MARYBESS : le fruit d'un amour interdit

chapitre 19 : un homme au cœur tendre

Cela fait plus d'une heure que nous sommes là, Tyler et moi, assis sur la banquette rose bonbon de ce pub célèbre pour ses glaces au caramel, supplément pépites de chocolat et pâtes à cookies. Plus d'une heure que je l'entends déblatérer ses péripéties de facteur le sourire aux lèvres, plus d'une heure que nous avons englouti nos desserts et plus d'une heure que je me sens terriblement bien en sa compagnie.

Ses yeux pétillants, le timbre de sa voix, sa timidité, et son air heureux m'apaisent. Ça fait une éternité que je n'ai pas ressenti un tel bien être. Je suppose que c'est parce qu'il est terriblement gentil avec moi et qu'il doit dégager une bonne aura. Toutes les personnes que j'ai rencontré au tout début de ma vie d'amnésique n'ont fait que me refiler de l'angoisse, certains m'ont heurté, blessé, et d'autres ont envahi mon cœur de façon violente, irréversible, telle une tornade qui chamboulerait tout sur son passage.

J'ai été chamboulé.

Les yeux dans le vague, je commence à me perdre. Je peine à entendre ce que me raconte Tyler alors que mes pensées dérivent vers l'homme qui consume mon âme à petit feu. La voix de Xander s'est immiscé dans ma tête. Elle s'est incrusté dans mes pensées et j'ai comme l'impression qu'il n'est pas très content. Je le ressens en moi. Il aboie, il semble en colère après moi. Il est contrarié et tout ce que je parviens à ressentir est une honte sans nom. Je me déteste déjà de l'avoir déçu et pourtant, je ne suis même pas au courant de ce que j'ai pu faire pour provoquer sa colère. Si je le pouvais, je le supplierai de me punir pour apaiser son cœur.

Peu m'importe la raison, je sais juste que du plus profond de mon âme, j'ai déçu mon maître.

— Je suis désolée. murmuré-je en proie à une profonde tristesse.

C'est le contact froid des doigts de Tyler qui m'extirpent de cet état second, ou plutôt... Du monde dans lequel je m'étais égarée, quelque part entre mes souvenirs et mon subconscient à la merci de mon cher et tendre.

Je lève mes yeux sur Tyler et me confonds en excuse.

— Euh... Excuse moi. J'étais ailleurs. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé.

— Tu avais l'air absente. Tu es sûr que tout va bien ?

Son air consterné me prend au dépourvu. Serait-il sincère ? S'inquiète-t-il réellement pour moi ? Pourquoi ? Je n'ai pas envie qu'un autre me prenne en pitié et me voit comme une pauvre âme sensible.

Quelque peu vexée, je récupère ma main encore chaudement couverte par la sienne. Je jure intérieurement. Le contact de sa peau me faisait beaucoup de bien mais tant pis, il a franchit une limite. Peu m'importe comment je me sentais à ses côtés ; je ne peux décemment pas le laisser prendre soin de moi comme a pû le faire Faust ou Xander, parce que c'est ce qu'il est en train de faire.

C'est hors de question Tyler.

Reprenant de la contenance, je me redresse. Le dos droit contre le dossier de la banquette, je balaie l'air devant mon visage puis je lui fais cadeau d'un léger sourire censé le rassurer.

— Oui ! Bien sûr que ça va ! Pourquoi ça n'irait pas voyons ?

— Eh bien... Parce que t'es enceinte et je sais que ce n'est pas toujours facile de faire grandir un petit humain en soit.

Je pouffe, un tantinet agacée.

— Et qu'est-ce que t'en sait Einstein ! Tu n'as jamais été enceinte, si ?

— Non mais ma sœur si. Elle a fait une dépression post-partum et elle a fini par s'oter la vie !

Je tombe des nues. J'étais loin d'imaginer qu'il m'avouerait une chose aussi terrible, encore moins de façon si désinvolte. Son calme me glace le sang. Il est serein pour quelqu'un qui me parle du suicide de sa sœur. Pour un peu, j'aurais pris mes jambes à mon cou si son regard ne s'était pas voilé d'une tristesse immense et infinie. Je m'auto-sermonne d'avoir osé penser à m'enfuir juste après qu'il m'ait annoncé une partie de ce qui n'est autre, que son histoire. Un bien sombre passé.