Chapitre 2 : Ses yeux

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Maintenant



– Non, attends ! M'écriais-je à gorge déployée en courant après mon bus. Putain...


Je m'arrête en voyant que, de toute façon, cela ne servira à rien de lui courir après. Les mains posées sur mes genoux, la tête entre mes épaules, j'essaye tant bien que mal de reprendre mes souffles. Dire qu'il y a quelques années, juste le fait de marcher me faisait mal. Je ne savais même pas s'il m'aurait été possible de remarcher un jour, du moins c'est ce que les médecins de ma rééducation me disaient. Je serre la tête pour éviter d'avoir à repenser à tout ça en me redressant, regardant l'heure sur ma montre. « 7 h 45 », bon bah, plus qu'à prendre un taxi.


Une fois dans le taxi, les mains sur le manuscrit que je devais finir de lire pour hier, déjà un Stabilo à la main pour surligner les phrases que je trouvais vraiment très intéressantes pour pouvoir en faire part à mon chef qui attendait avec impatience celui-ci sur son bureau ce matin. À 24 ans, je suis la seconde de la chef d'une grande entreprise d'édition de Paris. J'habite dans un appartement acheté, situé dans le 11e, que mon frère avait pour moi sans me le dire. Ce fut après ma captivité que celui-ci m'en avait délégué les clés à un notaire, puis je n'avais plus eu de nouvelles de lui. Et ce n'est pas faute encore une fois d'essayer de le retrouver encore aujourd'hui. Mais je me fais une raison. Après 4 ans de ma fin de captivité sans aucune nouvelle de lui, je me dis finalement que je n'en aurai plus jamais.


Après un coup de frein assez brutal de la part de mon chauffeur, les lunettes de soleil qui étaient posées sur le bout de mon nez tombaient sur le manuscrit qui jonchait sur mes genoux. Sur un hoquettement de ma part, je relève les yeux vers le rétroviseur de mon chauffeur qui peste sur les voitures en face de nous. Son regard croise finalement le mien au moment où il allait ouvrir la bouche, mais ses yeux finissent par passer d'agacer à étonner.


- Je .. Euh... Désolée, mademoiselle, je suis confus : une voiture à piler devant moi !


Une fois que j'ai fini par comprendre le sens de son regard, je remets rapidement mes lunettes en place en m'enfonçant dans mon siège la tête baissée.


– Ce n'est rien.


Une fois arrivé, je manque de faire tomber le manuscrit de mes mains sur le sol, heureusement que j'évite cela, car le trottoir est trempé à cause de la pluie qui n'arrête pas depuis plus d'une semaine. J'arrive jusqu'au grand bâtiment de style gothique, mais en passant la porte, mon corps heurta quelqu'un. Me faisant tomber, mais tout le reste également. Décidément, mes lunettes avaient décidé de quitter mon nez plus que je ne l'imaginais aujourd'hui.


– Mais putain ! Fini, je part souffler d'énervement.


La personne en face de moi ne bouge même pas d'un trait. Une paire de baskets noires au pied, un pantalon gris délavé, au moment où j'allais arriver à la main, qui, d'ailleurs, celle-ci a gagné la moitié. S'arrêtant à la première phalange, l'homme recule d'un seul coup pour finir par me contourner.


– Faites attention.


Je me fige instantanément, ma respiration se coupe aussi tôt. Mes mains, quant à elles, posées sur le carrelage en marbre de l'entrée de mon entreprise, se mettent à trembler sans même que je puisse les retenir. D'un mouvement de tête, tourné vers l'entrée de la partie où je viens à peine de mettre les pieds, la seule chose que j'aperçois est un homme de carrure assez musclé, la capuche noire de son sweat relevée sur la tête, ses mains mises dans ses poches. Je pourrais mettre mes mains à couper qu'il accélère le pas comme s'il avait vu que je le regardais s'en aller. Et si c'était lui ? Et si c'était cette personne que j'ai toujours rêvé de revoir après 4 ans en la cherchant lui également dans tous les coins de rue ? Tous les bars dans lesquels je m'arrête le samedi soir avec mes amies ?

Distance mortelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant