Ce que souffle le vent

08 - Matéo

Matéo a passé la matinée à éviter son frère - avec plus ou moins de succès, il faut bien l'avouer. Prenant Alyssa comme prétexte, il lui a montré tout ce qu'il connaît en sculpture sur bois. La jeune femme n'est pas très douée, et grâce à sa maladresse, ils y ont passé un certain temps.

Matéo l'aime bien. Contrairement à Alexandre et Avel, elle parle en travaillant.

— Combien de temps tu vas rester ? a-t-il demandé.

— Je ne sais pas encore.

Elle a le sourire triste et le regard lointain, comme perdu dans un brouillard qu'elle seule perçoit. Matéo aimerait bien en chasser les nuages.

— Et toi ? a-t-elle questionné.

Matéo s'est mordu les lèvres.

— Je ne sais pas.

Ils ont échangé un sourire. Elle n'est là depuis longtemps mais, déjà, il se sent moins seul.

— Je peux avoir le sel ?

Ignorant ostensiblement la demande, Matéo prétend être perdu dans ses pensées. Alyssa tend le bras pour attraper la salière et la tendre à Alexandre. Sans le quitter des yeux, son frère attrape l'objet et le repose. La jeune femme et son père regardent son petit manège sans vraiment comprendre.

— Je peux sortir de table, Alana, s'il te plait ? demande Matéo d'une petite voix.

— Je t'accompagne ! s'exclame Alexandre.

Avel croise le regard de Matéo, qui le supplie silencieusement d'arrêter son frère. Il pince les lèvres.

— Pas toi, Alexandre, soupire l'ébéniste.

— Mais...

Matéo en profite pour déguerpir. Silencieusement, il se faufile dans l'atelier d'Avel. Là, il se sent bien. Se perchant sur le plan de travail du fond, qui, au fil des jours, est devenu son endroit favori, il sort d'une caisse un chiffon replié. Il le pose sur la table et l'ouvre. À l'intérieur se trouvent trois petites figurines. Il les observe d'un œil critique, attrape la scie à bois et commence à rectifier l'une d'elle.

— C'est toi qui les as faites ?

La voix d'Alyssa le fait sursauter. Matéo hoche la tête. La jeune femme en attrape une et l'examine attentivement.

— C'est super bien fait ! Tu devrais les peindre, ça rendrait encore mieux.

— Avel m'a dit pareil.

Pendant un moment, rien ne trouble le silence, mis à part le bruit de la lame sur le bois. Matéo tire la langue avec application, Alyssa regarde ses gestes avec une certaine fascination.

— Dire qu'à ton âge, tout ce que je savais faire, c'était cuire des pâtes...

Matéo rit.

— C'est pas sorcier ! Tu les as reconnus ?

Alyssa tend le doigt vers celle que Matéo travaille :

— Captain America, énumère-t-elle avant de regarder les autres, Iron Man. Et la dernière, je ne sais pas trop...

Matéo lui jette un regard faussement vexé.

— C'est Hawkeye !

— Qui ça ? s'étonne la jeune femme.

— Œil de Faucon ? tente-t-il. Clint Barton ?

Alyssa secoue la tête, visiblement amusée.

— Il est moins connu, concède Matéo.