Chapitre 17- Morgan

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Mon collègue arrive et emmène le client de Trish. Je reviens auprès d'elle dans sa consultation. Toujours à genoux auprès de Perdita, elle ne cesse de pleurer, son front sur celui de sa chienne sans vie. La balle a traversé sa gorge, ne lui laissant aucune chance de survie. Rock va s'asseoir à ses côtés et pose sa truffe sur sa tête avec douceur. 

Le labrador chocolat allongé sur la table à l'air de planer. Par moment il se redresse avant de se rallonger lourdement comme si c'était trop fatiguant pour lui de faire cet effort. Je m'approche de lui pour voir comment il va, à peine l'ai je touché qu'il se met à hurler. Trish se redresse brusquement et nous rejoint.

— J'ai juste touché sa tête, je m'empresse de me justifier.

— C'est rien, il est en plein délire à cause de la morphine. Il faut que je l'opère, tu peux t'occuper de ...

Sa voix s'étrangle, je la serre dans mes bras. Ses sanglots tarissent rapidement alors qu'elle se reconcentre sur l'animal qu'elle est en mesure d'aider dans l'immédiat. 

Après m'être occupé du corps de Perdita, je rejoints Trish en chirurgie. Je ne sais pas comment appréhender ses réactions. Elle est passée de la dévastation à une concentration extrême alors qu'elle est en train d'enfiler une broche dans la patte du chien. 

— J'ai besoin de me concentrer.. tu m'aides pas là, m'informe t elle sans lever la tête de son patient.

Je soupire et sors, j'en profite pour nettoyer le sang qui a tâché le sol et le mur. 

Dans les jours qui suivent, Trish est éteinte. Plus rien n'illumine son visage. Elle ne pleure pas, ne rit pas, ne crie pas, elle est vide tout simplement. Je passe tout mon temps libre avec elle mais elle ne semble même pas le remarquer. Tout dégénère quand une femme vient réclamer le labrador.

— Bonjour, je suis bénévole pour l'association de protection des animaux, se présente t elle à Trish à l'accueil.

Derrière le comptoir, assis aux côtés de Gaby, nous regardons cet échange. Gaby est tendue et me regarde apeurée en voyant l'expression rageuse de Trish.

— Bonjour, que puis je pour vous?

— Je viens chercher le labrador.

— Je ne crois pas non.

— Mais vous m'avez appelé..

— C'est une erreur, gronde la jolie blonde. 

— Mais enfin, son maître a été incarcéré, il ne va pas rester en box chez vous indéfiniment, c'est n'importe quoi! 

— Il n'est pas en box et a déjà un maître. Vous n'aurez qu'à envoyer la facture pour votre déplacement mais nous n'aurons pas besoin de vos services. 

Le labrador allongé à mes pieds repose sa tête lourdement sur le carrelage, comme s'il avait compris que sa place était désormais ici. Rien ne perturbe ce chien. Il passe son temps à dormir et manger, je me demande même s'il n'est pas croisé avec un paillasson. Rock ne cesse de lui jeter des regards curieux, ne comprenant pas pourquoi cette serpillère volumineuse ne répond jamais à ses invitations aux jeux. 

Quand la femme de l'association repart, Trish se tourne vers Gaby pour la fusiller du regard.

— Tu ne crois pas que tu aurais pu poser la question avant de l'appeler?!

— Désolée Trish, je pensais bien faire. J'ai cru qu'il te rappellerai cet accident et ...

— Et rien, ce chien reste là, point!

 Trish s'en va en fulminant, Gaby se tourne vers moi et je ne trouve rien d'autre à faire que hausser les épaules. Je sais qu'elle est triste d'avoir perdu son compagnon à 4 pattes mais ses réactions sont imprévisibles depuis et ça en devient de plus en plus tendu. 

On dîne en tête à tête dans un silence de mort, comme chaque soir depuis une semaine. Le téléphone de garde s'allume, Trish répond et donne des conseils à ses clients qui n'auront pas besoin de se déplacer. Quand elle revient à table, j'attaque.

— Je reprends de nuit la semaine prochaine.

— Ok.

— Je ne veux pas que tu fasses de gardes en mon absence.

Elle ricane en secouant la tête.

— Je suis sérieux Trish! 

— Ce qui est arrivé est exceptionnel contrairement à toi qui risque ta vie jour et nuit, s'énerve t elle.

— C'est la première fois que tu te faisais agresser en garde?

Ses lèvres se pincent, je le savais!

— C'est non négociable Trish. Tu ne reçois plus personne la nuit. Ou alors on prend un chien de garde et dès que je l'aurai dressé tu pourr...

— J'ai déjà un chien!

Je me tourne vers le labrador aussi large que haut et grimace.

— Ce truc? Mais enfin, il ne fait que dormir!

— C'est normal avec l'anesthésie et les antidouleurs..

— Il ne court même pas après une balle! 

— Il a une patte cassée!

— Oh arrête, même les croquettes il a la flemme d'aller les chercher, il attend gentiment que tu déposes la gamelle sous sa truffe parce qu'il est trop feignant pour aller jusqu'à elle. Ce chien ne sert à rien!

—  Arrête de t'en prendre à Bouly, il ne t'a rien fait à ce que je sache!

— Bouly?, je demande en levant les sourcils.

Je ne savais pas qu'elle lui avait donné un nom..

— Quoi? Tu voulais que je l'appelle brindille?! En plus, il y répond à chaque fois... enfin presque... bon d'accord il ne répond que lorsque je secoue ses croquettes, mais c'est pas de sa faute. Une petite remise en forme et ..

— Petite? 

— Tu m'énerves! Ok, je ne ferai plus de garde quand tu n'es pas là. C'est bon tu es content? J'ai encore le droit de respirer ou je dois demander ton aval?

— Je t'aime Trish.

— Tu .. quoi? Mais enfin tu ne peux pas me dire un truc pareil maintenant!

— Au moins tu réagis..., je marmonne.

— Tu .. je ... argh! 

— Oh et j'ai envie de vivre avec toi aussi, mais vas y prends le temps de respirer, je t'en prie, je conclus en déposant un baiser sur son front.


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