Chapitre V

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SAEMI

« Seul son regard contredit notre statut d'amis. J'y vois tellement d'affection et d'amour, plus que ce que doit ressentir un frère ou un ami. À cette pensée, mon cœur fond comme glacé au soleil. »

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C'est en courant que j'ai fui la salle de cours de philosophie. À la fin de la journée ce fut le cœur au bord des lèvres j'ai rangé mes cahiers et attrapé mon sac pour enfin courir enfourcher mon vélo. J'ai pédalé à toute vitesse.

Je venais de comprendre.

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JUN

« C'est quoi ce bruit sourd? Oh. Je crois que c'est mon cœur qui se brise. »

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Quand je suis arrivé à la maison après les cours, je trouvai Saemi en piteux état. Elle dormait à même son couvre-lit, ses cahiers et ses crayons éparpillés un peu partout autour d'elle.

Elle avait le visage sillonné de larmes. Juste à voir son état débraillé, je sentis mon visage s'affaisser. Je mis en ordre sa paperasse pour ensuite soulever Saemi. À mon contact elle sursauta sans se réveiller. J'ai ouvert son lit et l'y ai déposé délicatement. Je l'ai recouverte de son épaisse couverture lilas, et aussitôt son visage est devenu serein.

Je suis sorti discrètement et je me suis étendu sur le divan en L. Et je m'endormis.

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SAEMI

« Je lève la tête et je vois la plus inconcevable des choses: Jun m'étendant avec délicatesse dans mon lit, maladroit et inquiet. Je réalise à quel point nous sommes dans le pétrin. »

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Il est à peine 5h du matin et je pense qu'à une seule personne: Jun Maeda. Mon tuteur et meilleur ami. Enfin,  jusqu'à présent.

Pourquoi? Parce que j'ai finalement compris. Compris ce sentiment qui me coupe le souffle à chaque fois que je me retrouve en sa présence. Comme une envolée de papillon se percutant contre les parois de mon estomac. Un sentiment qui me réchauffe de l'intérieur. Et maintenant que je sais ce que cela représente, j'ai peur.

Je suis amoureuse. Mais pas de n'importe qui. De mon professeur de philosophie. Enfin, c'est ainsi que les gens le verraient s'il venait à se savoir que j'avais de tels sentiments qui son égard. Mais personne ne doit le savoir. Jamais. Et surtout pas Jun...

Lorsqu'il a crié en classe, après que Davis m'ait traité de ce terme idiot et discriminatoire, j'ai senti toute sa colère et sa rage. Comme s'il avait été directement touché par ses propos. Il est vrai qu'il a du sang japonais et des origines coréennes, mais Davis n'avait cherché qu'à me mettre sous son contrôle de terreur. Quand cette sale rouquine à osé rembarrer Jun, j'ai été prise d'un élan de colère et le bruit de mon livre se fracassant sur mon pupitre à vite éveiller l'instinct de prédateur du bipolaire tant redouté.

Désormais, il m'avait en grippe. Il ne me lâcherait pas de sitôt. Mais je sais que Jun ne le laissera pas me faire du tort. J'espère en tout cas. . .

Incapable de rester couché, je me suis lever, la tête lourde. Je pris une longue douché chaude, j'ai attrapé le premier pantalon slim qui me tomba sous la main, de couleur beige pâle, ajusté. Je pris ensuite un chemisier blanc, dont les boutons noirs finement cousus brillaient à la lueur du soleil levant. J'ai finalement séché mes cheveux en toque serrées, sans oublier de lisser ma frange au fer.

Il n'était que 6h lorsque j'entrai dans le salon, où dormait paisiblement Jun.

Je fus surprise de le voir si vulnérable. Je me rendis compte que je ne le voyais que très rarement endormi.

Un amour interditOù les histoires vivent. Découvrez maintenant