37 - Romain

7 4 0
                                    

NDA : Bon, j'ai peut-être un peu oublié de poster cette semaine 😅😂 Je suis en pleine relecture de cette histoire, je passe des heures à traquer les répétitions, vivement que les corrections soient terminées !
Bonne lecture ✨

***

Les réparations sont terminées, le toit de l'atelier est comme neuf. Penché sur son ordinateur, avachi à la table de la cuisine, Romain étudie une fois de plus les comptes d'Avel et d'Alana. Le couple n'aura certes pas à payer les réparations, mais les pertes restent considérables. Comme s'ils pouvaient se le permettre...

Avec un soupir, Romain passe les chiffres en revue, traque le moindre détail. Il a beau chercher, il sait qu'il ne trouvera rien. La banque refusera de faire un prêt sans garantie, Avel et Alana n'ont rien qui puisse être suffisant. Peu importe l'aide reçue, les réparations, les espoirs des habitants de la propriété : au bout du compte, l'Atelier est condamné.

— Combien de temps ?

Romain sursaute. Avel est là, adossé au chambranle de la porte, une tasse de café entre les mains. Il ne l'a pas entendu arriver.

— Quoi ? bredouille-t-il.

D'un regard, son ami lui intime de répondre.

— Je ne sais pas... tente d'esquiver Romain.

Avel s'assombrit, ses épaules s'affaissent.

— Si peu que ça ? murmure-t-il pour lui-même.

— Je suis désolé...

— Non, ne le sois pas.

Un sourire triste passe sur les lèvres d'Avel.

— Ce que tu as fait pour nous, le toit...

— Ça n'aura servi à rien.

— Bien sûr que si. Même si l'Atelier ferme, nous aurons un toit. C'est toujours utile ! Et puis, nous devrions pouvoir sauver ce qui compte.

— Sauver l'Atelier ? s'écrie Romain.

Lui aussi a entrevu une solution. Ce n'est certainement pas la même, pourtant. La sienne, de solution, n'en est peut-être même pas une. Romain n'est pas certain de pouvoir l'évoquer.

— Garder les garçons, corrige Avel. Pour l'atelier, c'est trop tard. Certaines choses sont vouées à disparaître...

Romain pince les lèvres, navré. L'œuvre de toute une vie, tout ce à quoi Avel a dédié son existence depuis si longtemps, tout cela est-il réellement voué à disparaître ?

— Je vais parler à Madeleine, continue Avel. Lui demander de trouver quelqu'un d'autre pour employer Alexandre. Peut-être Suzanne et Lou, pourquoi pas ? C'est suffisamment près d'ici, les garçons pourraient rester vivre avec nous.

— C'est bien...

Avel sourit, et ce simple geste illumine son visage tout entier.

— Oui. C'est bien.

Alors qu'il s'éloigne, Romain serre les dents. L'injustice de la situation le hérisse. Il se redresse, ferme son ordinateur d'un geste sec, le fourre sous son bras et sort de la demeure. Il se dirige à grandes enjambées vers le cabanon. Là, il attrape son portable et compose le numéro de Diane.

Il ne laissera pas Avel perdre l'Atelier. Pas s'il peut y faire quelque chose.

Mais il n'est plus seul, plus depuis longtemps, et ce n'est pas une décision qu'il peut prendre sur un coup de tête.

Diane décroche, il parle, explique, évoque la peine et les regrets, l'injustice, cette terrible injustice. Il ajoute la bienveillance des habitants, l'océan à la fois si beau et dangereux, les garçons qui se battent pour s'en sortir, Alyssa qui semble plus légère. Il conte son attachement à la propriété d'Avel, la construction de l'Atelier, il y a des années de cela, l'amitié de deux jeunes garçons qui, hélas, ont fini par se perdre. Diane écoute en silence. Lorsqu'il se tait enfin, elle s'éclaircit la gorge.

— La mer, tu as dit ?

— À perte de vue.

— Les étoiles ?

— Sublimes. Plus que nulle part ailleurs.

Elle rit. Il n'est pas objectif, ce sont les lieux de son enfance, ils ont gardé un goût de tendresse et d'innocence, malgré les drames qu'ils ont porté.

— Tu en as parlé à Alyssa ?

— Non. Pas encore.

Sa voix vacille, Romain soupire.

— Je ne sais pas comment lui parler. Elle pose tant de questions, mais les réponses sont si compliquées...

Il se tait. Diane non plus ne sait pas tout. Elle ne demande rien, pourtant.

— Tu es sûr de toi ? questionne-t-elle seulement.

Romain fronce les sourcils.

— Non, admet-il avec lassitude. Je ne suis plus sûr de rien.

— Alors fais-le.

— Quoi ?

— Fais-le, répète Diane, un sourire dans la voix. Tu en as envie.

— Mais je ne suis pas sûr...

— Justement, Romain. Depuis que je te connais, c'est bien la première fois que tu doutes. La première fois que tu te permets de t'écarter de ton chemin habituel.

Une fois de plus, Romain mesure la chance qu'il a de l'avoir trouvée, d'avoir rencontré l'amour une seconde fois, alors qu'il n'y croyait plus.

Son regard se pose sur sa table de chevet. À l'intérieur, caché comme un secret qu'il désire oublier, le pendentif en tourmaline de Layla semble le narguer. À côté, le carnet qu'Avel a laissé. Romain fronce les sourcils. C'était pourtant Alyssa qui l'avait en sa possession...

Il l'ouvre délicatement. Une écriture familière qu'il ne connaît pourtant pas assez s'y dessine.

« Papa,

On ne sait peut-être pas vraiment se parler, mais tu sais écrire et raconter comme personne. S'il te plaît. J'ai besoin de savoir.

Raconte-moi ton histoire. »

Romain déglutit difficilement. Hésitant, il s'empare d'un stylo. Pour lui, tracer des lettres sur le papier a toujours été plus simple que de les prononcer. Romain raconte peut-être comme personne, mais il écrit mieux encore.

Il songe aux mots d'Avel, aux supplications d'Alyssa, au soutien de Diane.

Alyssa a raison. Il est temps.

Alors Romain pose la pointe du stylo sur le papier parcheminé. Hésitant au début, puis de plus en plus à l'aise, il laisse l'encre dessiner les mots qui refusent d'être prononcés.

« Ce jour-là, je me sentais horriblement fébrile. Je n'aimais déjà pas beaucoup les rentrées scolaires, mais celle-ci était pire que tout. Je ne connaissais personne. »

Ce que souffle le ventOù les histoires vivent. Découvrez maintenant