Chapitre 12

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Je me réveille, le visage chatouillé par les lumières factices d'une station service. Julien nous incite à nous lever en allumant la radio et un hurlement de métal me fait aussitôt bondir de mon siège. A cet instant précis, je le hais. En réalité, c'est l'action que je hais plus que la personne mais, à cause de la fatigue, ça se reporte sur lui. Cette idée est pourtant bien vite dissipée lorsque je sens quelque chose remuer sur mes genoux. Logan s'était endormi, la tête posée dessus. J'ai beau tenter, impossible de me remémorer à quel moment j'ai, ou il a, sombré dans le sommeil. Il se réveille, tout penaud, sous les hurlement de Klara pour que son frère éteigne la radio.

- Allez les mioches ! Faites un tour dans la station service pour aller aux toilettes et acheter de quoi manger pendant que je fais le plein d'essence. Je vous rejoins après ; j'ai vraiment besoin d'un café.

Sur-ce, il confie trente euros à sa sœur en nous prévenant que nous n'avons pas intérêt à tout dépenser pour des bonbons puis sort de la voiture pour se poster devant la pompe à essence. Peu de temps après, les quelques personnes présentes dans la station service ont le malheureux plaisir d'assister à un spectacle étrange ; trois larbins mal réveillés déambulant mollement dans les petites allées à la recherche de quelque chose à se mettre sous la dent. Nous repartons bientôt vers la caisse, les bras chargés de sandwichs, de boissons, de chips, de gâteaux et surtout de bonbons - en grande partie pour embêter Julien -. Ce dernier franchit au même instant les portes automatiques. En voyant la montagne de bonbons que nous nous apprêtons à acheter, il manque de s'étouffer.

- Hé ! Quand je disais ne dépensez pas tout dans des bonbons, je voulais dire ne dépensez rien dans des bonbons ! Nous avons un budget à tenir durant ce séjour. Je n'ai pas emporté une montagne d'or, moi !

- Il s'agit de l'argent des parents. rappelle Klara.

- Oui mais l'essence, qui est-ce qui le paye ? Tout de ma poche ! soutient Julien. Et puis zut, c'est moi qui décide, je suis le seul adulte !

Klara s'esclaffe.

- Un adulte vivant encore chez ses parents !

Je me racle la gorge afin de leur faire comprendre que leur discussion ne mène à rien. Julien se reprend puis cède finalement :

- Vous pouvez garder un paquet de bonbons mais je rapporte les autres.

Une fois notre choix fait, Julien nous confie les clés de la voiture pour que nous puissions y décharger les courses et file en rayons rendre les paquets non désirés. Il revient à la voiture, un café à la main.

- Et c'est reparti !

Nous mangeons sur la route, le ciel noir s'ouvrant devant nous. Aucune étoile. Pourtant, je sais qu'elles sont là.

***

Durant l'heure qui suit, nous décidons de jouer à des jeux plus improbables les uns que les autres afin de distraire Julien pour le maintenir éveillé. Je ne tiens pas le coup et m'endors au bout du septième jeu. Une fois que j'ai compris que je faiblis, je lutte pour garder les yeux ouverts mais, lorsque le silence retombe, je sombre dans le sommeil à mon grand dame.

J'ai l'impression que mes paupières viennent tout juste de se fermer quand, soudain, je ressens de violentes secousses qui me projettent dans tous les sens. Les autres se réveillent en hurlant sans comprendre ce qui se passe autour de nous. Julien semble malheureusement être dans le même état. Il s'est endormi ? Il s'est endormi ! Brusquement et en dernier recours, il braque le volant sans que personne n'ait le moindre espoir. A cet instant, nous savons que nous allons mourir. Et, là, maintenant, je ne suis pas prête à l'accepter. Malgré tout, je n'ai pas mon mot à dire, ni moi ni eux. C'est comme ça, c'est tout. L'aventure se termine ici, en ce lieu, en cet instant. Je ne reverrai jamais Carlos. Ma mère ne me reverra pas non plus. Sa souffrance s'accentuera jusqu'à, peut-être, devenir insupportable. Elle ne le mérite pas. Je ne le mérite pas. Aucun de nous ne le mérite. Une larme résignée roule doucement sur ma joue au milieu des derniers cris.

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