Chapitre 10

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Tout tourne autour de moi. Du coton vient s'installer dans mes deux oreilles. Je ne bouge pas. Je ne parle pas. Je l'entends vaguement me parler, mais je ne comprends pas ce qu'il me dit. Sa voix est lointaine, très lointaine. Je ne suis plus connectée à cette réalité, et c'est violent.
Tu es enceinte Mila.
Tu es enceinte Mila.
Es enceinte Mila.
Enceinte Mila.
Enceinte Mila.
Mila.
Sa voix est un écho dans mon esprit. Je n'entends que ça. Lorsque que le dernier mot qui est mon prénom s'estompe, la phrase au complète revient.
Tu es enceinte Mila.
Après mon silence, vient la tempête. Les gouttes d'eau tombent sur mon visage, mais ce n'est pas de la pluie. Tout ça vient de mes yeux. Le tonnerre gronde, ce sont mes sanglots.
Je suis trop jeune pour avoir un bébé. Je suis trop jeune pour savoir m'en occuper. Je ne me sens pas prête. Je ne veux pas d'enfant maintenant. Je veux profiter de ma jeunesse. Être enceinte me terrifie. Accoucher me terrifie. Avoir un bébé me terrifie. J'ai peur de tout. De tout, vraiment de tout. Je ne suis pas prête. Je ne suis pas prête. Je ne suis pas prête !
Ma tête tourne. L'orage ne cesse pas. Je n'arrive plus à respirer. Je veux me réveiller. Je veux me réveiller. Je veux par pitié, qu'on me dise que ce n'était qu'un rêve.
Je ne peux pas avoir d'enfant.
Mon corps se redresse je ne sais comment, je suis assise sur le lit. À travers mes larmes, je perçois le regard bleu d'Ambre. Je sens ses mains se poser de chaque côté de mon visage. Il semble encore me parler, mais je ne comprends pas ce qu'il me dit.
Il faut que je me reprenne. Je ne peux pas passer mon temps à pleurer.
J'essaie de me concentrer sur les traits de son visage. Sur ses yeux, qui me paraissent si hypnotisants.
— C'est ça Mila, c'est super ce que tu fais, continues. Respire comme je le fais.
J'arrive à l'entendre. J'arrive à imiter sa respiration.
— Je suis très fier de toi.
Il me lâche, je me remets à sangloter.
— Non, doucement, je reviens.
Il va voir dans sa tour, et en sort un paquet de mouchoir, il en sort un qu'il me tend. Je me mouche, ce qui facilite ma respiration.
— Est-ce que ça va mieux ?
Je hoche doucement la tête.
— Est-ce qu'on peut en parler ?
— Oui...
Ses bras m'enlèvent à nouveau contre lui.
— Bien... Il s'agit de ton corps. De tes choix. Je ne te forcerais en rien. Si tu veux le garder, je serais là, et j'aurais un peu moins de neuf mois pour apprendre à être un papa parfait. Si tu veux avorter, je serais là aussi. Je t'accompagnerais dans chacun de tes choix. Tu n'as pas à t'inquiéter pour ça. Je suis là, je ne compte pas partir.
— Je... Veux pas... Le garder.
— Bien. Je vais juste te demander une chose. Il faut que tu réfléchisses quelques jours.
— Je veux pas le garder je vous dis !
— Mila... Je te demande seulement d'y réfléchir.
— C'est déjà réfléchi.
— Bien.
— Et vous, vous voulez quoi ?
— Je veux seulement que tu fasses le bon choix pour toi.
— Oui mais...
— Ce n'est pas à moi de choisir Mila. Il est dans ton corps, pas dans le mien. C'est à toi que revient le choix.
— Je veux quand même votre avis.
— Je ne veux pas t'influencer.
— Vous ne m'influencerez pas.
— Eh bien... Je pense qu'il est un peu tôt pour avoir un bébé, que c'est une chose que je peux envisager dans quelques années. Mais pour le moment, j'avoue que ça me fait flipper, déjà pour toi, puis... Pour tout. J'ai peur que la grossesse se passe mal, je me fais des tas de scénarios, j'ai peur de te perdre, j'ai peur qu'on le perdre bien après sa naissance, j'ai peur que ma situation ne soit pas assez stable pour lui... Je crois que j'ai peur de tout ça. Je sais que je l'aimerais cœur et âme, et je ferais tout pour qu'il soit heureux. Mais j'ai peur aussi d'être un peu trop protecteur envers lui. Et sinon, pour être un peu plus égoïste, j'ai peur de ne plus t'avoir pour moi. C'est peut être même un peu toxique dit comme ça. Mais je suis totalement accro à toi Mila. J'ai peur de ne plus pouvoir oser te toucher s'il y a un enfant tout près. Comment expliquer à son enfant que sa mère reçoit des fessées si elle désobéit ? Dit-il avec une pointe d'humour dans la voix.
Je ne peux pas m'empêcher de rire un peu en imaginant la situation.
Mais je réfléchis à tout ce qu'il a pu dire avant de faire part de cet humour, et tout cela me touche. Je hoche la tête.
— Moi aussi, j'ai peur de tout ça. Et j'avoue que... devoir me comporter différemment avec vous parce qu'il y a un enfant ne me tente pas... Je veux pouvoir avoir un comportement de brat et me faire corriger sans souci.
— On est vraiment des dépravés.
Je souffle du nez.
— Mais sincèrement... Même si nous n'étions pas dans ce genre de relation, je n'envisagerais pas de le garder. C'est beaucoup trop tôt. Je ne me sens pas prête du tout. Si vous saviez comme ça m'angoisse...
— Je le sens. Tu es un livre ouvert pour moi.
— Oh comme c'est rassurant !
— Ne t'inquiète pas pour ça...
Ses lèvres atterrissent sur mon cou, je frisonne.
— Il y a pas de risque si vous me...
— Si je te...?
— Faites ce que vous voulez...
— Il n'y a pas de risque non.
— Je crois que j'ai besoin de me changer les idées...
— Comment ?
— Comme vous voulez, je suis toute à vous.
— Tes yeux sont encore emplis de larmes mon chat.
— Raison de plus pour me changer les idées, non ?
— Tu étais en pleine crise de panique il y a peine dix minutes.
— Et maintenant j'ai envie de vous...
— Je sais ce que tu fais Mila...
— Qu'est-ce que je fais ?
— Tu essaies de te débarrasser de tes émotions négatives par le sexe.
Je pense qu'il a raison, mais j'ai du mal à l'admettre. Je me débats pour me retirer de ses bras, vexée.
— Non, non... Reste-ici.
— Non c'est bon.
— Soumise.
Je m'immobilise.
— J'ai une petite idée, pour te détendre.
— Quoi...?
— Tu vas voir.

Je me retrouve nue et allongée sur le ventre. Mes poignets sont attachés entre eux, au dessus de ma tête. Toujours avec une grande douceur, il noue le bandeau noir pour me cacher la vue.
— Je reviens tout de suite. Ça va aller ?
— Oui Monsieur.
— Bien. N'hésites pas à m'appeler si jamais ça ne va pas. Je n'en ai pas pour longtemps.
— C'est compris.
Je l'entends filer dans son bureau et y chercher quelque chose, puis le bruit est moins présent. Je ne sais pas ce qu'il fait.
Lorsqu'il revient, il s'installe à califourchon sur mes hanches.
— Comment tu te sens ?
— Ça va...
Je sens ses lèvres se poser sur le haut de mon dos et y former un petit baiser, mais lorsqu'il se redresse quelque chose d'un peu froid et humide s'installe sur mon dos. Je ne sais pas ce que c'est. L'objet se déplace le long de ma colonne vertébrale, et y laisse de la matière au fur et à mesure de son parcours. C'est doux, agréable et même apaisant.
— Qu'est-ce que c'est...?
— Tu es ma toile.
— De la peinture...?
— Exactement.
— J'aime bien.
— Tant mieux.
Le pinceau me chatouille parfois, me faisant gigoter, mais mon dominant me calme à chaque fois en effleurant ma nuque.
— Tu me permettra de te prendre en photo après ?
— Oui Monsieur. Je veux voir ce que ça donne.
— Je te préviens d'avance, c'est très abstrait.
— C'est pas grave.
Il ne répond pas, je ne parle pas davantage et le laisse faire. Plus le pinceau passe sur ma peau, plus je me sens détendue. Mais, une certaine excitation s'installe entre mes cuisses lorsque qu'il passe sur les zones sensibles de mon dos. Je soupçonne même mon dominant d'appuyer un peu plus dessus.
Quelques gémissements m'échappent.
De temps en temps, la douceur du pinceau se fait alterner par une fessée ou deux, ce qui dégage d'autant plus de l'endorphine.
Je suis sur le point de m'endormir lorsque tout s'arrête.
— Ne bouge pas. Je vais te prendre en photo.
J'ai envie de lui dire que je ne comptais pas bouger, mais me retiens. Un instant plus tard, j'entends les clics de l'appareil photo. Il aurait pu se contenter d'une seule, mais c'est des dizaines de photo que j'entends se prendre.
— Est-ce que tu te sens d'avoir mal ?
— C'est à dire...?
— J'ai envie de faire une photo avec la trace de ma main sur une de tes fesses.
— Je suis toute à vous. Faites de moi ce que vous voulez...
— Ne serais-tu pas en train de tomber en subspace chaton ?
— Peut-être...
— Tu es prête ?
— Mhhh, oui...
La fessée me fait hoqueter. La vive douleur me donne envie de la soulager en y mettant la main, mais lorsque j'essaie, je me souviens que je suis attachée. Je lâche un gémissement de frustration.
— Ne bouge pas, soumise !
Son ton me calme, mais ne calme pas les picotements de ma fesse.
— J'ai mal...!
— Je sais.
— S'il vous plaît !
— Non.
— Vous savez même pas de quoi je parle...
— Tu veux que je soulage la douleur.
— S'il vous plaît !
Seuls les clics de l'appareil photo me répondent.
— Qu'est-ce que tu ressens ?
— J'ai mal.
— Tu ne ressens que la douleur ?
— Non...
— Quoi d'autre ?
— Le plaisir, l'excitation, la vulnérabilité...
— Est-ce que la douleur t'as apporté une de ces choses ?
— Les trois...
— Est-ce que tu aimes ça, les trois ?
— Oui...
— Alors tu dois accepter la douleur. Elle est partenaire de tes autres ressentis.
— C'est grâce à elle que je ressens ces choses...
— Tu vois.
— Les picotements s'estompent et laissent place à une chaleur agréable...
— Alors tais-toi et apprécie.
Je hoche la tête pour lui répondre. D'autres fessées, moins fortes que la première viennent s'abattre sur mes deux fesses, sans aucune pause. Comme toujours, la douleur et le plaisir se mélangent, ne formant qu'un.
Je ne réponds plus de moi même. Un sentiment d'extase me prend, controlé par l'endorphine.
Je suis en plein subspace et tout va bien.

Le Fouet de ses DésirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant