Chapitre 14 - Noah

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C'est Romy qui se charge d'ouvrir la porte pendant que je fais les cent pas dans le salon. C'est horrible l'état de stress dans lequel je me trouve. Avec Romy on a décidé qu'on parlerait de notre projet ce soir. On ne peut plus repousser l'échéance. On a besoin de savoir où on en est avant d'envisager la suite. Il y a trop de choses à prendre en compte avant de finaliser la chose.

Louison a à peine le temps de mettre un pied dans le hall, que Romy l'attrape par les épaules pour lui faire la bise :

—   Ça va, t'as pas trop galéré à trouver ?

—   Non, ça va. J'ai mis le GPS.

Elle est raide comme un piquet et je la vois jeter un regard circulaire au salon. Son regard se pose enfin sur moi, je m'arrête net. À la place de faire des allers-retours à travers la pièce, je me mets à jouer avec le bracelet de ma montre et mon piercing à la lèvre. Puis je lui souris. Quand elle me le rend, mon cœur loupe un battement (juste un).

Je me rappelle quand tout était plus simple entre nous. On débarquait les uns chez les autres comme si on habitait-là, on se mettait à rigoler avant même de se dire bonjour. Il y a une simplicité dans nos gestes qui me manque. Renoncer aux choses a toujours été compliqué pour moi, plus que pour Romy. Je me suis attaché trop vite, trop fort, et maintenant, j'ai l'impression qu'on m'a à nouveau abandonné.

—   Tu veux quelque chose à boire ? je finis enfin par prononcer, histoire de ne pas rester là comme un idiot avec un sourire sur les lèvres.

Ce soir, il n'y a pas de paquet de chips éventré à même la table ni de gobelets en plastique premier prix. Non, les chips sont dans un bol. Il y a des crudités et de la sauce pour les tremper, des olives et du saucisson déjà découpé. Par contre, pour nos verres, rien à faire : ils sont dépareillés. Il faudra que Louison se contente de nos vieux pots de Nutella et de moutarde recyclés.

Je la vois hésiter. L'anniversaire de Louis me revient en mémoire : il ne lui en a pas fallu beaucoup pour être éméchée, pourtant avant, elle faisait des concours avec Romy et elles nous mettaient à terre.

—   Si t'as de la limonade, j'en veux bien un, s'il te plait.

—   Tu me prends pour qui ? Il y a toujours de la limonade chez nous.

Et il y a une raison à ça : c'était le carburant préféré de Louis et Louison. Avec Romy, on a fini par devenir accro (alors que j'étais moi-même un fervent défenseur de l'Orangina).

—   On a acheté des pizzas, enchaîne Romy. Loulou, tes préférés, c'est toujours celles au pepperoni, hein ?

—   Euh, oui.

—   Nickel. Noah, tu peux t'occuper de faire chauffer le four, s'teup ?

J'observe Louison dans le reflet du miroir qui donne dans le salon. Elle n'arrête pas de gigoter sur sa chaise. Elle a baissé légèrement la fermeture Éclair de son sweat. Autour de son cou, contre sa peau mate, je remarque la cloche porte bonheur de Louis. Je ravale la boule qui commence à se former dans ma gorge, avant de me forcer à détacher les yeux de sa peau.

Je laisse leur conversation me glisser dessus jusqu'à se transformer en un bourdonnement rythmé. Je suis présent et ailleurs à la fois – perdu entre mes pensées et mes souvenirs, jusqu'à ce que la voix alarmée de Louison me tire de mes pensées :

—   Noah ! La pizza !

—   Oh merde !

J'ouvre le four et de la fumée s'en échappe. Je tousse et tente de la chasser en agitant ma main devant mon visage.

Noah sous les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant