Chapitre 11 : Lena

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Lena

C'est étrangement calme depuis que nous sommes rentrés de l'hôpital.

Je suis allongée sur un transat au bord de la piscine. Je ne cesse de repenser à la conversation à Trou d'Argent avec Haley. C'est comme si on avait ouvert une porte, et qu'on était resté planté devant. Elle a besoin de mon aide, mais je ne sais pas comment l'aider. Elle arrive près de moi avec ses béquilles qu'elle maîtrise déjà plutôt bien.

"Léna, voici la liste des endroits où tu peux te rendre pour déposer tes aquarelles. Je les ai contactés, ils sont déjà d'accord."

"Oh, merci Haley, c'est gentil d'avoir fait ça pour moi !"

Ça devient plus concret soudain.

"De rien, j'avais rien d'autre à faire, je risque d'être un peu bloquée pour les prochains jours..."

"En effet ma pauvre, t'inquiète pas, on va trouver de quoi s'occuper."

"En fait, j'ai eu une idée. Tu te rappelles quand je t'ai dit que la communication du restaurant Cocomoa n'était pas terrible ?"

"Oui ?"

"Eh bien, je vais me porter bénévole pour la faire. En plus de la cagnotte, je trouve que c'est une bonne manière d'aider les Rodriguais et je pense que c'est dans mes cordes. En plus, ça me fera un projet à mettre sur mon CV."

"C'est une super idée Haley."

"Merci, je vais aller les voir demain, je les ai déjà appelés pour tes aquarelles d'ailleurs. Il faut juste que je trouve quelqu'un pour m'y emmener."

Julien vient se baigner à côté de nous. Avec la blessure d'Haley, j'en avais oublié le malaise d'hier soir. Je décide de m'éclipser pour me concentrer sur mes aquarelles. Je retourne dans notre chambre où il y a un petit bureau et commence à peindre en prenant pour modèles des photos que j'ai prises récemment.

Ça doit faire deux heures que je suis dans la chambre quand on frappe à la porte. C'est Julien. Je l'invite à me rejoindre.

"Tu fais quoi ?" demande t-il en s'approchant.

"Je peins."

"Je peux regarder ?"

"Vas-y...."

Je dépose mon pinceau dans le verre d'eau alors qu'il feuillette mes peintures.

"C'est très beau. Très réaliste."

"Merci Julien."

Il s'assoit sur le lit.

"Léna, je voulais m'excuser pour hier soir. J'aurais dû te demander ton consentement, j'avais beaucoup bu, je passais une mauvaise journée..."

"Ne t'inquiète pas," le coupai-je. "C'est pardonné. Je t'avoue que ça m'a surprise sur le moment, je ne m'y attendais pas. Je n'aurais jamais pensé que j'aurais pu te plaire, sincèrement !"

"Je pense que tu plais à tous les garçons, tu es super belle."

Je souris, gênée. Je sais que je peux plaire, pourtant, je ne me considère pas comme incroyablement belle.

"En tout cas, je ne veux pas que ça soit un problème entre nous. J'espère que ça ne changera rien dans notre relation."

"Non, t'inquiète pas."

"Ok, tant mieux. Je vais prendre une douche, à toute à l'heure."

"A toute."

Même si je l'apprécie, je n'ai jamais été super proche de Julien. Parmi les garçons, c'est avec Léo que je me suis toujours le plus entendue. Léo a un tempérament calme, comme moi. Mais j'aime aussi le fait que malgré sa tranquillité, il s'intègre facilement. Il a la conversation facile. Il n'est ni un suiveur, ni un leader, c'est un indépendant. Et pourtant, il est loin d'être un solitaire, il est plutôt un caméléon.

Je sors dans la cuisine pour grignoter quelque chose et voir si Léo est dans la maison. Je croise uniquement Théo, une console Switch dans les mains.

"Théo, tu n'as pas vu Léo ?"

À chaque fois que je le croise, je suis choquée de voir à quel point il a grandi. Il n'a plus sa petite tête de bébé.

"Je crois qu'il est sur la plage, devant la maison."

"D'accord merci."

J'enfile des tongs et descends les marches du jardin qui mènent jusqu'à la mer. Effectivement, Léo est là, assis sur le sable, face aux vagues brillantes. En m'approchant, j'entends sa voix, il est au téléphone, surement en train de discuter avec sa copine. Alors, je fais demi-tour le plus silencieusement possible, pour ne pas qu'il me remarque.

J'ai le temps de remonter quelques marches avant de l'entendre m'appeler.

"Oui ?" dis-je en me retournant, l'air détaché.

"Je ne savais pas que tu étais là."

"Oh, c'est parce que j'ai fait l'aller-retour, on te cherchait et quand j'ai vu que tu étais au téléphone, j'ai fait demi-tour pour ne pas te déranger."

Ce que je dis n'est pas totalement faux, même si j'étais la seule qui le cherchait. Je redescends les marches pour revenir sur la plage.

"Tout va bien ?" je demande.

"Oui oui."

Je ne sais pas quoi lui répondre et lui ne rajoute rien d'autre. Alors, on se retrouve face à face, silencieux. Sa manière de me regarder m'intrigue. Parce que dedans, j'ai l'impression d'y voir du désir. Et l'idée que mon attirance pour lui soit réciproque me plaît. Son regard décroche du mien et il se met à contempler ses pieds.

"Bon, on retourne à la villa ?" finit-il par dire.

"Euh oui, allons-y."

Quelques part, j'aimerais dire non et lui proposer de rester sur la plage. Mais je n'ose pas.

En remontant les marches, aucun de nous ne parle. J'ai l'impression que ma peau picote lorsqu'il est si près de moi.

"C'était une drôle de journée," finit-il par dire lorsqu'on s'approche de la varangue.

J'acquiesce et nos chemins se séparent. Enfin, c'est plutôt lui qui s'en va en direction de sa chambre. Et moi, je me retrouve seule.

Un été à Rodrigues IslandOù les histoires vivent. Découvrez maintenant