1 . Les Fantômes du Passé et du Futur

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    Oria se réveilla en sursaut. Des gouttes de sueur dégoulinaient sur son visage. Sans vraiment savoir pourquoi, elle pâlit.

   Une main froide comme la mort lui enserra le cœur et les poumons, si bien que pendant plusieurs secondes, elle suffoqua. La jeune fille prit sa gorge à deux mains et tenta de retrouver un semblant de respiration.

   La sensation d'étranglement laissa place à de puissants maux de tête qui semblaient marteler son crâne de façon de plus en plus insupportable. Des tâches noires lui obstruirent la vue au point de faire disparaître le monde derrière un voile de ténèbres.

   Oria paniqua, ne pût s'empêcher de gémir doucement sous la douleur et l'incompréhension, et se recroquevilla sous le drap de son lit. Sa vision réduite à néant par une des hallucinations qui lui arrivaient souvent, l'adolescente ferma les paupières en suppliant tous les saints de lui permettre d'oublier.

   Oublier ce regard brisé, anéantit, terrorisé qu'il lui avait adressé.

Lui, toujours lui, et ses pupilles aux nuances vertes, ce paysage sanglant et détruit. Ces mots qui l'écrasaient de honte, lui rappelant sans cesse ses actions ignobles qui avaient composé son identité :

"Ta faute, ta faute, ta faute..."

"Pardonne-moi, mon amour". La dernière phrase fût accompagnée du visage blafard d'une femme à la beauté jadis infinie et inégalée. Qui était aujourd'hui souillé de par son propre sang qui lui coulait sur le visage, tel un rideau de théâtre tombant à la fin d'une pièce morbide. Sa peau pâle, ses cheveux dorés soigneusement attachés en un chignon défait, son regard trahit, tout concordait pour faire ressentir à Oria une horreur sans nom. Un couteau planté dans le cœur, elle fixait d'un regard de détresse son assassin qui la portait dans ses bras. Lequel souriait avec une exaltation proche de la folie.

   Ce tueur, c'est toi.

  - LAISSEZ-MOI !!! hurla la jeune fille.

   Elle perçut des bruits de pas, une lumière vive qui vint chasser la nuit maudite qui l'entourait, tandis qu'elle s'égosillait d'épouvante.

   Elle sentit qu'on lui arrachait la couette, la mettait sur le dos, lui prenait la main en lui disant de se calmer, que tout allait bien...

   Non ! Rien n'allait ! Ils ne comprennaient pas !

Au bout de quelques minutes de lutte, Oria finit par se convaincre qu'effectivement, tout allait bien, puis elle craqua.

   Des larmes ruisselaient sur ses joues sans vouloir s'arrêter, comme une vague infernale qui engloutissait ses vies et ses fantômes.


   La chambre d'hôpital était silencieuse.

Les rayons du soleil d'un après-midi de printemps dessinaient des silhouettes difformes sur les draps défaits.

   Oria laissa retomber sa tête sur la vitre de la fenêtre qui la séparait du monde extérieur. Elle resterait encore un peu avant de sortir.

   Le temps de reprendre son souffle.

En ce moment, les fiches de révision pour son bac de français lui prennaient un temps fou, l'empêchant de voir ses amis autant de fois qu'elle l'aurait voulu.

   Elle n'avait pas pour habitude de réviser d'arrache-pieds sur des sujets qu'elle n'aimait pas. Les maths par exemple. Mais bon, c'était son deuxième examen national qu'elle passait, elle pouvait bien lui consacrer un minimum d'attention.

   La porte s'ouvrit brusquement sur une infirmière pressée :

  - Tu te sens mieux ou je te donne un doliprane ?

Le Chant des Âmes fantômesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant