Words - Maurane Victor

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Les mots... à quoi ça servait, en fait ? Ce n'était qu'un charabia inutile et trop compliqué. Ça n'avait pas de sens. Pourtant, les autres ne pensaient qu'à ça. Maurane ne comprenait pas. Ça faisait cinq ans qu'elle était ici et elle ne comprenait pas. Elle avait passé des mois à tenter de les connaître. Mais ça ne suffisait pas. Il y avait trop de choses à apprendre, trop de choses qui changeaient. Elle avait essayé de faire comme eux et ils n'étaient pas satisfaits. Jamais assez bien. Jamais assez juste. Jamais comme ils voulaient vraiment qu'elle fasse. Ils n'avaient qu'à le dire, comment il fallait faire. Mais ils ne le disaient jamais même quand elle le faisait mal.

Elle savait beaucoup de choses. Plus que certains d'entre eux. C'était grâce à ça qu'elle était vivante. Mais ils s'en fichaient. Ça ne comptait plus depuis qu'elle était ici. Elle aurait pu leur dire "merde", pour les choquer. Ça les choquait d'entendre ce mot là. Elle aurait pu si elle savait parler. Elle aurait dit qu'elle avait essayé de comprendre. Que ça faisait depuis qu'elle était dans cette cité qu'elle essayait. Elle aurait pu dire qu'ils avaient qu'à faire l'inverse. Que c'était aux gens civilisés d'essayer de faire comme elle.

Ils n'auraient jamais voulu. Elle le savait. C'était toujours à elle de faire des efforts. Ça faisait cinq ans qu'elle en faisait et ce n'était pas assez. On la regardait encore comme... elle ne savait pas quoi. Comme une bête sauvage, parce que pour eux c'était mal d'être une bête sauvage. Des fois, elle aurait préféré que ça reste comme ça. Elle ne faisait de mal à personne. Alors qu'eux, ils faisaient mal avec leurs mots. Et avec ce qu'ils cachaient derrière. C'était idiot, elle le savait. Ça n'existait même pas, les mots. Ça ne pouvait pas l'empoisonner comme les crochets d'un serpent. Ça ne pouvait pas lui ouvrir la chair comme les griffes d'un félin. Ça n'existait pas et ils arrivaient à faire mal avec.

Ça n'existait même pas pour elle avant de rencontrer ces gens. Maintenant, il n'y avait que ça dans sa vie. Et elle ne comprenait toujours pas.

Elle n'avait même plus envie de comprendre.

Les mots d'autres visagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant