Contretemps

Chapitre 2

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Après avoir passé plus de vingt tours à ne pas bouger d'une seule place, voilà enfin une opportunité qui se présente à moi. Maloney et Hadjar, respectivement troisième et quatrième, viennent de se sortir tous les deux après un contact inutile en fin de virage. Fittipaldi, qui était juste devant moi passe donc troisième, et je me retrouve quatrième.

La course se termine finalement dans le plus grand des calmes, sans aucun drapeau jaune ou dépassement, bien que je croie que Martins a failli finir dans le bac à gravier après avoir évité de justesse un lapin qui passait sur la route de ce que m'a dit mon ingénieur.

Niveau performances aujourd'hui, c'est quand même assez médiocre. J'ai eu du mal à me concentrer pleinement sur ma course parce que bien sûr, je me demandais ou Hauger en était dans la sienne, et surtout sa position actuelle. Et même si les paroles de Julie tournent en boucle dans ma tête comme un déclencheur pour ma motivation, je ne peux m'empêcher de continuer de me remettre en question. Me connaissant, il m'en faudra beaucoup pour que tout ça ne me passe, ou que je me pardonne entièrement. La place que je tiens actuellement n'est donc pas du tout méritée, puisqu'elle me revient après un accident ayant éliminé deux des concurrents que je devais atteindre, mais aussi parce que sans l'aide de cette fille, je n'aurais sûrement jamais eu le courage ou la motivation de monter dans ma voiture dans les temps.

Julie.

Bien sûr que je pense à ses mots, ils m'ont fait le plus grand bien. Mais surtout, pour je ne sais quelle raison, je n'arrive pas à me la sortir de la tête. Pas comme dans les films de romances clichés où le héros tombe amoureux dès le premier regard, loin de moi ces scénarios bien trop gnangnan. Mais je l'ai simplement trouvée formidable. Cette fille est une contradiction à elle seule : j'ai senti qu'elle-même n'avait pas la vie la plus simple, j'ai lu son expérience dans la maturité de ses yeux. Cependant, peu importe ce qu'elle a dû traverser, elle arrive à partager sa bonne humeur et son aide à un parfait inconnu, ou du moins quelqu'un qu'elle ne connaît pas dans la vraie vie.

Je sors finalement de ma monoplace, et après avoir échangé avec toute mon équipe pour célébrer un minimum cette quatrième position qui rapporte quelques points qui peuvent se montrer cruciaux, je n'ai qu'une chose en tête : retrouver Dennis.

Je me faufile assez rapidement hors des installations DAMS et je me dirige directement chez MP, là où je pourrai le trouver à coup quasi sur. Cette fois, je viens le voir en sachant ce que je veux lui dire, et en ne fuyant ni mes responsabilités, ni le fait d'envisager qu'il me déteste pour le reste de sa vie après l'incident.

En faisant le tour des installations principales, je ne tombe que sur son ingénieur, qui comprend bien vite pourquoi je suis là à en juger par le regard désespéré qu'il lance vers moi, accompagné en plus d'un long soupir.

« Troisième porte au bout du couloir sur ta gauche. Bon courage d'avance... » dit-il en me glissant une tape amicale dans le dos.

Après l'avoir remercié, je souffle un coup et m'aventure finalement dans ce couloir dont l'atmosphère semble s'alourdir au fur et à mesure que je me rapproche de sa driver room. Arrivé devant l'entrée, je toque une fois, sans réponse. Et au moment où j'allais reposer ma main contre cette porte, elle s'ouvre en grand devant moi, et le spectacle auquel j'assiste me désole au plus haut point. Son regard est vide, ses cheveux sont en bataille et il semble épuisé. Une sensation plus que désagréable se propage dans mon ventre qui se tord littéralement en deux, mais avant que je n'aie pu dire ou faire quoique ce soit, Hauger me prend au dépourvu et m'attire contre lui dans une étreinte fraternelle dont j'avais plus que besoin.

« Je suis désolé, vraiment. Je me suis comporté comme un vrai con juste avant la course, et je n'aurais jamais dû te dire toutes ces atrocités, ça a juste dû te faire beaucoup trop réfléchir et tel que je te connais, ça t'a empêché de te donner à fond. Il s'écarte doucement et renifle un coup. Tu n'as pas fait exprès de me sortir et je ne sais même pas comment j'ai pu envisager à un moment que toi, Monsieur le Prince charmant, ait pu être égoïste une fois dans ta vie. Tu es sûrement la personne la plus altruiste et gentille que je connaisse, et ce genre d'erreurs arrive à tout le monde. Il recule et se passe la main dans les cheveux. Je comprendrais complètement que tu ne veuilles plus me parler après un comportement aussi minable de ma part, mais sache que je regrette vraiment ce que j'ai dit. »