De l'autre côté de la mer - Reiner Braun

Chapitre 12 - Le coucher de soleil

Il lui adressa une enveloppe un soir. "Accepterais-tu de fonder une famille ?". Reiner avait posé la correspondance sur la table du salon, calé entre le délicat service à thé. Il était l'instigateur de leurs projets de couple : leur emménagement, l'adoption d'animaux, les fiançailles. Eliabel et Reiner se marieraient bientôt. Une union discrète et simple, à leur image. Elle porterait son nom, mais voudrait-elle couver leur enfant durant de longs mois ?

Eliabel était impatiente de voir son ventre s'arrondir. De ressentir les premiers signes, de vivre cette aventure merveilleuse avec Reiner. La parentalité était un choix qu'ils attendaient avec impatience. Confirmer la présence de l'enfant en bonne santé, peindre la chambre, assembler les meubles... Et l'accueillir, enfin.

Découvrir son visage, entendre sa voix, serrer sa main... Eliabel et Reiner se projetaient dans ce rôle, malgré le fait de certains maux tabous. Les douleurs, le poids, l'accouchement. Ils n'étaient pas effrayés par cette mise au monde, bien qu'ils étaient conscients des risques. Le manque de sommeil et l'intimité du couple étaient des épreuves dont ils se tenaient prêts à surmonter.

En réponse à la demande de son époux prochain, Eliabel plaça silencieusement sa pilule contraceptive sur la console de l'entrée. À la vue de Reiner, pour lui exposer son accord tacite. Elle finirait sa plaquette, traverserait sa semaine de menstruations et se lancerait dans l'inconnu, en tenant comme toujours la main de son mari.

Les premiers jours, Eliabel et Reiner tentèrent de ne pas (trop) penser à la fécondation. Faire l'amour combien de fois ? Quelle position la plus favorable pour une fille ou un garçon ? Quel équilibrage alimentaire ? Ils scrutaient des signes, aussi. Des nausées, des inconforts à la poitrine, un ventre dur et gonflé.

Jusqu'à un matin. Un instinct d'Eliabel, une intuition de Reiner. Il souhaitait qu'elle se rende chez le médecin pour confirmer, mais elle préféra acheter plusieurs tests pour vivre ce moment à la maison.

La fin de semaine fut interminable pour Reiner. Il était en congé et tournait en rond, bien qu'il s'occupait parfaitement du foyer. Le ménage, les courses, le rangement, la lessive, la vaisselle. Eliabel posa sa sacoche dans l'entrée un vendredi soir, et tomba dans les bras de cet homme qu'elle aimait jusqu'aux étoiles.

Les derniers mois avaient été plus agréables et légers au travail. Car Eliabel avait embauché des responsables pour la seconder, parce qu'elle avait constitué une équipe solidaire et car elle avait délégué les charges. Elle rentrait ainsi plus détendue et déconnectait tout de suite.

Eliabel se déchaussa, se lava les mains et se dirigea vers la salle de bain. Son comportement habituel rendait fou Reiner, qui n'en pouvait plus de ne pas connaître le dénouement de cette histoire.

- Je vais faire le test, mais je vais me doucher en attendant le résultat. À tout à l'heure., déclara-t-elle avec malice en fermant à clé la porte. En effet, elle savait que Reiner essayerait de se faufiler pour analyser la présence (ou non) de chaque bâton.

Eliabel se lava les cheveux, et Reiner pesta intérieurement contre sa future épouse. Elle retardait l'échéance et cette attente insupportable avait le don de l'agacer. Lorsqu'il entendit le loquet se déverrouiller, il se précipita malgré lui dans la pièce.

Elle était nue. Elle était belle. Elle était désirable.

Eliabel était enceinte, et Reiner le savait. D'un mois, et lui seul (sans prétention) connaissait le secret qu'elle portait en son ventre, en son sein, en son corps. Elle avait changé, parce que son bassin et ses hanches se tenaient en recul.

Toujours dans cet échange silencieux qui les définissait, Eliabel et Reiner détournèrent leur regard pour se focaliser sur le Graal. Il décida de saisir l'objet et...

Enceinte. 2-3 semaines.

La main de Reiner trembla. Avec Eliabel, ils deviendraient parents. 9 mois pour se préparer à un chamboulement de toute une vie. Il dévisagea sa femme. Les bras croisés, son silence assourdissant semblait exprimer à Reiner : "Tu vois, je te l'avais dit."

Reiner l'embrassa. Follement, langoureusement, amoureusement. Il serait au petit soin pour elle.

Il voulait crier au monde entier cette nouvelle. Il proposa alors à Eliabel d'organiser un dîner avec la famille : Emma et Marius, Hanna et Livaï, Jean, Mikasa et Eren, Annie, Armin et leur petite-fille Romy, et Connie. La marraine et le parrain seraient Gaby et Falco.

Au troisième mois, Eliabel et Reiner apprirent l'identité de leur enfant à naître, qu'ils prénommèrent Lily. Comme le lys : calme, douceur, lumière, paix, pureté... Un message d'espoir.