Le démon m'embrasse ! Je répète : le démon m'embrasse !
Plus difficile à croire encore, je l'embrasse en retour ! Sans aucune retenue, sans même penser aux conséquences. Je l'embrasse comme-ci ma vie en dépendait, comme-ci à tout instant tout disparaitra comme dans un mirage. Je l'embrasse comme j'en ai eu l'envie depuis un moment maintenant, alors que je pensais la chose impossible, interdite.
Ses lèvres contre les miennes sont bouillantes, ses doigts contre ma peau le sont d'autant plus, mais rien qui ne soit apparent à une torture, oh non, bien loin de là. Ce désir dont il est atteint se mélange sans retenue au mien et j'ai l'impression que l'on pourrait exploser à tout moment si l'on continue comme ça. Je n'ai même pas envie de me poser de question comme je pourrais le faire avec n'importe quel autre homme, pas envie de me demander si cela lui plaît, je sais que c'est le cas, je le ressens. Je ne veux même pas savoir si on devrait faire ça, si on a le droit, à quoi ça nous mènera. Non, je ne me demande rien parce qu'à cet instant précis, c'est normal, c'est dans l'ordre des choses, ça doit arriver, je le sais. Caym le sait également, c'est certain.
D'ailleurs ce dernier approfondi ce baiser bouillonnant, passe sa langue sur mes lèvres avant que je ne lui cède le passage et qu'il rencontre la mienne. Ses mains passent sous mon haut, tandis que les miennes se fraient un chemin jusque son crâne ou j'ai à loisir de passer mes doigts entre ses cheveux et de tirer à volonté. Le grognement sans gêne du démon me prouve que ça ne lui déplait visiblement pas, ce qui m'encourage à continuer.
Je ne dirais pas non à un peu plus, ou un peu moins, dans le genre des vêtements en moins. Caym lit mes pensées ou bien pense la même chose, car il n'en faut pas plus pour que mon pull se retrouve bientôt au-dessus de ma tête. Et alors que je sais qu'il y aura bientôt plus, plus de mains baladeuses, plus de baisers passionnés, peut-être même plus d'habits au sol, un raclement de gorge nous surprend et nous stoppe net dans cet échange.
Noël, les yeux gros comme des soucoupes, se tient dans l'embrassure de la porte et nous fixe comme s'il venait de voir la Sainte Marie avec Jésus dans les bras. Caym grogne fortement et me fixe. D'accord ce genre de référence n'est toujours pas accepté, compris.
— Hé les tourtereaux, non pas que j'avais envie d'interrompre cette scène bouillante sortie tout droit d'un bon roman cochon, mais je viens de rentrer de mon voyage et il y a quelqu'un à la porte pour toi Eden. Tu sais, le gars que tu as rencontré, Dario ?
Je jure et renfile mon pull, j'avais oublié qu'il devait passer. Je m'éloigne un instant de Caym. Ce dernier n'a pas bougé, mais le désir qu'il avait il y a quelques secondes encore pour moi, c'est désormais transformé en une rage pure et simple. Contre moi, contre Noël qui nous a interrompus, contre ce qu'il vient de se passer, ou contre la mention de Dario ? Aucune idée, mais ça n'empêche que quelque chose lui donne envie de tout péter.
— Caym ? Je vais lui demander de partir pour qu'on puisse parler tranquillement tous les deux, d'accord ? Parce qu'on doit parler et que tu ne dois pas disparaitre pendant plusieurs jours, voire semaines, ça marche ?
Noël a la sainteté d'esprit de sortir en vitesse de la pièce et de fermer la porte derrière lui quand Caym nous sort ses yeux de démon noir sans aucune expression sur le visage.
— Il ne s'est rien passé.
— Caym...
— Non, poupée. Tu oublies, ce sont tes sentiments d'humains qui m'ont affecté rien de plus. Ça ne signifiait rien, est-ce que c'est clair ?
Je m'apprête à protester, à lui dire qu'il a tort, que c'est aussi lui qui ressentait tout cela, pas que moi, mais il voit clairement vers quoi vont mes pensées et il m'empêche d'ouvrir la bouche. Une de ses mains vient aussitôt se refermer autour de mon cou et serrer, tout comme la première fois qu'il a essayé de me tuer dans le magasin. Mais cette fois ci je n'ai pas peur, je sais qu'il ne me fera aucun mal, je sais ce qu'il ressent, je sais qu'il est confus et peut-être même qu'il a peur. Alors je ne bouge pas, je n'essaie pas de lui enlever sa main, je n'essaie pas de le supplier. Je me contente de le fixer et de lui faire comprendre tout ce que je ressens, aussi bien par mes pensées que par mon regard. Je ne sais pas si cela fonctionne, mais sa poigne se desserre rapidement et me lâche comme-ci, pour une fois, c'est moi qui l'avais brûlé.
Il disparaît ensuite sans aucun mot.
***
Dario est assis sur le canapé en train de discuter avec mon meilleur ami. Je rentre dans la pièce encore chamboulé de ce qu'il vient de se passer. Comment un simple baiser peut m'avoir fait ça, comment un simple échange aussi commun peut m'avoir totalement retourné ? Parce que je sais que c'est ce qu'il vient de se passer, comme-ci une lumière c'était éclairé dans mon cerveau, quelque chose d'éteint depuis trop longtemps qui se réveille enfin après des années d'hibernation. Une petite pièce de moi qui me manquait et qui est soudainement arrivé pour être remise à sa place. Et cette pièce, va comprendre pourquoi, c'est un démon. Un démon qui va changer ma vie, la rendre meilleure, un démon avec qui je vais partager un tas de chose, une vraie histoire d'amour comme on n'en a jamais connu avant. Je le sais seulement avec un baiser et je ne comprends pas comment c'est possible.
Jusqu'à ce que je l'entende au fond de moi, cette voix féminine qui a tout créé : Madame Irma.
— Je te l'ai dit Eden, que l'amour arrivait. Mais n'oublie pas, il fera mal avant de faire du bien.
J'essaie de regarder partout autour de moi, mais comme je m'y attendais, elle n'est pas là. Cette folle avait tout planifié et savait ce qui allait se passer. Je le comprends maintenant, reste à convaincre le démon qui aura sûrement beaucoup plus de mal que moi à l'accepter au vu de sa réaction.
J'avance dans la pièce pour être vu de Dario, ce dernier se lève un grand sourire aux lèvres, qui retombe quand je ne lui rends pas. Difficile d'être super enthousiaste à l'idée de le voir ici, alors que je m'apprête à lui dire que je ne veux plus le revoir du tout. Je ne peux pas faire semblant de m'intéresser à lui, alors que dans ma tête Caym occupe chacune de mes pensées.
Noël s'éclipse à nouveau. Il a le don de comprendre rapidement quand les choses vont mal tourner. Je pense qu'il doit déjà regretter d'être de retour, son petit séjour chez ses parents a dû s'apparenter à des vacances paisibles comparé à l'enfer que j'ai vécu ici. Pas sûr en plus que la situation ne s'améliore maintenant que je dois faire comprendre à mon petit démon qu'on est clairement fait pour être ensemble. Mais bon, pour le moment ma priorité et de laisser tomber Dario en douceur, lui dire gentiment qu'on n'est pas fait pour être ensemble. Il aurait été parfait si ma vie n'était pas mêlée à Caym, j'en suis certain, mais on ne choisit pas toujours ce qui nous tombe dessus. J'essaie de trouver les bons mots pour ne pas blesser l'homme en face de moi, tout en étant tout de même direct afin de lui faire comprendre que ce ne sera jamais possible même dans un futur proche. Dans ma tête j'ai tout un discours qui est prêt, sur le fait que c'est probablement un homme génial, attentionné et à l'écoute, enfin toutes les qualités que je peux trouver sur le peu de temps que je l'ai connu. Je lui dis que le timing est mauvais malgré tout, que j'ai rencontré quelqu'un avant lui. Bref, dans ma tête tout est absolument parfait, mais ça, c'est dans ma tête, avant que je n'ouvre la bouche.
— Je ne souffre pas du syndrome de Gilles de la Tourette tu sais ?
D'où est-ce que ça sort ça ? Aucune idée, ce n'était absolument pas prévu dans ce que j'avais à dire, mais apparemment mon cerveau a décidé que je devais lui faire part de cette information avant toute autre chose. Quoi de plus logique ?
Dario se pince les lèvres et froncent les sourcils, un petit « d'accord » s'échappe de ses lèvres avant qu'il ne croise les bras et attendent visiblement autre chose venant de moi.
— Tu es top, mais vraiment tiptop, genre super sympa et tout...
— Mais tu en pince pour ton coach en séduction ? finit-il à ma place.
Je hoche la tête sans un mot. Dario sourit sans une once de déception tandis que je souffle de soulagement, c'était une conversation super difficile à avoir. Ok, je n'ai rien dit, il a tout fait à ma place, mais quand même j'ai le droit à un peu de mérite.
— Ne t'en fait pas Eden, je ne t'en veux pas. Il n'y a qu'un aveugle pour ne pas voir comment tu le regardais, mais surtout comment lui te regardait. J'ai voulu tenter ma chance puisque tu me disais qu'il n'y avait rien, mais je suis ravi pour toi que tu t'en sois rendu compte. Je te souhaite vraiment d'être heureux.
Sans un autre mot il s'approche de moi et dépose un baiser sur ma joue avant de se reculer puis de sortir de la maison. Je n'ai pas le temps de réfléchir à ce qu'il vient de se passer car une douleur intense me transperce le corps, je me plie en deux et tombe à genoux alors que mes jambes ne me retiennent plus. J'ai mal pourtant je sais bien que la douleur ne m'appartient pas. Elle vient de Caym.
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Croix de bois, croix de fer...
RomanceA cause de Madame Irma, Eden se retrouve étrangement lié à Caym. Le problème ? Caym est un démon !