Chapitre 1 - Beck

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Désormais loin de lui, les cris de Nolan ne parviennent plus jusqu'à mes oreilles. Seuls les pas lourds de mon père résonnent entre les murs de l'entrepôt. Telle une prédatrice, je le suis à la trace, mon Beretta pendant au bout de mon bras. De ma main libre, j'essuie rageusement mes yeux rougis. Il est hors de question que je paraisse faible face à lui.

Plus nos corps se rapprochent, plus l'adrénaline pulse dans mes veines. Heureusement, ce côté de l'immeuble est désert, ce qui me permet de me concentrer et de mettre toutes les chances de mon côté. Profitant de ce calme plat pour sortir mon téléphone et vérifier les caméras, un coup de feu me fait sursauter, suivi d'un hurlement strident. La voix rauque de mon père provoque en moi une montée de stress, me poussant à courir dans sa direction. Non.

Au bout du couloir sombre menant à l'aile réservée aux livraisons, Stephan se tient debout, surplombant de toute sa hauteur le corps blessé d'Isaiah, au sol. Son pied droit ne ressemble plus à rien, explosé par l'impact que lui a infligé mon ami qui, lorsqu'il m'aperçoit, me fait signe d'avancer, un sourire aux lèvres. Soulagée que ce soit Stephan qui se tienne là, j'obtempère promptement, venant me placer à ses côtés.

- Il est tout à toi, ma puce.

Je dévisage avec haine l'homme étendu à mes pieds. Son regard, si similaire au mien, n'a rien d'affectueux, bien au contraire. Ses iris bleus me renvoient ma haine en plein visage, me promettant silencieusement de se venger. Tu n'en auras jamais l'occasion.

Du coin de l'œil, j'aperçois une chaise que je m'empresse d'aller chercher. Mon arme toujours dans la main droite, je saisis le dossier de la gauche et traîne l'assise à ma suite. Le frottement du bois contre le sol résonne. Une fois à leur hauteur, je demande à Yuda de déplacer mon père qui, bien que blessé, demeure toujours aussi combatif. Heureusement, mon ami est bien plus fort, si bien qu'il parvient sans difficulté à le maintenir en place, en position assise. Désormais, c'est à mon tour de le dominer de toute ma hauteur.

Dix. Dix putains d'années que j'attends en ce moment.

Alors que je prends la parole, Isaiah me dévisage d'un œil mauvais, un sourire vicieux déformant ses traits. Mes mains toujours tachées de sang tremblent le long de mes jambes.

- T'en as mis du temps, ma petite Rebecca. Moi qui te croyais morte, ricane-t-il. Comment va ta mère ?

- Tu lui demanderas quand tu la rejoindras, ne soit pas trop pressé.

Bien que visiblement surpris par la nouvelle, il ne daigne pas se débarrasser de son sourire. Mon visage doit être rouge vif tant mon sang bat dans mes tempes.

Je lui tourne autour, tel un lion face à sa proie. Son visage se décompose à mesure que je perds mon calme. Ma lutte intérieure doit être palpable tant que je me retiens de lui tirer une balle dans la tête une bonne fois pour toutes. Lorsque je me retrouve à nouveau devant lui, je me baisse à sa hauteur, posant mes paumes sur ses cuisses. Alors qu'il tente à nouveau de se relever, Stephan fait immédiatement pression sur ses épaules, l'immobilisant avec force.

Quatorze, dis-je simplement. Ça fait beaucoup, tu ne trouves pas ? Personnellement, je trouve que ça fait beaucoup, continué-je devant son incompréhension. J'ai toujours rêvé de faire de toi une passoire. On va compter ensemble.

Bien qu'il se débatte, son pied blessé et la poigne de Stephan l'empêche de fuir, pour mon plus grand bonheur. Alors que la première balle se loge dans son épaule gauche dans un bruit sourd, je le laisse hurler de douleur avant de prendre la parole.

Michael Cole.

Son visage blanchit à mesure qu'il commence à comprendre. J'équilibre, perforant son épaule droite.

Thomas Smith.

Je poursuis ainsi jusqu'au treizième prénom m'empêchant de dormir la nuit. Je tremble, à bout de souffle. La treizième balle a presque faillit le tuer tant la douleur doit être insupportable. Son corps n'est plus que soubresauts, il ne parvient même plus à parler. Tentant tant bien que mal de reprendre mes esprits, j'ordonne à Yuda de me suivre en traînant le corps de mon père à sa suite. Bien que je n'ai rien touché de vital, la traînée de sang laissée derrière-nous indique qu'il n'en a plus pour très longtemps. 

Détestables (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant