SOPHIE
Quelques mois plus tôt...La nuit est tombée sur le château de Versailles. Ma mère et mon beau-père, Antoine, sont couchés depuis quelques minutes. Et moi, feintant de dormir dans ma chambre dans nos grands appartements, je suis allongée dans mon lit, toute habillée, les yeux levés au plafond, à attendre que minuit sonne. Puis, quand les deux aiguilles de l'horloge se rejoignent, je me relève d'un bond, le sourire aux lèvres.
D'abord, j'enfile mes chaussures en plus de mon mantelet à capuche, mais bien vite, je décide de les porter à la main le temps de sortir du palais pour ne pas risquer de me faire remarquer. En catimini, je sors de ma chambre, traverse les appartements que je quitte sans difficulté puisqu' à cette heure-ci, tous les domestiques sont dans leurs quartiers. Je grimace lorsque je ferme la porte des appartements, en priant pour que ma mère, qui a un sommeil assez léger, n'ait rien entendu.
Une fois dans les couloirs du château, je jouis d'une liberté possible qu'une fois la nuit tombée et laisse la nervosité et la hâte envahir mon corps. Dans ma poitrine, mon cœur est comme fou, il bat si vite que j'en ai le tournis. À la vue des gardes chargés de faire des rondes pour s'assurer qu'aucun intrus ne s'introduise dans le palais, je me réfugie derrière un rideau, mais ne peux m'empêcher de pouffer. Sortir sans se faire remarquer est tellement grisant ! Les gardes éloignés, je me mets à courir pour arriver plus rapidement et une fois dans les jardins, je longe le Grand Canal pour me retrouver dans le parc, là où il m'attend. Être seule ici, dans la nuit entre tous ces arbres est déroutant et je l'avoue, cela me fait peur, mais pour le revoir, je suis prête à prendre tous les risques. Mais lorsque, dans mon dos, je sens une présence puis, quelques secondes après, une main qui se pose sur ma bouche, je pousse un hurlement étouffé tout en essayant de me débattre.— C'est moi, ma tendre et douce Sophie, uniquement moi.
À l'entente de sa voix et une fois libérée de sa main, je me libère et lui envoie un regard noir tout en lui donnant un coup dans l'épaule.
— Henri, sacrebleu, vous m'avez fichu la frousse de ma vie !
En me voyant apeurée, il rit.
— Henri, vous n'êtes qu'un idiot !
— Et vous, aussi belle que la lune.Ce compliment a le don de me faire taire et après de longues secondes à nous regarder dans le blanc des yeux, nous tombons dans les bras l'un de l'autre et nos bouchesse rejoignent après avoir été trop longtemps séparées. Henri et moi entretenons une relation depuis quelques mois, depuis que je l'ai vu jouer dans une pièce de théâtre que Mère, Jean-Baptiste et moi sommes allés voir à Paris. Dès que je l'ai vu apparaître sur scène, j'ai su que lui et moi allions vivre de belles choses.
— Vous m'avez tant manqué, mon amour, marmonne-t-il contre mon oreille.
— Moi aussi je me suis languis de vous, Henri.Nous nous embrassons encore. Ses mains, baladeuses, découvrent un peu plus mon corps, bien que nous ne sommes jamais allés plus loin que des attouchements, réservant l'acte charnel pour notre nuit de noces.
Mon dos plaqué contre un tronc d'arbre, Henri et moi ne cessons de nous échanger des baisers passionnés, tout en n'arrêtant jamais de nous dire à quel point nous nous aimons.— Marions-nous, me supplie-t-il en entourant mon visage de ses mains.
Ses traits sont durs comme si, à cet instant, il était en train de souffrir. Mais de quoi ? De notre éloignement et de notre relation secrète ?
— C'est mon vœu le plus cher, mon très cher Henri, mais je n'ai que seize ans, je ne peux le faire sans l'autorisation de ma mère.
— Alors demain, demandez-lui et marions-nous dans les prochains jours.Bien que je rêve d'être sa femme au plus vite, je me dois de calmer ses ardeurs et ses envies pressées.
— Cela ne se passe pas ainsi, Henri. Nous n'avons pas le même rang, je suis une noble alors que vous n'êtes qu'un bourgeois : les mariages mixtes ne sont que très peu autorisés. Nous devons user de stratagèmes pour que le nôtre soit possible.
— Que proposez-vous ?
— Demain matin, je parlerai à ma mère. Je lui dirai que j'ai rencontré un homme et que je souhaite l'épouser. Je parlerai de vous, sans évoquer une seule fois votre condition. Je vanterai vos mérites, lui proposerai de vous rencontrer. Je n'ai aucun doute sur le fait qu'elle vous apprécieras et alors, elle acceptera le mariage. Puis ensuite, viendra l'étape la plus délicate où je devrai parler de tout cela à mon père...Ses sourcils se froncent.
— Votre père n'est-il pas mort il y a de cela des années ?
Je pince les lèvres en réalisant ma bêtise.
— Si, en effet, mais... je devrai en parler à Antoine, le second époux de ma mère. Et également à mon frère, Jean-Baptiste, puisqu'il a hérité du titre de Marquis d'Anjou.
— Ne craignez-vous pas qu'ils découvrent la supercherie ?
— Du moment que cela ne se sait pas avant notre mariage, nous sommes tranquilles. Après celui-ci, nous aurons notre nuit de noces alors quand bien même ils découvriraient que vous êtes bourgeois, ils ne pourront plus rien faire pour annuler le mariage.Un sourire naît sur ses lèvres.
— Vous y avez réfléchi longuement, à ce que je vois.
Je pouffe avant de lui offrir mes lèvres à nouveau.
— Non, mais que faites-vous dont ? tonitrue une voix derrière nous.
Surprise par cet éclat de voix, je pousse un cri de peur et Henri s'éloigne automatiquement de moi, la tête basse.
— Mère ? Mais que faites-vous là ? m'étouffé-je.
— C'est plutôt à vous que je devrais poser la question, ma fille.Les bras croisés sur sa poitrine, elle aussi habillée, ma mère a revêtue son costume de mère autoritaire.
— Et vous, jeune homme, éloignez-vous tout de suite de ma fille.
Henri ne se fait pas prier et recule de deux pas.
— Maintenant retournez-vous et disparaissez de ma vue.
Ce qu'il fait sans attendre. Mon cœur saigne à l'idée de le voir s'éloigner sans un dernier baiser.
— Mère, mais enfin...
— Vous êtes totalement irresponsable, Sophie ! Sortir dans la nuit pour rejoindre un garçon, de basse naissance qui plus est, c'est totalement indigne d'une jeune fille de votre rang !Mon sang se glace quand je réalise qu'elle m'a entendu parler de son rang dans la société.
— Oui et bien peut-être n'ai-je plus envie d'être noble !
— Ne dites pas de sottises. Vous avez de la chance que ce n'est que moi qui vous ai surprise, Sophie, car si cela avait été une tout autre personne, le Roi en aurait été informé et vous auriez dû épouser cet homme !
— Mais je veux l'épouser !
— Non, le Roi, votre père, ne l'autoriserait pas. Et moi non plus. Maintenant suivez-moi, nous rentrons.Je la retiens par le bras et lui offre un regard suppliant.
— Non, s'il vous plaît, Mère, j'aime Henri, nous voulons nous marier.
— Avez-vous été intime avec lui ?Son regard qui me sonde me fait baisser les yeux. Pendant un instant, je suis tenté de dire oui, ainsi, elle sera dans l'obligation d'accepter ce mariage, mais je me souviens de ce qu'elle m'a raconté, un jour, sur tante Elisabeth et son époux, Edouard : apprendre qu'elle était enceinte de lui avant le mariage a profondément blessé ma mère, je ne veux pas lui faire revivre cela. Ma conscience ne l'accepterait pas.
— Non, nous... avons seulement échangé des baisers.
— Très bien, tant mieux, fait-elle, soulagée. Je ne parlerai à personne de ce que j'ai vu ce soir, mais vous, vous devez me promettre que vous ne reverrez plus jamais ce garçon.
— Mère ! m'indigné-je.
— Promettez-moi, Sophie, car si je vous retrouve une nouvelle fois dans ses bras, je serai contrainte d'en informer votre père et croyez-moi, il ne sera point aussi indulgent.Le cœur battant, mais aussi blessée, je finis par accepter sa condition d'un hochement de tête. J'aime ma mère, j'aime également mon père, ce Roi si illustre, je ne peux me résoudre à les blesser. Je me dois d'agir comme une jeune fille de mon rang, mère me l'a assez répété durant toute mon enfance.
— Allez, venez là, m'invite-t-elle dans ses bras en voyant mes larmes. Je sais que c'est dur, mais ce n'est qu'un premier amour, vous tomberez de nouveau amoureuse, Sophie, je vous le promets.
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Bonjour et bon jeudi ! Quoi de mieux que de commencer ce mois d'août par un nouveau tome de Vices à Versailles ! 🥰🥰
J'espère que l'histoire de Sophie vous plaira❤️❤️

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Vices à Versailles - Pour arriver à moi Spin-off
Romance1694. Officiellement fille du Marquis d'Anjou, le premier mari de sa mère Louise. Officieusement, elle est la fille du Roi-Soleil. Pour Sophie, être la fille d'une noble n'est pas simple. Mais il est encore plus difficile d'être fille de Roi. À t...