| 5 |

98 7 4
                                    

Je terminai par un rouge à lèvre rouge sang et défroissai légèrement le tissu noir de ma robe en passant mes mains sur le dessus.

Mes cheveux chutaient dans mon dos en de splendides ondulations. Mes talons de fortune que j'avais déniché d'une brocante ajoutaient un total de douze ou treize centimètres à ma taille, faisant paraître mes jambes plus longues.

Je me lançai un dernier regard à travers le miroir de ma salle de bain en ajustant les bijoux que j'avais autour du cou, des doigts et des poignets. Après un dernier souffle, j'attrapai mon sac et descendis les escaliers en silence. J'avais prévu de faire le mur. Comme j'avais souvent l'habitude de m'enfermer dans ma chambre, je l'avais fermée à clé afin de ne pas lui laisser la possibilité d'y entrer.

Je pris ma veste pendue à la rambarde des escaliers. À présent, j'allais devoir passer devant le salon afin de pouvoir m'extirper de la maison. Je fermai les yeux et passai d'une traite, la respiration entièrement hachée.

Plus que l'étape de la porte et nous y sommes ! me souffla ma conscience.

Je tournai la poignée et m'expulsai à l'extérieur. Aussitôt, la pression quitta mes épaules. Je vérifiai une dernière fois si mes clés étaient dans mon sac. Une fois rassurée, j'attrapais mon vélo et grimpai dessus.

Après une bonne dizaine de minutes à rouler dans les rues, j'arrivai enfin à destination. La musique bourdonnait contre le sol, faisant vibrer les cellules de mon corps. Des flash lumineux s'échappaient de la maison.

Prête à me défiler, je remontai sur ma bicyclette toute rouillée. Ma conscience me hurlait de rester. De ne pas fuir comme je le faisais si souvent. Et pour une fois, j'avais envie de m'amuser, penser à autre chose que ma vie pathétiquement morose.

Décidée, je calai mon deux roues contre la murette et entrai dans la propriété. Je remarquai soudainement que les hommes armés ne protégeaient plus la résidence.

Une fois à l'intérieur, le brouhaha s'ancrait à mes tympans créant une symphonie désagréable dans tout mon corps. Des personnes se dandinaient au milieu du salon. Plus je m'enfonçais dans la villa, plus je découvrais des têtes. Une chose était certaine : nous étions plus que soixante-dix.

Les gens autour riaient, buvaient, dansaient, fumaient, s'embrassaient ou d'autres se disputaient.

Après m'être servi un verre d'alcool que je sirotais, je partis à mon tour danser. Je dansais dans me soucier du monde autour, je m'amusais. Earned It de The weeknd bourdonnait dans les enceintes.

J'avalai d'une traite mon verre afin de vivre cette putain de chanson comme elle le méritait. Je basculais mon corps dans tous les sens, jusqu'à sentir des yeux effleurer ma peau. Non, pas effleurer, plutôt fixer. J'avais cette sensation d'être observée. Quand ce fut presque désagréable, j'interrompis ma danse et cherchais le propriétaire de ces deux yeux qui me dévoraient du regard.

C'est que lorsque je vis sa silhouette au loin que je devinais. C'était lui. C'était Arès qui avait son putain de regard braqué sur moi. Il avait toujours ce même visage fermé, les sourcils habituellement froncés. Il contracta sa mâchoire trahissant l'agacement qu'il portait face à ma présence.

Mal à l'aise, je ne terminai pas ma danse et partis m'asseoir sur le canapé auquel personne n'avait posé ne serait-ce qu'un doigt depuis mon arrivée.

Alors que je posai à peine une fesse dessus, j'entendis :

-Ouhou ! Action ou vérité !

Après ça, tous les regards me dévoilaient au grand jour. Au loin, je vis Arès se rapprocher dangereusement vers moi. Il me tira le bras et nous guida dans la cuisine.

HeartlessOù les histoires vivent. Découvrez maintenant