Chapitre 14

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 « Votre Altesse ? »

William s'éveilla sous les secousses saccadées. En ouvrant les yeux, le visage paniqué d'Atlas le tira de ses rêves. Il ne cachait pas son mécontentement grognant et cherchant à repousser son réveil humain. Seulement, son capitaine semblait vraiment pressé :

« Je suis navré de vous réveiller si tôt, mais nous avons un problème ! »

Après un long râle, un raclement de gorge, William se redressa enfin. Malgré sa mine endormie, il parvint à interroger Atlas à l'aide de ses yeux bleus. Son corps était lourd, son cerveau peinant à se réactiver :

« Bow... Il a été retrouvé par nos éclaireurs, il a été attaqué... »

Cette informations produit l'effet d'un coup de massue qui réveilla William pour de bon. Il bondit hors de sa paillasse en quelques secondes, ignorant les vertiges que cette brutalité lui provoqua. Il tenait à peine sur ses jambes, ses muscles s'éveillant tout juste. Atlas dû se tenir prêt à le soutenir si celui-ci chutait à cause de se réveil soudain :

« Où est-il ?

-Avec Transval. »

Le prince bougea directement, il quitta sa tente. Ses cheveux qui démontraient son temps de sommeil particulièrement long, ses vêtements froissés, tout montrait qu'il venait de se réveiller. Et qu'il n'avait pas pris le temps de se refaire une beauté.

Pour lui, son apparence passait après cette information. Il n'y avait même pas songé. Si Bow avait été retrouvé, cela signifiait qu'il avait été attaqué peu de temps après son départ. Le message n'avait donc pas été délivré.

Les soldats le toisaient d'un œil abasourdi, ils n'avaient pas l'habitude de voir leur prince dans un tel accoutrement. Nombre d'entre eux ne savaient pas encore pour Bow, ils ne comprenaient donc pas les raisons de ce nouveau style quelque peu désobligeant.

Il fallut au prince que quelques minutes pour être dans la tente du médecin. Transval était penché sur le corps d'un soldat, des tissus imbibés de sang étaient éparpillés sur le sol.

Des gémissements de douleur s'élevaient dans la pièce, rendant l'ambiance désagréable. C'était comme si un homme se faisait torturer tout près d'eux.

Atlas entra à la suite, l'inquiétude marquant ses traits. William s'approcha, plaquant ses cheveux emmêlés vers l'arrière, sans succès :

« Alors ? »

Le médecin réalisa la présence de son prince, sortant de son état de concentration. Son expression paraissait défaitiste. En posant les yeux sur son messager, William comprit qu'il ne s'en tirerait pas. Ses blessures étaient bien trop importantes, bien trop profondes.

Son incapacité d'action le frustra, il serra les poings en craquant sa mâchoire. Bow, dans un souffle haletant, un souffle annonçant sa mort, ouvrit les yeux et reconnut son prince. Une certaine lueur apparu dans ses yeux rouges inondés. La couleur de son iris n'était plus visible, le brun devenait rouge et le blanc l'était encore plus :

« Votre Altesse... »

William s'empressa de contourner Transval pour s'approcher près du visage de son soldat. Bow semblait quelque peu heureux de voir son supérieur lui accorder tant d'importance en cet instant difficile. D'autant plus qu'il avait tenu tout ce temps dans l'unique but d'espérer le voir une dernière fois :

« La lettre... Les brigands... susurra-t-il entre deux souffles »

Des brigands. William regarda dans les poches intérieurs du vêtement de son messager, n'y trouvant pas la lettre officielle. Ces brigands savaient ce qu'ils cherchaient, ils n'avaient pas volé les possessions de valeur que Bow portait sur lui. Sa montre en argent était toujours accroché sur sa poche intérieur, son collier avec une perle d'ivoire était toujours sous sa chemise.

Cette attaque ne pouvait avoir été mené par de simple brigand. Pour le venger comme il se doit, William partit à le recherche de davantage d'informations :

« Ces brigands, t'ont-ils parlés ? Comment étaient-ils ? »

Bow dressa son regard pour fixer le plafond. Son souffle s'amenuisait déjà :

« Beau blond... Cheveux long. C'est lui, lui qui m'a fait cela. »

Un blond... La première image qui vint en tête de William c'était le soldat de Hector. Mais cela ne pouvait pas être lui, cela n'aurait aucun sens.

William ne s'attarda pas sur sa réflexion en sentant Bow commencer à partir :

« Je prendrais soin de ta famille Bow, merci de m'avoir servi avec tant d'honneur et de grâce durant ces dernières années. »

Le messager sourit, Transval cessa de tripoter son corps en espérant le guérir, comprenant qu'il n'y avait rien à faire. Atlas détournait le regard, comme si voir un autre de ses camarades mourir pouvait faire déborder son vase.

William en revanche se força à assister à la scène dans ses moindres détails. La mort de son soldat était de sa responsabilité, il devait la subir jusqu'au bout. Le regard fixé sur Bow, il assistait à son dernier souffle, son regard qui devint vitreux et son corps qui s'affaissait. Ses muscles se décrispèrent, et son sourire disparu.

Ce n'était désormais plus qu'un cadavre allongé sur le lit médical.

Le silence tonna, les souffles étaient coupés. Transval retenait ses larmes, frustré de ne pas avoir pu sauver cet homme. Atlas se mordait l'intérieur de la lèvre, ne songeant qu'au réconfort que Karl pourrait lui apporter lorsqu'il saura.

William s'était éteint durant quelques secondes, comme si une partie de lui partait avec Bow, c'était le premier soldat qu'il perdait dans cette guerre et il ne connaissait pas les raisons :

« Je suis désolé Votre Altesse, j'ai tout fait. »

William baissa son regard sur son médecin, revenant à la dure réalité. Transval semblait dépassé par cette situation. Un sourire doux et sincère se dessina sur les lèvres de son supérieur, le prince vint poser sa main sur son épaule :

« Tu as fait ton maximum, je le sais. Tu es médecin, pas magicien. »

Ce simple réconfort soulagea quelque peu les songes de son médecin. Atlas sortit de la tente assez furieux, rongé par les émotions, il irait se blottir dans les bras de son amant, n'attendant que cela.

Seul William parvint à garder ses émotions droites, ce avant qu'il ne repense à sa réflexion. Son regard se durcit, son corps se contracta à nouveau.

Léandre de Florince, un beau blond, au cheveux long.

Il fit demi-tour, retournant dans sa tente en ignorant tous les regards de ses hommes. Cela ne lui paraissait pas logique, pourquoi un garonien aurait fait cela ?

Surtout un garonien si proche de Hector. Il se remémora leur échange, dans les moindres détails pour comprendre. Plusieurs suppositions qui ne tenaient pas la route naissaient pour s'éteindre comme Bow l'avait fait. Ce cinéma dura jusqu'à qu'une lui paraisse plausible.

La colère était désormais à son maximum :

« Hector... »

Il fit volte-face, quittant sa tente. Il arrêta le premier homme qui passait devant lui, le surprenant quelque peu. Moldered ne s'y attendait guère :

« Votre Altesse ? son ton se voulait peu serein en percevant la colère chez son prince.

-J'ai dormi combien de temps ?

-Je ne vous ai pas vu depuis deux jours. »

Deux jours... Deux jours de sommeil pour rattraper ses temps de sommeil perdu afin de préparer la rencontre avec les garoniens. Ils avaient déjà rompu les conditions pour une bonne alliance.

Demain était la date du rendez-vous.

Il revint sur sa décision, il irait et il règlerait ses comptes avec ce prince de Garone. Il venait potentiellement de causer la mort d'un de ses hommes pour ce simple rendez-vous. Les conséquences, il comptait bien les lui faire regretter. 

Princes de Guerre - Tome 1 : Le début d'une guerre Où les histoires vivent. Découvrez maintenant