Chapitre 5 partie 2 : Elik

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Je suis réveillé en sursaut par le chant des coqs. Il est l’heure pour moi de partir prendre la relève de mes compagnons aux cachots du Château, l’une des missions qu’assurent les rôdeurs. Et comme je tiens à honorer ce devoir, je dois me dépêcher.

Avna ouvre les yeux à l’instant où je me lève, elle bat des cils un instant en regardant les alentours sans les reconnaître, avant de me remarquer et de porter les mains à sa ceinture par réflexe. Sa tunique se relève légèrement et j'entraperçois un plastron en cuir près du corps avant qu'elle n’en ressorte ses dagues. Je laisse échapper un faible rire, si j’avais voulu lui faire du mal, j’aurais eu toute la nuit pour le faire. Mais je sens tout de même un pincement dans ma poitrine en m'apercevant qu’hier soir restait bien une exception, un agréable moment hors du temps, et que nous sommes redevenus des ennemis l’un pour l’autre.

Quelle heure est-il ? Pourquoi es-tu debout ? demande la princesse, alerte, en se redressant.
Du calme, du calme, il est simplement temps de partir. Tu peux aller réveiller ton chien de garde.

Avna met plusieurs secondes à comprendre à quoi, ou plutôt à qui, je fais référence avant de lever les yeux au ciel, dans un signe d'exaspération que je ne peux m'empêcher de trouver séduisant. Je détourne le regard à mon tour, plus ça va, plus mon esprit semble jouer contre moi.

L'Immoran finit par monter chercher sa garde du corps. Lorsque les deux femmes descendent, je demande à Avna :

Peux-tu réutiliser ton pouvoir d'illusion pour vous donner une apparence humaine ? Bien que le couvre-feu ne soit pas encore levé, il vaut mieux éviter que vous vous fassiez remarquer par des gardes en patrouille ou par les rôdeurs du donjon.

Elles s’observent un instant dans une conversation muette, puis finalement la princesse acquiesce, et se tourne vers Tryvna, me faisant dos. Je ne sais pas exactement ce qu’elle trame, mais elles ont pris l’apparence d’Arah en quelques secondes à peine. Comme je l’avais supposé, son pouvoir permet aussi de changer l’apparence d’une autre personne qu’elle.

Il faut qu'on se dépêche, s'il te plaît, je ne sais pas combien de temps l’illusion va pouvoir tenir, me presse alors Avna.

Je hausse un sourcil. Les sorts Immoran ont donc une limite dans le temps ? Je ne l’avais pas envisagé, cette information s’avère plus qu'intéressante. Je la mets dans un coin de ma tête. Sans plus de cérémonie, chacun prend ses affaires, et nous quittons mon havre de paix pour nous enfoncer dans les rues encore mal éclairées de la cité qui dort. Les bougies des lampadaires viennent à peine de s'éteindre et le ciel est encore noir, mais je connais les rues par cœur.

Au bout de dizaines de minutes de marche, nous arrivons devant l'annexe du Château, celle de la prison, et je sens mon cœur battre plus fort dans ma poitrine. La réalité de mes actions à venir, en mauvaise compagnie, me frappe alors de plein fouet. Une flopée de doutes m'assaille alors, un autre sentiment encore que je n'ai pas l'habitude de ressentir. Et si les Archanges m'observent en cet instant, que pensent-ils de moi ? Et si on se faisait repérer, qu'adviendrait-il de nous ? Et si c'était leur plan depuis le début d'infiltrer le Château ?

Je secoue la tête pour chasser ces idées parasites. Ce n'est pas le moment de douter. Je sais que je me fais encourir des risques inutiles, mais je dois impérativement me tenir au plan. Je déclare alors :

Nous sommes arrivés derrière la prison. Je vais discuter avec mon collègue avant de le relever. Je vous laisse attendre dans cette impasse, normalement personne ne s'aventure par ici à cette heure-ci. Je viendrai vous chercher lorsque je me serai assuré que vous ne vous ferez pas repérer . Est-ce que c'est compris ?

Les Héritiers de la Guerre T.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant