Chapitre 11

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C'est Ambre qui a pris rendez-vous chez le médecin à ma place afin d'envisager une interruption de grossesse, parce que je ne m'en sentais pas capable. Nous avons eu rendez-vous assez vite. Il a également appelé Giulia pour lui affirmer que je ne viendrais pas travailler durant les prochains jours. Non pas forcément à cause de l'avortement en lui même, même s'il a précisé qu'on ne pouvait pas savoir comment mon corps pourrait réagir, mais à cause de mon état mental. Je lui ai aussi parlé, afin de lui demander pardon pour mon comportement. Elle a été très compréhensible et j'ai encore une fois fini en pleurs avant de redonner le portable à Ambre.

À l'hôpital, on m'a expliqué des tas de choses. Notamment que le but était de prendre un médicament tout de suite, puis un autre dans deux jours. Les médicaments déclencheraient une fausse couche, et donc des saignements. Le médecin m'a expliqué aussi que je pouvais avoir des vomissements et avoir mal, et m'a donc prescrit de quoi calmer la douleur. Puis, il a sérieusement regardé Ambre dans les yeux, avec un air très autoritaire et lui a dit qu'il devait rester à mes côtés durant cette période. Ambre a hoché la tête et a dit qu'il ne comptait pas faire autre chose.

En rentrant à la maison, je n'ai pas arrêté de pleurer et Ambre n'a pas arrêté d'être à mes côtés, et ce durant toute la période. Deux jours plus tard, lors de la prise du deuxième médicament, je n'ai pas arrêté de pleurer non plus. Ambre me prenait dans ses bras, me murmurait des mots doux, me faisait boire de l'eau et manger, me berçait... et m'a tenu les cheveux lorsque je me suis mise à vomir dans les toilettes.

Aujourd'hui, je suis au cinquième jours après la première prise du médicament, et l'affaire est déjà passée. Je me sens mieux, aussi bien physiquement que mentalement, et j'étais prête à retourner travailler, mais mon dominant me l'a interdit. Lui aussi, refuse de travailler, préférant rester avec moi, rien qu'avec moi selon ses dires. Même si je lui ai dit qu'il ne devait pas s'arrêter de travailler pour moi. Il m'a fait taire en posant son index sur mes lèvres.

— Est-ce que je peux faire quelque chose pour toi, mon chat ?
— Je vais très bien.
— Oui, mais est-ce que je peux faire quelque chose pour toi quand même ?
— Détruire la société capitaliste ?
Il secoue la tête et se met à rire doucement.
— Tu vois bien que je n'ai besoin de rien, mais je t'en remercie.
— Un câlin ?
— Bon, oui, je veux bien d'un câlin.
Alors que nous sommes tous les deux allongés sur le lit, il vient me prendre contre lui.
— Comment tu te sens ?
— Je te l'ai déjà dit, je vais très bien.
— Tu me le dirais si ce n'était pas le cas ?
— Tu le verrais très bien...
— C'est pas si faux, en effet.
Le sentir contre moi, sentir sa chaleur, son souffle, sa peau, me donne de folles envies. Mais il a été très clair là-dessus; il refuse amplement de me toucher pendant encore cinq jours. Les rapports sexuels sont à éviter une semaine après l'avortement, et Ambre préfère même rajouter deux jours en plus. Durant ce temps, il refuse de me stimuler, peu importe la façon. Il refuse d'ailleurs aussi les séances d'impacts, et toute autre punition si je suis insolente. Je comprends sa décision, mais le sentir me manque. Je sais pourtant que ce n'est que pour mon bien.
Au fond, ça tombe bien. Dans cinq jours, il y a notre week-end en amoureux. Il y a de fortes chances que l'on rattrape tout ça.
— Je t'aime Mila, si fort.
— Je t'aime si fort aussi.
Je lève la tête, et nos deux nez se touchent. Doucement, ses lèvres viennent à la rencontre des miennes, mes yeux se ferment et nous nous embrassons. Ses dents emprisonnent ma lèvre et je lâche un petit gémissement.
— Bordel... Mila...
— C'est vous qui avez commencé.
— Je te demande pardon.
— J'aime ça. Recommencez quand vous voulez.
— Tu sais bien que j'aimerais éviter que ça dérape.
— Oui mais... Si ça dérape... On n'est pas obligés de...
— C'est non. Je veux que tu te reposes. Je ne veux pas t'exciter, je ne veux pas te dominer. Tu n'as pas besoin de ça maintenant.
— Si, j'en ai besoin...
— Non Mila, tu peux t'en passer quelques jours.
J'expire lentement et me décale de son corps. Mais il vient me reprendre contre lui.
— Reste ici.
— Je croyais que vous ne vouliez pas me dominer ?
— C'est une punition que tu cherches ?
— Bah il faudrait savoir. C'est pas ma faute si vous êtes contradictoire.
Un rire que je sais nerveux lui prend. Il ferme les yeux et se tait.
— Je sais que j'ai raison, dis-je.
— Oui, tu as raison.
— Mais vous avez aussi raison quand vous me demandez si c'est une punition que je cherche. Enfin, rectification : c'est un funnishment que je cherche. Je ne vous demande pas de me baiser, ou de me faire l'amour, ou même de me frustrer... Je... J'ai juste envie d'avoir mal.
— Mila...
— Vous savez que la douleur me détend.
— Je sais aussi que tu risque de pleurer.
— Je pleure pendant les punitions. Pas si ce n'en est pas.
— Ça, ça dépend.
— Oui, mais ça reste rare. Faites vous confiance, je vous en prie. Vous ne me ferez pas de mal. Enfin... pas de ce mal là.
— Que vais-je faire de toi...
— Ce que vous voulez.
— J'ai envie de faire des tas de choses que je ne peux pas te faire tout de suite.
— Comme quoi ?
— Tu verras ce week-end. Un peu de patience.
Je fais la moue. Et un éclair de génie me vient. Je sais que l'on pourrait l'appeler un éclair de connerie, mais je tente tout de même. Je soupire et lève les yeux au ciel. Mais alors que je m'attendais à ce qu'il fronce les sourcils et qu'il me regard avec un regard noir, il préfère éclater de rire et secouer la tête.
— C'est bien tenté.
— Et si... Je fais ça...
Je ne suis pas vraiment confiante, mais je le fais tout de même. Je lève mon majeur face à son visage. Sa mâchoire se contracte. Il ferme un instant les yeux, et j'en profite pour fuir et mettre mon oreiller sur mon visage. Pour le coup, j'assume moyen.
— Vraiment, Mila ?
— Je vous demande pardon !
— Non. On ne demande pas pardon avec un oreiller sur la tête.
— Mais votre regard fait peur.
— Retire cet oreiller. Immédiatement.
Doucement, je retire l'oreiller de mon visage.
— Ce n'est pas un funnishment que tu mérites. Et tu le sais très bien.
— Je suis désolée !
— Tu dois accepter la frustration Mila. Ce n'est pas en te comportant ainsi que tu vas obtenir ce que tu veux. Tu viens de subir un événement traumatisant. Tu peux faire ce que tu veux pour être dans le déni, mais moi je ne le suis pas. J'ai vu l'état dans lequel tu étais. Tu peux faire comme si ça ne te faisait rien, nous savons tous les deux que c'est faux. Je refuse de te faire mal tout de suite. Tu dois l'accepter.
— Mais je...
— Il n'y a pas de mais qui tienne.
— Orange. J'ai besoin de parler.
— Je t'écoute.
Mes larmes coulent en pensant à ce que je veux lui dire. Il est toujours difficile de dire le fond de ses pensées, surtout lorsqu'elles ont un fond accusateur. Je me pince les lèvres, regarde le plafond et finis par le regarder à nouveau. Son regard s'est adouci.
— J'ai... J'ai l'impression que vous ne voulez plus jamais me toucher. J'ai l'impression que cette histoire va causer la perte de notre relation. J'ai l'impression que plus jamais vous ne voudriez me toucher par peur que ça recommence.
Ses yeux se ferment quelques secondes. Lorsqu'il les réouvre, c'est pour me reprendre dans ses bras.
— Mila. Je ne mentirais si je te disais que je ne craignais pas que tu tombes à nouveau enceinte. Mais, cette histoire ne me repousse pas. J'ai toujours envie de toi. J'ai toujours envie de te toucher, d'entendre tes gémissements, tes plaintes, tes cris... T'entendre jouir, te sentir... Et je t'assure que dès que cette petite pause sera terminée, je t'apporterais tout ce que tu mérites. Et crois que tu mérites amplement de prendre très cher. Mais même si je te touche pas sexuellement, je sais que si je te fais mal, ça risque de te heurter. Et si jamais ce n'est pas le cas, je sais que ça te frustrera. Et te frustrer pendant cinq jours risque d'être difficile.
Je hoche doucement la tête et fourre mon visage dans son cou.
— Je suis désolée.
— Tu n'as pas à l'être. C'est normal d'avoir des craintes. Je t'aime Mila, et mon désir pour toi n'a pas changé.
Je souris dans son cou, et le lui embrasse doucement. Je le sens frissonner. Sa main se pose dans mes cheveux, puis ses doigts viennent les attraper, afin de les tirer en arrière. Je gémis doucement.
— Ne fais pas ça...
— Pourquoi ?
— Ça m'excite, Mila.
— Oups.
— D'ailleurs, je pense que tu as bien besoin d'une punition après ton geste irrespectueux de tout à l'heure.
— Non...!
— Au coin.
— Non, non, non !
— Au coin, dépêche toi.
— Mais Monsieur je- non !
— Je sais que ce n'était pas ce que tu voulais. Mais tu dois accepter la punition.
Je fais la moue, chouine un peu mais j'y vais quand même. Je ferme les yeux lorsque je suis face aux murs.
J'entends Ambre ouvrir un des tiroirs de la tour, puis le refermer. Doucement, il me prend les poignets et le métal froid des bracelets des menottes vient me les emprisonner. Je frisonne un long moment, lorsqu'il se met à effleurer tout le long de ma colonne vertébrale de son index.
— C'est ça dont tu as besoin. Tu as besoin que je te rappelle que tu es encore ma soumise.
— Je ne vois pas de quoi vous...
— Silence.
Je n'ai plus du tout envie de parler.
Ses doigts attrapent mes cheveux et y forment une tresse.
Il a raison, c'est exactement ce dont j'avais besoin. Et il n'a même pas besoin de me stimuler sexuellement ou de me faire mal pour cela.
Au même moment, mon portable sonne.
— C'est Giulia.
— On peut répondre ?
— Oui, on peut répondre.
Je ne bouge pas du coin, et mon dominant répond au téléphone, mettant la conversation en haut parleur.
— Allô Ratatouille.
— Parce que tu réponds au portable de Mila maintenant ?
— Elle est punie, mais elle t'entend.
— Oh. Je voulais prendre de ses nouvelles, comment elle va ?
— Mila ? Je te laisse répondre.
— Ça va bien mieux, merci.
— Je suis contente d'entendre ça. Prends tout ton temps pour te reposer, d'accord ?
— Oui...
— Et te reposer n'inclût pas de provoquer Ambre !
Un petit rire me prend, mais mon dominant me calme en tirant sur ma tresse, je lâche un petit gémissement.
— Elle profite que je ne veuille pas lui faire mal pour me provoquer.
— Mais tu l'as tout de même punie.
— Le coin est son endroit préféré.
— Tu pourrais lui faire compter des grains de riz aussi, ça marche bien.
Je m'apprête à répliquer, mais Ambre attrape de nouveau ma tresse entre ses doigts.
— C'est vrai que j'ai du riz dans un de mes tiroirs qui ne me sert à rien.
— Tu vois. Même pas besoin de lui faire mal.
Giulia, je te hais.
— Je note.
— Monsieur !
— Silence !
J'expire lentement. En réfléchissant au fait qu'il puisse me faire compter des grains de riz, j'en viens à penser qu'il n'est pas si mal, ce coin. Je suis prête à y rester collée si besoin.
— Maintenant que je sais qu'elle va bien, je suis moins inquiète, et Lou le sera moins également.
Émue en entendant qu'elles s'inquiétaient, je souris, mais personne ne peut le voir. Je leur enverrais un message dès que je le pourrais.
— Tu sais que vous pouvez passer quand vous voulez.
Mon cœur s'accélère à l'idée de revoir Lou.
— Demain, t'es partant ?
— Je suis partant.
J'ai envie de dire qu'il vaudrait mieux que mon dominant travaille demain, vu tous les jours qu'il a manqué ces temps-ci, mais je m'abstiens. Il a demandé le silence.
— Ça vous dit une petite sortie, tous les quatre ? En soirée, après le travail de Lou.
— Est-ce que tu te sens de sortir Mila ?
— J'étais prête à aller travailler, donc oui, je suis d'accord pour une sortie.
— Alors c'est d'accord.
— Un ciné ? Demande Giulia.
— Va pour un ciné.
— Et Mila, qu'est-ce qu'elle en pense ?
— Mila ? me demande Ambre.
— Un ciné c'est parfait.
Ils continuent un peu de parler après ça, mais je n'écoute plus vraiment; la conversation ne me concerne pas.
Je reste dans le coin, et sourit bêtement en pensant au fait de voir Giulia et Lou demain.

Le Fouet de ses DésirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant