𝐓𝐇𝐄 𝐋𝐀𝐖 𝐎𝐅 𝐒𝐈𝐋𝐄𝐍𝐂𝐄 || ᴍɪᴛsᴜʏᴀ x ᴏᴄ

O9. Pénombre

Mardi 09 juin

Un gros éternuement fit trembler tout son corps, le genre à déboucher les parois nasales jusqu'à les rendre douloureuses. Un reniflement de plus puis elle se frotta les yeux, légèrement rougie.
Ce fut avec douleur qu'elle abandonna la douceur de son pyjama pour le tissu rêche de son uniforme scolaire. Sa seule consolation étant qu'au moins il s'agissait de son uniforme d'été, plus léger et sans la veste qui n'aurait fait qu'encore plus l'encombrer.

Habillée, Junko attrapa la brosse qui était posée sur le rebord du levier. Puis brossa avec attention ses cheveux, prenant soin à en défaire le plus de nœuds possible, et ce sur toute sa longueur.

Junko avait les cheveux longs, jusqu'au milieu du dos. Cette chevelure était la seconde fierté que sa mère tirait d'elle: depuis son plus jeune âge Junko se souvenait des longs moments avant de se coucher, où sa mère lui brossait les cheveux et y appliquait tant de crèmes et d’huiles. Elle se souvenait en particulier d'une période pendant laquelle sa mère lui avait fait prendre des compléments alimentaires pour solidifier ses mèches.
Junko ne s'était jamais coupée les cheveux, et la seule fois où elle en avait évoqué l'idée, la réaction de sa mère ne lui a jamais fait reposer la question.

Pourtant, Keiko Shimizu, elle, avait les cheveux courts, un carré avec un dégradé soigné qui épousait à merveille la forme de son visage.
Elle avait essayé par tous les moyens de les faire pousser: ses cheveux étaient fins et fragiles, ils ondulaient sur la fin et au moindre signe d'humidité, elle ne pouvait rien y faire et cela l'a désespérée.

Le fait que sa fille, elle, avait des cheveux plus forts, plus lisses et plus éclatants que les siens avait fait naître en elle un énième besoin de contrôle.

Le temps de s'en remémorer, Junko finit de se coiffer, ses gestes mécaniques lui évitent l'effort de se concentrer.
C'était une énième preuve de l'impact de ses parents sur sa vie.

En ayant fini avec cette tâche, la brune enfila ses chaussettes avant de sortir de la salle de bain.
Son ventre gargouilla, mais avant de descendre elle fit un crochet par sa chambre pour prendre deux cachets de paracétamol, pour calmer son mal de crâne qui l'avait suivie depuis son réveil, et un anti douleur pour son genoux.

En arrivant dans la pièce de vie, elle constata avec surprise la présence de quelqu'un d'autre. Un homme grand, à la peau un peu plus bronzé que la majorité des japonais, vêtu d'un costume noir et d'une cravate brune serrée autour de son col. Ses cheveux plaqués en arrière étaient ébènes, et ses yeux perçants d'une clarté déconcertante avec des éclats de bleus.

Il ressemblait en tout point à sa fille.

«— Papa? »

Elle était surprise, n'ayant pas vu son père depuis plusieurs jours.
Elle constatant parfois sa présente par de petits éléments. De la vaisselle qui séchait à côté du levier, des restes en moins dans le frigo, ou de la nourriture en plus, du linge dans la buanderie et l'odeur de café et de cigarette dans l'entrée.

Mais jamais un bonjour, encore moins un appel.

Mais il était là maintenant.

«— Junko. »

Des salutations embarrassantes, comme toujours. Elle regarda le sol, ne sachant pas où se mettre, perchée sur la dernière marche des escaliers, pendant que son père la regardait fixement.
Le poids de son regard avait toujours été le plus grand fardeau de la brune, elle ne savait jamais ce à quoi il pensait.

Il soupira avant de prendre sa mallette posée sur la table à manger. Junko leva alors la tête, hésitante mais décidée à entamer une discussion, après si longtemps.