Ma mère avait changé, je le sentais, sans connaître le comment et le pourquoi.
Elle m'avait parlé une fois d'un homme qui travaillait dans la même société qu'elle jusqu'au moment où elle m'avait demandé: "Julia, je veux te demander si tu veux parler avec lui au téléphone, il s'appelle Pierre?" Je n'avais pas refusé et j'ai dit oui.
Le téléphone, pour certains qui le connaissait, était un téléphone à cadrant vintage; où il fallait faire tourner le mécanisme pour faire chaque numéro. (Il y avait huit chiffres à composer au lieu de dix maintenant).
On avait donc parlé ensemble, tout juste cinq minutes et avait raccroché.
"Il a une voix douce tu as entendu?" J'avais hoché la tête en disant oui.
A ce moment là j'ai su que; entre ma mère et lui, il commençait à se passer un petit quelque chose.De fil en aiguille, on partait quelques jours chez lui. Il habitait dans un apparemment, sur un lac artificiel.
En été, je me faisais piquer par des moustiques, je ressemblais plus à un fromage plein de trous!Pierre était un ingénieur physicien, chef de groupe, aimé par ses collègues, il était sérieux, travailleur, où l'on pouvait compter sur lui, très gentil et respectueux.
On revenait assez souvent chez lui, jusqu'au moment où il commençait à m'aider pour les devoirs.
Les devoirs...! Surtout le moment des mathématiques! Je détestais cette matière car je n'y arrivais pas.
Je bloquais sur un exercice et Pierre, jambe tramblante, m'avait pris mon stylo de ma main gauche pour écrire la solution: "et ça?! Tu ne sais pas faire?!" Sa main avait frappé fortement la table avec le crayon. Ma mère était à côté et lui avait demandé gestuellement d'y aller doucement.
C'est vrai oui... Il n'avait pas de patience; au début mais il ne m'avait JAMAIS frappé, ni rabaissé lui.. . J'avais de la chance de l'avoir.Un soir d'un mois de janvier, à 18h, j'avais fini mon rendez-vous avec mon orthophoniste. En janvier, à cette heure-là, il faisait encore nuit. Nous étions; moi et ma mère, dans la voiture pour repartir dans notre studio.
C'était dans un virage, en montée, entouré de grands sapins. Il faisait tellement sombre que l'on apercevevait tout juste les autres arbres au fond.
Une autre voiture arrivait trop vite en sens inverse, avec ses phares jaunes éblouissants, ma mère avait tout juste le temps de prendre une fois une inspiration avant qu'il puisse nous arriver de plein fouet.Le bruit de la taule, freins, tout s'emmêlait dans ma tête, mon corps avait cogné tout le côté passager. J'étais devant. J'avais dépassé le nombre de centimètres pour y aller et donc, j'avais le droit.
Encore un autre mauvais souvenir que j'aurai dans ma mémoire tout au long de ma vie... le capot tordu, de la fumée qui sortait, je tournais ma tête à gauche ou ma mère se trouvait... Elle ne bougeait plus.
Son visage ensanglanté de toute part ruisselait un peu sur le volant, sur le pare-brise... Et un peu sur moi. J'avais pleuré en criant.
J'étais sorti de la voiture, dans le noir, quelques réverbères éclairant la route sinueuse. J'avais marché plusieurs minutes, allait au milieu des deux routes, levais mes bras en l'air pour chercher de l'aide.J'étais revenue dans la voiture.
Ma mère avait repris connaissance.
"ça va tu n'as rien?" Me disait-elle.
Elle avait touché son visage et c'était au moment où elle avait remarqué son sang.
Les pompiers, ambulanciers, des passants, étaient venu nous aider.
Je commençais soudainement à avoir mal à mon poignet droit: il était tordu et cassé ainsi que mes orteils du pied droit.Une gentille dame m'avait dit "surtout ne bouges pas!" La tension pour moi commençait à descendre, j'avais pleuré énormément.
J'entendais un bruit aigu de tôle, les pompiers n'arrivaient pas à ouvrir la porte du conducteur. Ils avaient pris une scie électrique pour couper le toit de la voiture. Ils commençaient à prendre soin de ma maman en mettant un minerve avant d'entreprendre quoique ce soit en manipulation puis, faisait glisser une planche derrière son dos et la sanglait. Je l'avais vu sortir en priorité (si je m'en souviens bien) et moi après de la voiture. L'homme qui avait créé l'accident, je me souviens qu'il avait juste une petite plaie sur sa tête, nos regards s'étaient croisés, l'air honteux et apeuré.Il était bien debout et marchait.
En route nous deux vers l'hôpital...
Quand nous allions rentrer à l'hôpital, ma mère partait dans une salle, moi dans une autre.
Première nuit là-bas...
Le lendemain, une infirmière
était si douce avec moi, j'étais sur le brancard: "j'espère que cela ne va pas te faire trop mal..." perfusée sur la main... la douleur...!! Et j'avais pleuré. "Oh non je n'aime pas faire du mal aux enfants!!"
Les soignants m'avaient mis le masque, me demandait de compter jusqu'à 10... au bout de 2, plus ou moins, je m'étais assoupie.
Prête pour l'opération.Quelques heures plus tard, je m'étais retrouvée avec mon bras droit plâtré au trois quart, bras plié ainsi que mon pied, jusqu'en dessous du genou droit.
Une femme m'avait ramené ma maman... Son visage etait tuméfié de partout, de couleur violette, avec des bandages sur son visage. Elle dormait encore. A cause de l'hématome qu'elle avait, son œil du côté droit était révulsé.
Ma famille était venue... en pleurs.
Quand elle était partie, c'était Pierre qui était venu. Il s'était assis à côté de ma mère en prenant sa main avec ses deux mains, comme s'il avait fait une prière.Par la suite plusieurs années après, j'ai su que ma mère avait fait un arrêt cardiaque; dû à la violence du choc de l'accident.
Si je n'étais pas sorti de la voiture en temps et en heure pour aller chercher de l'aide... Ma mère aurait pu mourrir...
Quand tout commençait à aller mieux, les docteurs nous avaient donné la permission de rentrer chez nous... Mon studio, que j'aimais tant.
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A cœur ouvert
Non-FictionD'après une histoire vraie. Julia est une fille unique, une fille qui a connu des choses qu'elle n'aurait jamais dû connaître: entre l'inceste, la violence et la mort, elle décida de vivre... Et pour de vrai cette fois-ci... En vous expliquant le po...