Son téléphone

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Isham

C’est avec un sourire discret aux lèvres que je me tire de chez elle. Elle n’a pas chouiné comme certaines l’auraient fait, elle n’a pas hurlé non plus. Malo a juste haussé les sourcils, rit, secoué la tête puis rit encore avant de sortir de la voiture.

Cette fille est belle. Sacrément, même.
J’ai enfin pu la voir de près. De très près.

Dès que j’arrive en bas de l’immeuble, je coupe le moteur, allume la lampe de la voiture, et j’attrape son sac balancé sur la banquette arrière. Je l’ouvre, fouille. Serviettes hygiéniques et tampons dans une pochette, portefeuille dans une autre. Un carnet, une sorte d’agenda, son téléphone. Je le glisse dans ma poche, sors de ma caisse son sac dans les mains avant de rentrer chez moi.

Seule la télé est allumée dans le salon. La daronne s’est endormie sur le canapé. J’attrape un plaid, la recouvre, éteins la télévision et vais dans ma chambre. J’enlève mon pull, mon t-shirt, les pose sur la commode et m’installe sur mon lit, le téléphone de la brune dans les mains. J’observe son écran, fais miroiter la lumière dessus et observe le U qu’a laissé ses doigts à force de le faire. Je déverrouille l’écran en le formant.

En fond d’écran, elle et un gars. Est-ce que c’est son mec ? Blond, les yeux clairs, il la regarde comme s’il allait la bouffer toute crue. Plus j’observe la photo, plus mes mâchoires se crispent.
Je ne suis pas jaloux. Cette fille ne m’appartient pas, et pourtant, de la voir ultra souriante avec ce type sur ce cliché me fout en rogne. Je clique sur la galerie. Peu de photos de lui. Juste une ou deux et je dois bien avouer que ça m’arrange. Beaucoup de photo de paysage, de l’homme que je devine être son père, d’elle et d’autres filles. J’observe attentivement chaque cliché sur lesquels elle apparait.

Sa bouche.
Rose. Bien dessinée. Charnue.
Ses yeux.
D’un vert hypnotisant. D’un vert clair. D’un vert presque limpide.
Son grain de peau.
Parfait. Qu’on a envie de lécher. De morde. De martyriser.
Ses jambes.
Ses seins.
Ma trique commence à se faire douloureuse.

Je vais sur son Instagram, sur sa messagerie. Je ne devrais pas fouiller, mais j’ai besoin de savoir si cette tapette de blond est son mec ou pas.

J’appuie sur son nom : Jeff. Je lis leur conversation.
Pas de je t’aime, de tu me manques. Juste des pourquoi tu n’réponds pas, des dis-moi où t’es, des Malo, je t’en prie, on est meilleurs potes alors parle-moi. Mais Malo ne lui répond pas et ça me va. Je pourrais m’amuser, lui dire que sa Malo ne reviendra pas de sitôt, que je suis en train de baiser sa copine, mais je n’en fais rien. Sinon elle devrait lui répondre pour rectifier le tir et je n’en ai pas envie.

Je sors de son appli, ajoute mon numéro dans son répertoire, sonne sur mon portable pour avoir le sien. Pourquoi je fais ça ? Je n’en sais rien parce que je sais qu’elle ne m’appellera jamais. Juste que cette fille me plait beaucoup et quitte à me faire couper les couilles par Samuel, autant avoir pris un peu de plaisir avant.

Je lui fais un selfie, lui change son fond d’écran avant de poser le téléphone. Il est déjà trois heures du mat. Je devrais déjà dormir mais cette nana ne sort pas de mon crâne. Soit elle m’attire parce qu’elle n’est pas comme les autres d’ici, soit je ne prête pas assez attention aux autres pour le savoir réellement.

Il n’empêche que son caractère me titille, que son sourire me percute, que son parfum ne quitte pas mes narines alors que ça fait déjà une bonne heure qu’elle est chez elle.

- Isham ?
Je grogne quand ma mère me secoue.

-T’as reçu une convocation de la police !

Elle gueule et je souffle en repoussant l’édredon sur mes pieds quand elle me jette la convocation à la tronche.

-Qu’est-ce que t’as fait cette fois ci ?

Elle ramasse le sac de Malo, le lance sur le lit.
- Tu l’as volé à qui ?! Bordel Isham !
- C’est à une meuf, elle l’a oublié dans ma voiture…
- Ouais, ouais ! Comme si j’allais te croire ! Mon dieu ! Dis-moi comment je dois faire avec ce gosse !

Elle prie le Seigneur alors que je me lève.

- Elle s’appelle Malory, je te jure que c’est la vérité.
- Tu déclines, Ish ! Tu déclines ! Tu voles, tu vends de la drogue, tu… Combien de fois tu vas devoir aller en prison avant de retenir la leçon ?!

Ma mère ne pleure pas, elle ne fait que hurler ce qui lui passe par la tête tandis que j’attrape des fringues propres en me dirigeant vers la salle de bains. Elle gueule à travers l’appartement des « Tu vas t’arrêter où ?! Merde ! Espèce de sale gosse !  Nitafanya nini na wewe? ».

Je m’enferme, me dessape, ouvre le robinet. Le pommeau de la douche qui crache l’eau couvre sa voix et je soupire longuement. Mes doigts se resserrent sur les bords du lavabo, le miroir me renvoie l’image de ma sale gueule. Elle sait que jamais je ne changerai, que jamais je ne me calmerai, que jamais je deviendrai comme cet enfoiré de Yoko. Un taf rangé dans un bureau ou dans une usine, ce n’est pas pour moi. Ce que j’aime c’est la rue, c’est traîner, c’est vendre, c’est voir tout ce fric que je ramène à Sam chaque soir.

Je me brosse les dents alors qu’elle martèle la porte à coups de « attends quand tu vas sortir de là ! ».
Je grimpe dans la douche, me lave. Quand je sors de la salle de bains, la daronne a déserté les lieux. Je suppose que soit elle est allée chez la voisine du bas, soit elle est sortie faire des courses. J’enfile mes baskets, attrape quelque chose à grailler en chemin et quitte l’appart’, le fameux sac dans le poing.


La Jeep de Sam n’est pas garée dans l’allée, mais le rideau à l’étage a bougé et je suis certain que la brune est là. Je frappe à la porte mais comme elle ne m’ouvre pas, je décide de faire le tour. Je saute la barrière pour arriver dans le jardin, grimpe les deux marches du patio, frappe à la porte en vieux bois qui grince sous mes mains. J’entrevois une ombre à l’intérieur. Dès qu’elle ouvre la porte, je lui fourgue son satané sac dans les bras. Elle fronce les sourcils, ne s’attendant sûrement pas à ce que je lui rende aussi facilement. Sans un mot, je fais demi-tour, prêt à détaler, mais c’est sans compter sur la brune qui m’appelle :

- Isham ! Attends !
Je n’aurais pas dû me retourner vers elle. Je n’aurais pas dû écouter sa voix de sirène. Maintenant que je la vois vraiment, je ne peux pas quitter mes yeux de sa personne. Malo porte un pyjama short bien trop court. Son ventre bronzé est découvert, ses jambes hâlées sont un véritable appel au sexe.

- Quoi ?
- Ça va ? Tu pars comme ça, sans rien dire, ça ne te ressemble pas…

Je ricane, m’approche dangereusement d’elle, recule quand je me rends compte qu’elle tend les bras devant elle, comme pour se protéger. Elle a peur de moi ou bien ?

- Qu’est-ce que t’en sais de ce qui me ressemble ? Tu n’me connait pas.

Elle baisse les bras le long de son corps, ouvre la bouche. Je regarde ses lèvres, je m’y attarde, je me vois lui foncer dessus, la soulever et l’embrasser avant de la baiser contre ce mur de vieux lambris. J’ai envie d’elle. J’ai envie qu’elle me change les idées, qu’elle me dise d’arrêter et à la fois qu’elle me supplie de continuer.

- On se voit ce soir.
Je me tire avant de fauter. Parce que c’est clairement ce qui va arriver si je ne reste pas loin de cette nana.
En arrivant devant la maison, je tombe nez à nez avec Samuel.

- Qu’est ce que tu foutais là ?
Il me jette un regard méfiant, un de ceux qui donnerait envie à n’importe quel mec de se barrer en courant.

- Range tes crocs, l’vieux, je venais chercher mon dû mais ta nièce m’a dit que t’étais pas là.

Sam regarde par-dessus mon épaule, soucieux, puis sort une liasse de sa poche avant de me donner les cent cinquante qu’il me doit.

- Tu veux manger avec nous ? Je suis allé chercher de quoi faire un barbec’.
Je refuse. C’est pas sa viande que j’ai envie de grailler, mais sa nièce. Je lui rappelle que j’ai pas que ça à faire, ce qui le fait sourire et je me barre.

Dealers Wicked Tome1 : IshamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant