Chapitre 84

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À côté du bar à volonté, je prends une assiette et commence à la remplir sans même faire attention à ce que je prends tellement je suis ailleurs. Je m'en veux tellement pour Allison. Deux fois qu'elle perd ceux qu'elle aime. Et moi, je préfère rester ici. Au fond, est-ce que ce n'est pas moi qui suis égoïste ? Une coupure d'électricité me fait lever la tête de mon assiette, mais comme le courant revient rapidement, je ne m'en formalise pas. Tournant les yeux vers mon plat, je remarque qu'il déborde presque de nourriture improbable. Je grimace avant de le poser loin de moi, n'étant pas trop fan du mélange céréale-poivron-camembert.

- Ça vous dirait pas qu'on sorte d'ici ? On pourrait se faire un road trip !

Je me tourne vers Klaus, qui vient de s'approcher de nous en toute discrétion, car je ne l'ai absolument pas entendu arriver. Je lève un sourcil, ne voyant pas trop où il veut en venir. Pourquoi partir d'ici, et surtout, où aller ?

- De quoi tu parles, demandai-je dans l'espoir d'avoir plus d'informations.

- Je parle d'un petit séjour à la campagne, rien que nous trois. Nous sentirions le vent dans nos cheveux et avalerions les kilomètres comme Thelma et Louise ! Explique-t-il avec entrain.

- Tu sais qu'elles meurent à la fin ? Demande Cinq sans lui jeter un regard.

Klaus ne fait pas attention à sa remarque et continue dans sa lancée, me faisant légèrement sourire. Il est complètement stupide, mais c'est justement ce dont on a besoin parfois.

- On se tiendrait par la main ! On vivrait notre meilleur vie mes petits biquets !

Je secoue la tête en entendant ce surnom. Du Klaus tout craché.

- Écoutez, reprend-t-il plus sérieusement, j'ai failli mourir à cause des flatulences de Luther cette nuit. C'est tellement puissant que ça traverse les murs ! (Il fait mine de s'étouffer) Il faut qu'on sorte d'ici, on a besoin d'air frais !

Cinq roule des yeux. Visiblement, il en a un peu marre de l'insistance de notre frère.

- OK, imaginons. Pourquoi nous Klaus ?

- Parce que vous avez dit que vous étiez à la retraite, explique-t-il comme si cela coulait de source. Et ce genre de chose, c'est exactement ce qu'aime faire les retraités ! Vous devriez vous amuser un peu.

Je réponds à Klaus pendant que Cinq se dirige vers l'aquarium rempli de poisson.

- OK, mais tu veux aller où ? Faudrait prévoir...

- Il y a pas de homard, coupe Cinq d'une voix faible, si bien que j'aurais pu la raté.

Je m'approche de l'aquarium à mon tour en fronçant les sourcils. Je suis pourtant sûre qu'il y a quelques minutes, il y avait trois homards là-dedans.

- Peut-être que Chet les a mixés pour en faire des smoothies, propose Klaus d'une voix trainante avant de revenir à ses moutons. S'il vous plaît, venez avec moi, j'ai pas envie d'être seul, je veux sentir ma famille près de moi, et quand je dis ça, je parle pas des pets de Luther !

Je lance un regard à Cinq et me connecte à son esprit afin que nous puissions délibérer en toute intimité.

- Honnêtement, je pense que ça peut être une bonne idée, ça nous fera de vrai vacances. Enfin, même si c'est avec Klaus.

Cinq ne me répond pas, se contente de hocher la tête si doucement que Klaus ne remarque rien, avant de prendre la parole.

- T'es qu'un idiot, Klaus, mais on marche.

La joie qui s'empare de mon frère me fait sourire. Il commence en sauter partout en criant, ce qui est loin d'être discret et attire encore une fois l'attention des résidents, mais nous nous en fichons.

- Faites vos valises, on part dans une heure ! Crie-t-il joyeusement.

- Quoi ? M'étranglai-je avec surprise. Mais enfin Klaus !

Mon frère chasse mes paroles d'un geste de la main avant de prendre un verre qu'il boit d'une traite.

- Si on part plus tard, vous allez changer d'avis. Allez-y !

Je soupire avant de me diriger vers ma chambre, un petit sourire dessiné sur le visage. Au final, c'est une bonne idée. Ça va me permettre de m'éloigner un peu de ma culpabilité, à savoir Allison, mais également de Lila. Si elle a pu venir ici, elle peut très bien recommencer. Au moins, sur la route, personne ne saura où nous sommes, personne ne nous dérangera.

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Assise entre Cinq et Klaus dans la voiture, je prends une grande inspiration d'air frais avant de soupirer de joie. Finalement, comme le fait remarquer Cinq, ce n'était pas une mauvaise idée. Je bouge doucement la tête au rythme de la musique, sous les regards amusés de mes frères. Il faut profiter de chaque seconde !

- On a été sous pression tout notre vie. En mission pour papa, à travailler pour la Comission, à survivre à l'apocalypse...On devait être sur nos gardes en permanence à attendre que la prochaine galère nous tombe dessus. Ça fait du bien de souffler.

Je lui lance un grand sourire et prends sa main pour que nous bougions tous les deux sur la musique. D'abord pas très motivé, Cinq finit tout de même par se joindre à moi en souriant. Pas besoin de ressasser les vieux souvenirs, c'est derrière nous tout ça. Je ne veux plus y penser. La chanson arrive à son terme, et comme s'il avait reçu une décharge électrique, Cinq se met à fouiller dans la voiture, les yeux brillants.

- J'ai entouré les lieux touristiques sur la carte.

J'écarquille les yeux en me demandant quand il a trouvé le temps de faire ça. En tout cas, il semble vraiment motivé, car il ne prête même pas attention aux protestations de Klaus et continue à nous expliquer le parcours qu'il a décidé.

- La ferme s'il te plaît écoute moi deux secondes ! Finit par dire Klaus, ce qui jette un blanc dans la voiture. Tu peux faire ça ? Hein ?

Renfrogné, Cinq pose la carte sur ses genoux et croise les bras en regardant Klaus d'un œil meurtrier, attendant quil s'explique. Pour ma part, j'ai simplement les yeux fixés sur mon frère et les sourcils froncés. Étrangement, j'ai un peu peur de ce qu'il va nous dire. Si on est pas partis pour faire du tourisme, qu'est-ce qu'on fou sur la route ? Après un petit silence pendant lequel Klaus met ses idées en place, il finit par avouer.

- Nous allons en Pennsylvanie pour retrouver ma mère biologique. Ouaiiiis !

Il tente de mettre de l'entrain dans son dernier mot, mais nos deux visages se décomposent. Putain, on c'est fait avoir !

- Tu te fous de nous là ? Demandai-je en espérant à une blague.

- Je suis désolé de vous infliger ça, mais il me fallait des personnes comme soutien émotionnel.

Je suis scandalisée. C'est du vrai foutage de gueule.

- Comme un animal de compagnie ?! S'énerve Cinq.

- Klaus, arrête la voiture tout de suite on se casse, dis-je d'une voix sans appel.

Ignorant mon ordre, il tente de se justifier en disant que s'il nous avait dit la vérité, nous ne serions pas venu.

- C'est normal Klaus car on est à la RETRAITE ! M'énervai-je. Ça devait être une voyage sans prise de tête !

- Et ça peut toujours l'être, explique Klaus.

Je lâche un soupir de frustration en maudissant du plus profond de mon être mon frère. C'était pour m'éloigner des problèmes familiaux que j'ai accepté de partir, pas pour en récupérer d'autre en route !

Cinq ne semble pas vouloir lâcher son idée de vacances tranquilles. Il remarque un panneau indiquant la présence d'une pelote de laine géante, et s'empare du volant pour tourner. Je m'accroche à mon siège en hurlant de tenir la route, mais entre Klaus qui tire d'un côté et Cinq de l'autre, la voiture tangue dangereusement et nous manquons de rentrer dans une voiture.

- JE SUIS UN PUTAIN DE PILOTE DE FORMULE 1 ! Hurle Cinq quand Klaus lui dit qu'il n'a pas l'âge pour conduire.

- VOS GUEULES BANDES DE DÉGÉNÉRÉS ! Hurlai-je à mon tour, faisant tomber un gros blanc dans la voiture. VOUS VOULEZ TOUS NOUS TUER OÙ QUOI ?

Voyage tranquille, tu parles. J'ai plus de chance de mourir avec ces deux là que quand je pars en mission.

Contre le temps - Umbrella Academy fanfictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant