Chapitre 1 - On se fait chier au Paradis

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         — On s'ennuie ferme ici !

Hust, allongé dans une méridienne, un verre de limonade à la main, rive son regard félin vers la fenêtre. Des collines paradisiaques se déploient à l'horizon. Entre deux monts, un lac cristallin miroite, reflétant les éclats crépusculaires de cette fin d'après-midi. Pendant que Hust se lamente sur la magnificence du paysage (il fait toujours beau ici, les oiseaux chantent en permanence et tout va toujours bien), j'en profite pour me servir un verre de jus de sureau.

Gagner le ciel n'a pas eu que des avantages. Depuis que j'ai racheté mon âme, quitté les Enfers et que je vis ici, dans cette magnifique villa, vue lac et montagne, on s'ennuie à mourir....

L'éternité n'a jamais été aussi longue. L'Enfer était plus fun.

Adam nous a autorisé à ouvrir un salon de thé, sans alcool, où les anges aiment venir passer leur temps (ou plutôt : attendre que le temps passe), mais comme le lieu n'est jamais ouvert passé 16h30, nos soirées sont vites mornes et ennuyantes.

— Je m'ennuie ! répète Hust pour la seconde fois.

J'avale mon verre de jus de sureau d'un trait. C'est frais, léger, un peu pétillant. Ça manque cruellement de piment, mais que voulez-vous ? Durant des siècles, j'ai imploré le ciel de m'accorder la rédemption et de m'ouvrir la voie d'accès au Paradis. Grâce à Charlie et au Hazbin Hotel, j'ai désormais une magnifique auréole. Ma vie est parfaite. Je ne bois plus, je ne me drogue plus, je ne couche plus avec personne. C'était la condition pour accéder au ciel et échapper à Valentino. Une vie chaste de toute addiction et poison. J'ai réussi à convaincre les séraphins, présidés par Adam-qui-est-devenu-presque-gentil, et me voilà, dans cette nouvelle vie, à siroter du sureau à côté de Hust qui boude.

— JE M'ENNUIE ! répète-t-il pour la troisième fois.

Je lève les yeux au ciel (façon de parler, puisque j'y suis déjà).

— Je t'avais entendu les trois premières fois, mon chaton. Inutile de miauler aussi fort.

— On aurait dû rester en Enfer.

C'est son leitmotiv préféré ces derniers temps. Hust regrette le rachat de nos âmes. Pour ma part, je suis plus partagé. Une part de moi regrette cette vie de débauche, de sexualité, de drogue et de fêtes. L'autre est contente de ne plus être obligé de répondre aux exigences de ce crevard de Valentino ! Cette enflure ! Ce serpent de mes deux (merci de garder ces insultes pour vous, il n'est pas autorisé de les formuler à haute voix au Paradis).

— Tu ne crois pas qu'on aurait dû rester là-bas ? reprend Hust. J'avais un boulot d'Enfer, des clients, je ne m'ennuyais jamais ! Ce n'était pas la vie rêvée, mais c'était ma vie et je m'y étais fait.

Je soupire fort et reprends un verre de sureau.

— Peut-être...

Valentino n'avait pas que des défauts. Certes, c'était un mec toxique qui m'a violé un nombre incalculable de fois et m'a jeté dans les bras de ses chiens pour ses vidéos. Mais il a aussi fait de moi une star. Avant, j'avais un boulot. J'étais le plus grand des acteurs du cinéma porno. La plus grande star du X. Tout le monde me désirait. Toutes les créatures rêvaient de mon corps. Les hommes comme les femmes utilisaient mes films pour se faire du bien.

Et maintenant, ma vie a perdu toute saveur.

J'ai perdu toute saveur.

Non pas que j'aimais être exploité, c'est seulement que j'appréciais séduire. J'apprécie toujours d'ailleurs, mais à part Hust, je n'ai plus personne à charmer. Et lui est dur du collier ! Je lui fais des avances à longueur de temps et il ne voit rien.

Mon ami barman, qui posait sur moi un regard plein d'envie, teinté de morosité, lorsque nous étions en Enfer, me regarde désormais avec une absence d'intérêt qui frôle la l'insulte. On dirait qu'il déprime. Je ne lui fais plus envie, et je peux comprendre pourquoi. J'ai troqué mes magnifiques bottes en cuir, mes accessoires BDSM et tout ce qui mettait en valeur ma poitrine proéminente pour une toge blanche et une auréole.

Je ne suis plus Angel Dust, la star du X.

Je suis un Ange.

Chaste.

Fade.

Inutile.

Bien sûr, je suis toujours aussi beau, mais je n'ai plus aucun attrait. Aucun charme. Aucun défaut. À part m'abrutir de jus de sureau, ou parfois de grenadine, je ne bois plus rien. J'ai bien tenté de fumer du roseau, une fois, mais la Grande Séraphine est venue me rappeler que c'était interdit. En entrant au Paradis, on nous a distribué un règlement trèèèèèèèèèèèèèèèès long, en plusieurs exemplaires, à parapher, dans lequel il était stipulé tout ce que nous ne pouvions « pas » faire. Je pense qu'ils auraient mieux fait de nous dire ce à quoi nous avions le droit de faire, c'eut été plus rapide.

— On devrait organiser une fête, déclare Hust.

Hazbin Hôtel : Angel & Hust fêtent l'Oktoberfest au ParadisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant