Chapitre 9

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J'allume mon téléphone pour ouvrir l'application aux couleurs bleutées.

Le papillon vert remplit l'entièreté de mon écran tandis que mon téléphone rafraîchissait les images jusqu'à obtenir une page de messagerie.

Je retrouve la conversation avec un psychologue que j'ai entrepris il y ª quelque temps. J'ai discuté récemment avec lui de mon vide émotionnel et nous avons eu le temps d'échanger sur ce qu'il pensait être une alexithymie*. Il m'ª fait passer plusieurs tests en ligne pour approfondir son examen et ses pistes s'orientent maintenant sans aucun doute vers ce trouble en particulier. Je n'en ai pas encore parlé avec mes parents, notamment avec ma mère, attendant d'être en confiance pour m'autoriser à m'attarder sur ce sujet.

J'ouvre les quelques notifications où il m'explique que je devrai cesser mes rendez-vous avec ma psychologue ou simplement lui parler de nos échanges pour l'aider à approfondir ses résultats et recherches.

Sans trop y faire attention, je ferme l'onglet de l'application et rejoins la conversation que j'entretiens avec Sae-Jin.

On dit souvent que l'été est la période des séparations amicales, mais si j'avais pu ne pas en faire l'expérience, j'en aurai été d'autant plus ravi.


Sae-Jin me parle, mais sait-il même que je ne le comprends pas ? Je l'ai blessé, une nouvelle fois.

« Tu ne fais pas attention à moi »

Pardon.

« Tu ne me console pas »

Pardon. Pardon.

« J'ai l'impression que tu ne me portes pas d'attention »

Pardon. Pardon. Pardon.

Je me sens vide. Encore. La place qu'il prenait dans mon cœur a été vidée une fois de plus. Je n'ai pas mal, je veux avoir mal. Est-ce que j'aurai le droit un jour de devenir comme ceux que j'envie ?

Il me laisse, à nouveau comme les précédents, comme toutes les autres personnes à qui j'ai fait confiance. J'ai froid, je veux juste tout arrêter, pour qu'ils ne souffrent plus à ma place.

Je voudrais lui dire à quel point la douleur m'est inconnue, à quel point je veux le comprendre, le consoler, ou juste l'aimer. Simplement lui donner l'importance qu'il mérite.

Mais comment expliquer ce que moi-même je ne comprenais pas.

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Je m'étends sur mon lit, les écouteurs enfoncés dans mes oreilles, laissant la musique m'envelopper. Les sons lents et mélodieux d'une chanson instrumentale remplissent ma chambre, une bulle de calme au milieu du tumulte de mes pensées. Mes yeux fixent le plafond, mais mon esprit vagabonde loin d'ici, explorant des mondes où je me sens plus à l'aise.

La lumière du soleil couchant projette des ombres longues et douces à travers le volet, transformant ma chambre en un tableau vivant de jeux de lumière. J'apprécie ces moments de solitude, ces instants où le monde extérieur cesse de m'envahir. Les murs de ma chambre tapissés de posters, chaque image représentant un univers où je peux me perdre, loin des préoccupations quotidiennes.

Sur ma table de chevet, une pile de livres se dresse, témoignant de mes goûts éclectiques. Il y a des romans dramatiques , des bandes dessinées ou des romans policiers. J'aime la lecture parce qu'elle me permet de plonger dans d'autres réalités, de comprendre des perspectives différentes, même si ces concepts semblent parfois aussi éloignés que des étoiles dans le ciel.

La porte de ma chambre est légèrement entrouverte, laissant filtrer les bruits de la maison. J'entends les pas de ma mère dans la cuisine, le bourdonnement de la radio et les miaulements répétés de mon chat devant le fenêtre du bas. Ces sons familiers créent une toile de fond réconfortante, moment de stabilité dans ma vie familiale malgré mes propres turbulences intérieures.

Je me redresse et observe le ciel pas mon velux . Le crépuscule baigne la rue dans une lumière dorée, et les premières étoiles commencent à scintiller dans le ciel. J'observe les autres adolescents de mon âge marcher sur le trottoir, discuter et rire sans effort apparent. Une sensation de décalage m'envahit, mais aussi une pointe de curiosité. Peut-être que, malgré tout, je trouverai un jour ma place parmi eux.

Je retourne m'allonger sur mon lit, laissant la musique continuer à jouer dans mes oreilles. La mélodie douce et apaisante est comme un baume sur mon esprit agité. Je ferme les yeux, me laissant bercer par les sons et les images qui flottent dans mon esprit.

Un bruit familier commence à se mêler à la musique : le doux tambourinement de la pluie contre la fenêtre. Un sourire se dessine sur mes lèvres. J'ai toujours aimé la pluie. Elle apporte une sensation de calme et de renouveau, comme si chaque goutte d'eau lavait les tensions de la journée. J'ouvre les yeux et regarde les gouttes glisser le long de la vitre, formant de petites rivières éphémères. La pluie transforme le paysage en un tableau vivant, ajoutant une couche de magie à la scène nocturne.

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PETIT LEXIQUE :

Alexithymie : L'alexithymie est un trouble qui se caractérise par une difficulté à identifier, comprendre et exprimer ses propres émotions. Les personnes atteintes de ce trouble ont souvent du mal à distinguer leurs sentiments des sensations physiques, ce qui peut les rendre incapables de décrire ce qu'elles ressentent. En plus de ces difficultés, les personnes alexithymiques peuvent également ressentir une gamme restreinte d'émotions ou éprouver certaines émotions de manière atténuée.

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