Chapitre 6 : Portraits Royaux et Tensions Glaciales

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Le jour tant attendu des portraits officiels de Noël de la famille royale était arrivé, et Nicholas ressentait un mélange d'excitation et de nervosité. Il avait préparé son matériel avec soin, conscient de l'importance de l'événement.

Dans le grand salon, transformé pour l'occasion en studio photo, la famille royale se rassembla. Le Roi Henri et la Reine Isabelle étaient l'image même de la dignité royale, tandis que les autres membres de la famille affichaient un mélange de réserve et d'aisance.

Cependant, c'était l'entrée du Prince Alexandre qui captura véritablement l'attention de Nicholas. Vêtu d'un costume noir aux lignes impeccables, le prince dégageait une aura de mystère et de retenue. Ses cheveux brun foncé étaient coiffés avec une précision qui accentuait les traits fins de son visage, et ses yeux bleus, d'une clarté glaciale, semblaient sonder l'âme.

— Commençons par le portrait de la famille, suggéra Nicholas, tentant de masquer son trouble.

La séance se déroula avec une efficacité professionnelle, Nicholas dirigeant les membres de la famille royale pour capturer leur essence dans un cadre festif et élégant. Le Roi Henri et la Reine Isabelle étaient des sujets coopératifs, offrant à Nicholas des sourires chaleureux.

Cependant, quand vint le tour du Prince Alexandre pour son portrait individuel, la tension monta d'un cran. Nicholas ajusta son appareil, conscient de chaque mouvement du prince.

— Si vous pouviez vous détendre un peu, Votre Altesse, suggéra timidement Nicholas, remarquant la posture rigide du prince.

Alexandre le fixa d'un regard qui semblait transpercer.

— Je suis parfaitement à l'aise, Mr. Lefevre. Faites simplement votre travail.

Nicholas sentit une pointe de frustration, mais s'efforça de rester professionnel. Il prit plusieurs clichés, tentant de capturer le prince sous différents angles. Cependant, chaque image reflétait la même expression distante et froide.

À un moment donné, Nicholas, voulant ajuster l'éclairage, trébucha sur un câble et manqua de renverser un réflecteur. Il se rattrapa de justesse, mais le bruit attira l'attention de tous.

— Excusez-moi, je suis un peu maladroit, s'excusa Nicholas, sentant ses joues rougir.

Le prince soupira, son expression se durcissant.

— Mr. Lefevre, je comprends que l'art de la photographie nécessite concentration et précision. Je vous en prie, concentrez-vous.

Nicholas se redressa, rencontrant le regard du prince.

— Je vous assure, Votre Altesse, que je suis entièrement dédié à capturer l'essence de votre famille et de la saison. Parfois, la perfection se trouve dans l'imperfection.

Le prince le considéra un moment, puis, d'une voix plus douce, concéda :

— Peut-être avez-vous raison. Poursuivons.

La séance se termina sans autre incident, mais Nicholas demeurait perturbé par l'échange. Il y avait chez le prince une mélancolie voilée, un mystère qu'il brûlait de percer.

En rangeant son matériel, Nicholas jeta un dernier regard sur les images capturées. Au milieu des sourires figés et des postures formelles, il espérait avoir saisi, même furtivement, un moment d'humanité chez le prince, une fissure dans son armure de glace.

En quittant le salon, le cœur lourd, Nicholas déambulait dans les couloirs du palais, les images des portraits royaux tournant en boucle dans son esprit. Il était frustré, se sentant incapable de percer le voile de glace qui entourait le Prince Alexandre.

Au détour d'un couloir, il trouva la porte entrouverte d'une pièce qu'il n'avait pas encore explorée : la bibliothèque royale. Poussé par la curiosité et le besoin de solitude, Nicholas pénétra dans la pièce.

La bibliothèque était un monde en soi, un sanctuaire de savoir et de silence. Des étagères en bois sombre, sculptées avec une finesse exquise, s'élevaient du sol au plafond, remplies de livres aux reliures anciennes et aux titres dorés. De grandes fenêtres laissaient entrer une lumière tamisée, créant un jeu d'ombres et de lumières sur les tapis persans et les fauteuils en cuir. L'air était empreint d'une odeur de vieux papier et de cire, et le silence était seulement troublé par le crépitement discret d'un feu dans la cheminée.

Nicholas s'avança, caressant du bout des doigts les dos des livres, absorbé dans ses pensées.

— Pourquoi est-ce si difficile de capturer l'essence de quelqu'un qui se cache derrière un masque ? murmura-t-il à voix haute, pensant être seul.

— Parce que certains masques sont portés depuis si longtemps qu'ils en deviennent une seconde peau, répondit une voix douce derrière lui.

Nicholas sursauta et se retourna pour voir la Reine Isabelle, debout dans l'embrasure de la porte, un sourire mélancolique aux lèvres.

— Votre Majesté ! Je ne vous avais pas entendue entrer, balbutia-t-il, gêné.

La reine s'approcha, ses pas feutrés sur le tapis épais.

— Je viens souvent ici pour trouver la paix. Et vous, Mr. Lefevre, cherchez-vous la paix ou les réponses ?

Nicholas hésita, puis, poussé par un élan de sincérité, confia :

— Je suis frustré. Les photos du prince... elles ne montrent pas l'homme que j'espère voir. Il y a une froideur, une distance...

La reine prit place dans un des fauteuils et invita Nicholas à s'asseoir en face d'elle.

— Alexandre a grandi dans un monde où chaque geste, chaque parole est observée et jugée. Depuis son plus jeune âge, il a appris à se protéger, à ne pas montrer ses émotions.

Nicholas écoutait, captivé par ces révélations.

— Son père et moi avons toujours essayé de le protéger, mais la vie d'un héritier du trône comporte des défis que nous n'avions pas anticipés. Alexandre a dû grandir vite, trop vite peut-être.

La reine semblait perdue dans ses pensées, son regard se voilant d'une tristesse maternelle.

— Je crois qu'il y a plus en lui, des profondeurs cachées derrière ce masque de froideur. Mais il faut du temps et de la patience pour atteindre le cœur de quelqu'un qui s'est muré dans sa solitude.

Nicholas ressentit une vague de compassion pour le prince. Derrière la façade de l'héritier royal se cachait un homme qui avait peut-être simplement besoin d'être compris.

— Merci, Votre Majesté, pour vos mots, dit-il doucement. Je vais essayer de me souvenir de cela quand je photographierai le prince.

La reine lui offrit un sourire chaleureux.

— Je suis certaine que vous saurez trouver la lumière derrière l'ombre, Mr. Lefevre.

En quittant la bibliothèque, Nicholas se sentait apaisé, armé d'une nouvelle compréhension. La prochaine fois qu'il verrait le Prince Alexandre, il regarderait au-delà du masque, cherchant l'homme derrière le titre.

Noël Sous le Ciel RoyalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant