2022. Concours. Réécriture possible.
_______________Marianne contemplait l’étrangère qui la fixait en retour dans le miroir de sa coiffeuse, parée de lourds bijoux et apprêtée au mieux. Peu importe combien elle se voyait ainsi, elle ne se reconnaissait toujours pas. Comme si, à partir du moment où on l’emprisonnait dans son corset, une autre prenait sa place. Ce n’était plus “Marianne”, mais la princesse Marianne Séléna Alba de Moore, première prétendante au trône d’Agrigiane, admirée de tous.
-Et voilà votre Altesse, j’ai terminé. Comme d’habitude, vous êtes éblouissante.
Elle se regarda une nouvelle fois dans le miroir, comme pour approuver le travail de sa domestique, alors qu’elle n’avait même pas pu choisir sa robe.
-Je vous envie un peu. Vous êtes belle quoi que vous portiez, et vous pouvez aller à ces grandes fêtes où vous mangez toutes ces bonnes choses… Oh, n’oubliez pas votre éventail !
“Si seulement…” Si seulement elle ne devait pas faire tout cela. Lana l’enviait, mais sans savoir qu’elle, aurait aimé être à sa place. Remplir son service contre le salaire qui lui permettait de faire absolument ce qu’elle voulait durant son temps libre. Au lieu d’exprimer cela, elle se contenta de sourire à la servante en se retournant pour prendre l’éventail qu’elle lui tendait, souhaitant au plus profond de son cœur que ce soit la dernière fois.
-Merci Lana.
~*⚜*~
Dans l’atmosphère de lumière et de rires respirant le faste, les grandes portes ouvertes sur les balcons qui laissaient passer la brise du soir étaient plus que bienvenues. Quelle chance d’avoir la pleine lune en cette soirée claire… Les étoiles brillaient d’une intensité rare et le ciel en paraissait presque cobalt. Des invités vinrent rompre sa sérénité au moment où un oiseau passait au-dessus de sa tête pour rejoindre les arbres devant elle.
-Oh, excusez-nous votre altesse, nous vous pensions à l’intérieur, en meilleure compagnie, salua l’une des jeunes filles du groupe en se cachant derrière son éventail.
“Oh non…” Elizabeth Montgomery. La fille du duc Montgomery, la fine fleur de la haute société, et surtout sa plus insupportable peste. Pour une raison inconnue, elles avaient été incapables d’entretenir autre chose qu’une communication hostile depuis leurs débuts.
-Nul besoin de vous excuser. Comment allez-vous ? interrogea-t-elle en retrouvant un sourire de façade. Cela faisait longtemps…
-Bien trop longtemps. Vous nous avez manqué, à mon dernier thé… Mais je comprends bien que vos obligations ne vous permettent pas d’honorer tous vos rendez-vous. Comment se porte votre fiancé, à ce propos ?
-Merveilleusement bien, je vous remercie.
-J’avoue admirer votre esprit libéré. Vous ne vous encombrez pas de toutes les convenances et d’une morale étouffante…
-En effet. Il est d’ailleurs heureux que vous le mentionnez, car je dois justement m’entretenir avec le marquis Jackson à propos d’une affaire privée, lâcha Marianne en s'avançant pour retourner à l’intérieur. Je vous souhaite de continuer à passer une excellente soirée, mesdemoiselles.
Elle se dirigea droit vers le jeune homme en question et l’arracha à la discussion qu’il avait au moyen de son plus beau sourire pour une valse au milieu de la salle. Elle enchaîna d’autres danses entre plusieurs conversations mondaines ou sérieuses, accomplissant son rôle à la perfection avant de s’excuser quand une servante vint lui remettre un papier.
~*⚜*~
Elle avait couru à en avoir les poumons déchirés par l’effort et le cœur prêt à exploser, jusqu’à la plage la plus proche, dominée par l’ombre d’un immense bâtiment. Quelqu’un attendait au pied du galion, on distinguait à peine sa silhouette, mais elle le reconnaissait sans problème. Il était enfin là ! Même si chaque souffle, chaque pas lui coûtaient, elle redoubla de vitesse pour le rejoindre au plus vite, se précipitant dans ses bras grands ouverts en exprimant tout son bonheur. Enfin ils étaient réunis. L’homme accusa son élan en exécutant une pirouette puis la reposa à terre tout en la couvrant de son long manteau.
-Tu as pris ta décision ?
Elle acquiesça vivement en s’accrochant à sa chemise, les yeux pétillants et mille mots dissimulés derrière son sourire.
-Je veux régner sur les océans à tes côtés, pour toujours.
-Cela ferait de moi le roi des pirates alors ? Ça me va, rit-il avant de la coiffer de son chapeau débordant de plumes et de perles.
-Roi de mon cœur pour commencer, s’amusa la princesse en retour.
-Ça me va aussi. Ma reine, murmura-t-il en se rapprochant pour déposer sur ses lèvres un baiser aussi doux que du miel.
~*⚜*~
Être pirate n’était pas de tout repos non plus. Elle avait goûté un temps à cet irrésistible parfum de liberté que dégageait l’océan, le fait d’avoir pour seul refuge le bateau qui ne restait jamais au même endroit, de ne jamais savoir de quoi serait fait le jour même, de prendre ce qu’il lui plaisait chez les vaincus. Il avait aussi fallu assumer son rôle de seconde, en dirigeant son équipage comme elle aurait dû diriger son royaume, c’était donc le retour des règlements et de la hiérarchie. Elle avait fui vers ce qu’elle pensait être plus de liberté, mais au final, cela équivalait presque à sa vie de palais. A la seule différence qu’elle avait choisi de se plier à ces codes-ci. Son statut de hors-la-loi l’avait cependant vite rattrapée et sa cavale avait commencé, toujours aux côtés de son aimé. Sauf qu’il n’y avait aucun souci tant qu’elle ne se faisait pas prendre.
Elle avait aussi rencontré de nombreuses personnes, bien différentes. Des personnes privées de membres, d’un sens, de biens, de vivres, de droits, de morale aussi. Mais jamais d’avenir. Bien que victimes de leurs conditions, tous faisaient leur possible pour la transformer en autre chose, en usant de tous les moyens à leur disposition. Elle avait alors pu se rendre compte que la liberté comme elle l’entendait n'était finalement que ce qu'elle voulait en faire. Puisqu’elle pouvait penser, s’exprimer, bouger, elle avait au moins la liberté d’exister comme elle le voulait. La “liberté” absolue n’était peut-être rien de plus qu’une chimère, mais elle était toujours libre de choisir les contraintes qu'elle souhaitait supporter et celles qu’elle ne faisait que subir. En cela, elle avait finit par conclure au cours de ses voyages que sa liberté à elle était d’aider celle de toutes ces personnes qu’elle croisait sous la protection de son pavillon noir.
_______________Vous avez le droit d'avoir trouvé la prose un peu lourde et maladroite, j'ai dû mettre moins d'une heure à l'écrire.
VOUS LISEZ
Concours et légendes inachevés
RandomRecueil de textes rédigés pour des concours, d'histoires courtes et débuts ou morceaux d'histoires en attente. Publiés par ordre d'écriture.