as froid, lui demanda-t-il avec empressement.
    Chûya ricana légèrement et secoua négativement la tête.
    – Pas tant que ça, ça va.
    – Tu es sûr ?
    – Mais oui !
    Il sourit et éteignit sa cigarette, puis il se mit en face de Fyodor et posa ses mains sur ses joues.
    – Passe une bonne journée, lui murmura-t-il.
    – Tu me manques déjà, répondit Fyodor en venant frotter son nez à celui de Chûya.
    Il ricana légèrement, et son rire réchauffa le cœur de Fyodor. Finalement, Chûya déposa ses lèvres sur les siennes avec délicatesse. Leur baiser était doux et rempli d'amour. Fyodor se sentait bien. La proximité de leur corps et le contact des mains de Chûya avec ses joues l'apaisaient. Il voudrait rester avec lui toute la journée et ne plus jamais le quitter, malheureusement Chûya se recula après quelques secondes. Il colla son front au sien. Ils devaient aller travailler.
    – Je t'appelle quand on a fini la répétition, dit-il alors.
    Chûya acquiesça.
    – Je t'aime, lui susurra-t-il en souriant.
    – Moi aussi...
    Fyodor recolla ses lèvres sur les siennes pour quelques secondes avant de se détacher de lui. Il lui sourit avant d'entrer dans le grand théâtre qui se trouvait juste à côté d'eux. Il poussa la porte et tomba nez à nez avec un jeune homme aux cheveux bruns. Il avait de grands yeux sombres et un immense sourire. Il se tenait en face de lui et il avait les mains posées sur ses anches. Fyodor le reconnaîtrait entre mille.
    – Dazai, soupira Fyodor en le contournant.
    Il commença à avancer et Dazai le suivit de près.
    – Moi aussi je suis content de te voir, s'exclama-t-il. Comment vas-tu ?
    – Ça allait, jusqu'à ce que je te vois.
    Dazai leva les yeux au ciel.
    – Roh, sois pas si rabat-joie ! Moi je vais bien !
    – Content de le savoir.
    Ils montèrent quelques marches avant d'arriver dans une immense pièce avec un grand nombre de sièges et une gigantesque scène. De longs rideaux rouges, brodés avec des fil dorés, encadraient la scène, sur laquelle leurs collègues discutaient joyeusement. Avant même que Fyodor ne puisse aller vers Sigma, Dazai vint se planter devant lui. Il avait toujours le même sourire collé au visage, Fyodor trouvait cela dérangeant.
    Il se dirigea vers une rangée de sièges où se trouvait son instrument, essayant d'esquiver au maximum Dazai. Lorsqu'il était sorti de l'hôtel avec Chûya, il avait demandé à ses collègues de le prendre comme ils venaient ici en voiture. Cela lui avait permis de ne pas être encombré lors du chemin
    – C'était qui le p'tit roux avec toi ?
    Il fronça les sourcils. Dazai était quelqu'un de très curieux, mais jamais il n'avait semblé s'intéresser à Fyodor. Hormis se chamailler à savoir qui était le meilleur musicien, aucun des deux n'avait cherché à connaître l'autre. Alors la question de Dazai le perturbait.
    – Pourquoi, demanda-t-il suspicieusement.
    – Comme ça, pour savoir !
    Fyodor soupira. Il retira sa veste et la posa sur un siège au hasard.
    – C'est mon petit ami.
    Dazai sembla apprécier sa réponse car il sautilla légèrement, comme un petit enfant à qui on offrirait un cadeau. Son sourire s'agrandit, Fyodor se demanda même comment cela était possible, et il le suivit.
    – Comment il s'appelle ?
    – Pourquoi autant de questions ?
    – Je veux juste apprendre à te connaître, s'exclama-t-il avec conviction. On est partenaire de scène après tout !
    – Partenaire de scène ? Mais absolument pas !
    Dazai vint s'asseoir sur un siège, tout juste en face de lui, et il le regarda sortir son violoncelle de son étui.
    – On a quand même beaucoup de duo, répondit Dazai en chantonnant.
    Fyodor l'ignora et lui tourna le dos. Il prit son instrument et commença à marcher vers la scène. Dazai, encore une fois, le suivit.
    – Et si on se faisait un truc ce soir, proposa Dazai avec joie.
    Fyodor soupira.
    – Bordel, tu veux pas me laisser tranquille, lui demanda-t-il en se tournant vivement vers lui. Pourquoi tu viens me faire chier aujourd'hui ?
    Dazai ne sembla pas mal prendre sa question, il continuait de sourire joyeusement. Mais cette fois-ci, il ne le regardait pas. Fyodor tourna la tête pour voir qui il regardait, et son regard se posa sur la silhouette de Sigma. Sigma discutait avec deux de leurs collègues, il avait l'air sérieux et leur montrait plusieurs choses sur son calepin. Aujourd'hui, il avait laissé ses cheveux détachés et ceux-ci tombaient jusque dans le creux de ses reins. Fyodor se rappela soudain qu'il avait eu un rencard avec Dazai, la veille au soir. Avec la venue surprise de Chûya, il avait totalement oublié... Il espérait que tout s'était bien passé pour son ami, il décida qu'il irait lui parler plus tard.
    – Ça pourrait être sympa, continua alors Dazai. Nous quatre, toi, ton petit ami, Sigma et moi... On pourrait se faire un bowling ou je ne sais pas quoi !
    Fyodor tourna sa tête vers Dazai.
    – Pourquoi tu veux tant qu'on fasse quelque chose ?
    – Tu es le meilleur ami de Sigma, je veux simplement faire les choses bien avec lui... Et puis, ça sera plus drôle de t'embêter si je te connais un peu !
    Fyodor réfléchit à sa proposition. Ça pourrait donner quelque chose de très chaotique, sachant que Dazai et lui se charriaient beaucoup comme ils étaient rivaux. Pourtant, il se laisserait bien tenter par la proposition. Il savait que Chûya et Sigma s'entendaient bien, il ne doutait pas que ça leur ferait plaisir de se revoir. En plus de ça, il pourrait voir comment agit Dazai avec lui, il pourrait garder un œil sur lui. Il voyait bien que Dazai ne mentait pas, il voulait faire les choses correctement avec Sigma, et cela le rassurait au fond. Et puis, ils n'avaient rien prévu de particulier avec Chûya ce soir...
    Finalement, il acquiesça.
    – Ok, je connais une bonne adresse.
    Dazai sauta presque de joie, attirant les regards curieux de leurs collègues, qui devaient se demander ce qu'il se passait encore entre eux...

Surprise au théâtre BolchoïOù les histoires vivent. Découvrez maintenant