Chapitre 8

35 5 8
                                    

Lorsque Dante nous avait fait l'annonce de son mariage, je ne savais pas si je devais être heureuse pour lui. Luisa et lui étaient amoureux, cela se ressentait dans leurs gestes et leurs paroles, mais l'idée de se marier ne venait clairement pas d'eux.

Cependant, au fil des mois qui avaient suivit, ils avaient préparé leur mariage l'air sincèrement enthousiastes. Malgré tout, ils semblaient réellement heureux de cette union. Luisa avait même fini par emménager au manoir avec nous. L'entente entre elle, papa, et Leonardo était cordiale. Ils avaient très vite cessé de lui poser tout un tas de questions et s'étaient désintéressés d'elle assez rapidement.

Même si au départ je n'étais pas certaine que ce mariage soit une bonne chose, j'avais finalement l'impression qu'il nous avait tous apaisés. Les préparatifs prirent une grande place dans notre quotidien. Après deux drames dans la famille, nous allions enfin connaître un moment de joie. Peut-être que, pour une fois, papa et Leonardo avaient eu raison.

De son côté, Ruggero avait commencé à travailler pour l'entreprise familiale, au grand dam de Vittoria. C'était son rêve de faire carrière là-bas. Ma sœur s'était promis que lorsqu'elle aurait l'âge, elle intégrerait l'entreprise et détrônerait notre cousin. J'étais persuadée qu'elle réussirait. Elle était déterminée, brillante, et rien ne semblait pouvoir l'arrêter à l'époque.

Ce que je n'avais pas anticipé en revanche, c'était la rébellion soudaine de Priscilla. Si mon oncle avait réussi à façonner son fils conforme à son image : prétentieux, avide de pouvoir et prêt à tout pour parvenir à ses fins, même au pire ; sa fille, en revanche, avait pris une trajectoire complètement différente. Ma petite cousine était devenue une véritable rebelle. Devenue la pire ennemie de son père, les disputes entre eux étaient incessantes. Elle osait lui tenir tête, ce qui avait le don de mettre Leonardo hors de lui. La chambre de Priscilla collé à la notre, nous entendions souvent les portes du manoir claquer. Je dois avouer que c'était presque réjouissant de voir quelqu'un résister à Leonardo et de le voir si décontenancé face à ça. Il y avait une étrange satisfaction à constater que Priscilla ne se laissait pas écraser.

Une fin d'après-midi, alors que j'étais dans ma chambre en compagnie de ma soeur, des éclats de voix ont commencé à s'élever à travers la porte. Vittoria s'était mise à rire en entendant la repartie de notre cousine :

— Si quelqu'un m'avait dit un jour que Priscilla deviendrait plus rebelle que moi, je ne l'aurais jamais cru. Elle est encore pire que moi à son âge.

C'est vrai qu'avant ça, la plus grande rebelle de la famille était ma soeur. Aujourd'hui, elle n'était plus la seule à tenir ce rôle. Priscilla avait pris la relève de ma jumelle, défiant le reste de la famille d'une manière encore plus virulente que Vittoria ne l'avait jamais fait.

Par ailleurs, depuis quelque temps, ma sœur semblait beaucoup plus détendue. Après avoir passé des semaines recroquevillée sur elle-même et à pleurer la perte de maman, elle paraissait redevenue plus souriante et épanouie. J'étais heureuse de la voir comme ça, mais je ne pouvais m'empêcher de me demander si cela ne cachait pas autre chose. Et, cet après-midi-là, elle avait décidé de me révéler la vérité. Elle avait prit son téléphone et avait regardé la notification qu'elle venait de recevoir avec un grand sourire.

— Sinon... commença t-elle. Il faut que je te parle de quelque chose.
— Dis-moi, avais-je dis en m'asseyant en tailleur sur mon lit, prête à écouter ce qu'elle avait à me dire.

Elle pinça les lèvres, son expression trahissant son excitation.

      — J'ai rencontré quelqu'un.

C'était donc ça : ma sœur était amoureuse ! Un sourire apparut sur mes lèvres, et je voulais soudainement tout savoir sur cette personne.

      — C'est qui ? Demandai-je. Je le connais ?

Elle secoua la tête :

      — Il s'appelle Andrea. Je l'ai rencontré par hasard dans un café. Il est venu m'aborder, on a commencé à parler, et depuis, on se voit régulièrement. Je crois que je l'aime vraiment bien.
      — Mais c'est super ça, Vittoria ! Il va falloir que tu me racontes tout.

Même si je ne le connaissais pas, une chose était sûre : il rendait ma sœur heureuse. Rien qu'à en parler, ses yeux s'illuminaient et l'amour se ressentait dans sa voix.

      — Le seul problème, c'est que... il est pauvre. Il enchaîne les petits boulots et n'a même pas de travail fixe. Je pense pas que papa l'accepterait.
      — On s'en fiche de ça, l'important c'est que tu sois heureuse !
      — C'est vrai, mais papa ne voudra jamais qu'Andrea sorte avec moi, ni qu'il vienne chez nous. En plus, je n'ai pas envie qu'il subisse un interrogatoire comme Luisa, surtout que lui n'a pas les moyens de se défendre comme elle. Il a arrêté l'école parce que ses parents avaient tellement de mal à boucler les fins de mois qu'il a dû travailler pour les aider.

Elle avait raison : jamais papa n'accepterait qu'Andrea vienne chez nous et encore moins qu'il soit le petit ami de sa fille. Je trouvais cela injuste. Nous étions censées pouvoir aimer qui nous voulions. Je promis à Vittoria de garder le secret sur sa relation.

Après ce jour, elle me confia tout de sa relation avec son copain. Andrea semblait être un garçon bien pour ma sœur : attentionné, à l'écoute, et toujours prêt à la faire rire. Il lui apportait un réconfort et une sérénité dont elle avait besoin après la mort de maman. Cependant, Vittoria me confia également une autre facette de sa personnalité. Elle m'expliquait que parfois, Andrea pouvait être impulsif et colérique. Pas avec elle, bien sûr, mais il avait eu plusieurs altercations avec d'autres personnes. Il s'était déjà battu plusieurs fois et avait déjà eu des démêlés avec la justice. Encore une raison pour laquelle papa ne l'accepterait jamais.

De mon côté, l'amour semblait être un concept qui m'échappait. Je passais des heures à lire des romans d'amour et à m'intéresser aux sentiments des autres. Et pourtant, je ne savais pas ce que cela signifiait de tomber amoureuse. Je n'avais jamais éprouvé l'émotion de me sentir comme si j'étais seule au monde avec une personne. Je n'étais même pas certaine que les garçons m'intéressaient vraiment. Les filles, peut-être un peu plus, mais pas énormément non plus. Mon véritable amour résidait dans les livres et les mots. Je préférais m'évader dans mes histoires et mon univers imaginaire plutôt que de les vivre dans la réalité.

Finalement, mars arriva à grands pas, et avec lui, le mariage de Luisa et Dante. Le jour tant attendu approchait. Malheureusement, l'amour n'est pas toujours synonyme de bonheur, et un mariage peut parfois se transformer en source de drame...

Endless Hunt [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant