Remember Me

14

Pdv Omniscient :

Le mois de Mars s'installait lentement sur la capitale, et avec lui, les jours se rallongaient progressivement.

Cela faisait un peu plus de deux mois depuis l'incident provoqué par le jeune noiraud et ses amis. Tant de choses s'étaient passées, en ces deux mois, que Jungkook avait perdu la notion du temps.

Aucune larme n'avait sillonné ses joues depuis longtemps, mais leur absence laissait place à des joues creuses, dessinant les contours anguleux de sa mâchoire. Son teint, autrefois vivifié par ses nombreuses escapades à moto, s'était fait livide, s'attirant quelquefois les regards inquiets de ceux qui le voyaient. Quant à ses yeux, auparavant si expressifs, s'étaient ternis, ne brillant plus, comme éteints.

Oh, il vivait certes, mais tout son être s'était mis en mode automatique, si bien qu'il n'avait plus vraiment conscience d'exister, d'être vivant.
Ces journées se résumaient à une routine, qu'il avait fini par accepter.
Le matin, s'il n'était pas déjà réveillé par ses cauchemars nocturnes, il se réveillait à l'aube, son dernier plaisir étant de voir le jour se lever à l'horizon. C'était d'ailleurs seulement à ce moment que ses prunelles reflétaient la mosaïque de rose et de bleu qu'était le ciel.
Le reste du temps, il obéissait silencieusement au châtain, ne trouvant même plus la force de répondre. Il se contentait d'hocher la tête ou d'acquiescer silencieusement.

Ce soir, ils devaient se rendre à un événement important pour la famille Kim, à laquelle bon nombre de personnalités importantes allaient participer et le jeune héritier était devenu encore plus odieux qu'avant à l'égard du noiraud ces derniers jours.

La raison principale de sa haine, qu'il ne dissimulait à présent plus, était simple :
Si-woo ne cessait de complimenter le talent de Jungkook en affaires, vantant les mérites de la "jeune recrue" comme absolument fantastiques. C'était vrai, le noiraud était réellement doué dans ce domaine, sans y avoir pourtant jamais mis les pieds. Et cette popularité croissante du jeune homme au sein de la famille avait eu le don d'énerver le plus âgé.

Son comportement s'était fait extrêmement froid, bien plus qu'auparavant en tout cas, vis à vis du plus jeune, le traitant comme un moins que rien et ne se gênant pas pour lui faire des remarques cinglantes ou des reproches à longueur de journée. Oui, c'était complètement puéril, lui-même en avait conscience, mais c'était la seule manière pour lui de ne pas perdre sa fierté, à laquelle il tenait bien trop. Une façon complètement stupide de ne pas perdre la face.

- Ton costume est dans ta chambre, tâche de ne pas me faire honte ce soir. Ordonna le châtain quand Jungkook eut fini de trier des dossiers.

Il avait fini par donner une chambre au noiraud et ce dernier s'y dirigea, marchant bien trop lentement au goût du plus âgé.

- Dépêche toi. On va arriver en retard.

Un vertige soudain saisit le jeune homme, qui dû se rattraper in extremis au mur afin de ne pas tomber. Lui-même ne savait plus depuis combien de temps il n'avait pas mangé, sûrement trop longtemps au vu des signals désespérés que lui envoyait son corps.

- Oui Monsieur.... Articula le noiraud, avant de disparaitre dans la pièce qui lui avait été attribuée.

Sa tête pulsait de douleur et chaque battement de son cœur semblant amplifier son mal être. Des vagues de chaleur déferlaient sur lui alors qu'il retirait vivement son pull, évitant soigneusement de croiser son propre regard dans le miroir.
Son corps lui inspirait un dégoût profond,
en particulier lorsqu'il voyait ses bras, constamment marqués de nouvelles cicatrices, ne laissant aucun espace de peau intact.
Pourtant, malgré cette révulsion, ses bras mutilés étaient les seuls témoins tangibles
de sa propre existence. Ils étaient les seuls à
lui rappeler qu'il était vivant, que quelque part, au-delà de la douleur et de la désillusion, il persistait encore dans son monde bien trop chaotique. Ils étaient ses ancres, ses points de repère dans l'océan tumultueux de son existence, lui offrant un fragile sentiment de réalité dans un univers qui menaçait de l'engloutir à tout instant.