02. Amnésie

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Le nouveau médecin arrive aux aurores. Il porte sa blouse habituelle, aussi blanche que son teint. Il a de violentes cernes qui contrastent avec cette pâleur, la fatigue émanant de l'homme est flagrante.

Dans le calme olympien qui l'enveloppe, il passe le seuil de la porte avec son compte rendu coincé sous son bras. Le froncement de ses sourcils n'annonce rien de bon. Sa démarche de vieillard le rend quelque peu énigmatique quand il vient se poser au côté de Max.

Droit comme un piquet, il dépose une main sur le genou du monégasque. Au dessus du drap, il caresse légèrement cette zone avec son pouce pour avoir l'attention du plus jeune.

Celui ci papillonne des yeux, Max lui, peine à ne pas se chercher un  vingtième café. Il baille à s'en décrocher la mâchoire, alors que le vielle homme commence à feuilleter ses innombrables feuilles accrochées par un trombone :

- Alors Charles.. j'ai une mauvaise nouvelle.

Le monégasque, qui a dorénavant compris que c'était son prénom, accroche son regard désespérément dans celui de l'homme. En position mi- assise mi- couché, il triture légèrement le tissu sous ses doigts de pianiste.

- Tu as une amnésie post-traumatique. Il conclut en relevant le regard par dessus ses fines lunettes rondes.

Charles fronce violement les sourcils. Son rythme cardiaque s'accélère. Le bruit des machines s'enflamment, coupant la paix qui enveloppait ses pensées.

- Mais ce n'est pas le seul problème..

Max, qui s'était déjà douté de la perte de mémoire, relève la tête vers le médecin.

- Il y en a d'autres ? Il questionne en se redressant sur la chaise. Son dos est bien endolori par la position.

- Oui.. marmonne le médecin. Il y a de grosses lésions qui n'ont pas été soignées, totalement délaissées.

Le néerlandais retient son souffle. Il vient pincer l'arête de son nez, les yeux fermement clos le temps d'une seconde, le laissant continuer sous le regard interrogateur du plus jeune :

- On a retrouvé dans ton sang, Charles, des médicaments pour le sommeil, et pour la douleur. Ta tension artérielle est en chute libre, comme tout ce qui devrait te maintenir en bonne santé, absolument tout, est en dessous de la moyenne.

Le pilote Ferrari n'a pas l'impression qu'on parle de lui. Donc dans un calme plus ce que suspect, il détourne le regard. Malgré son manque de mémoire, il ressent une certaine gêne qui démange sa poitrine. 

- Je ne comprends pas comment tu as pu rester en forme jusque là. Il y a bien un moment que tu aurais du arrêter la formule 1 vu ton état, c'est un danger pour toi de conduire, mais aussi pour les autres. Il explique comme si le plus jeune pouvait s'en rappeler, même si en vérité il s'adresse plutôt au jeune homme posé sur la chaise.

Max, habitué à voir son rival joueur et solaire, se décompose à l'entente de ses mots. Il était clairement passé à côté de quelque chose, et il s'en voulait, de ne pas s'être interposé comme il aurait dû.

- C'est.. putain.. il souffle en fixant les yeux verts qui se présentent à lui.

Charles ne semble pas du tout touché. Il acquisse docilement, comme si il comprenait.

La vérité est tout autre, Charles est intelligent et rusé. Au delà des frontières du petit garçon rieur et charmeur, se trouve une autre personnalité bien plus différente. 

Il n'a juste pas envie de recevoir une deuxième piqûre qui l'emmènerai dans le pays des merveilles. Il joue avec son indifférence pour ne pas devoir être forcé à sombrer à nouveau.

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