Streetlight •《 Yang Jeongin 》 ✓

Nouvelle lune ▪︎ 01 🌑

Dans cette nuit complètement noire, un garçon courait. Il se frayait un chemin, s'arrachant le cœur dans une course contre la montre. Il se sauvait des hurlements de la nuit et du crépuscule qui l'effrayait tant. Les branches des arbres lui écorchaient les bras, la peau du visage et, malgré tout, il ne diminuait pas sa vitesse. Il se devait de trouver une sortie, un échappatoire qui lui donnerait une chance de s'en sortir indemne. Sa respiration était erratique, son cœur palpitait à une force inimaginable contre sa cage thoracique. La cape rouge qui l'avait toujours accompagné se déchira contre les épines sèches des sapins, mais il s'en moquait.

Jeongin s'était assis à la table ronde vêtue d'une nappe pourpre et avait regardé le diseur de bonne aventure. La pièce était tamisée sous la lumière violette et les grands rideaux qui touchaient le sol les empêchaient d'observer l'extérieur. Couché à quelques centimètres, une ligne composée de cartes de tarot s'offrait à lui. Hyunjin, le voyant, lui demanda de tirer trois cartes qui représenterait son passé, son présent et son futur. Il était de tradition à l'âge adulte que chacun des habitants de Galodeung devait se rendre chez le diseur de bonne aventure pour y connaître son destin.

Le capuchon de sa cape se coinça contre une vieille branche de pin et son premier réflexe fut de tirer sur celle-ci. Le vêtement se sectionna dans un bruit sonore des plus désagréable et, malgré sa force, il restait toujours accroché. D'un regard anxieux, il ne cessait d'observer derrière lui, entre les arbres et alors qu'il réussit à se détacher de la branche un bruit attira son attention. Son sang ne fit qu'un tour dans ses veines et il vint finalement détacher le cordon rouge qui le reliait à son chaperon. Une fois libéré, il reprit sa course, manquant presque de tomber lorsque son pied rencontra une racine avant de reconnaître le village au loin. La lumière des lampadaires aurait pu le rassurer si les grognements derrière lui s'étaient tus.

Hyunjin était plus vieux que d'une seule année, mais son don pour lire l'avenir avait été transmis de génération en génération telle une malédiction. Il avait commencé à tourner la première carte, celle du passé, la carte du chariot. Le chariot signifiait une lutte pour protéger ses intérêts et son égo, lui remémorant sa décision d’aller vivre auprès de son grand-père suite à sa situation familiale difficile. Ses parents n’ayant jamais voulu de lui, il avait été le résultat d’une adultère, et à cette circonstance ils n’avaient rien pu faire. La seule personne qui l’avait toujours aimé du fond du cœur était son grand-père paternel qui l’avait accueilli à bras ouvert lorsqu’il n’avait que dix ans. Jeongin avait appris avec le temps que le passé était une étape nécessaire à sa présente maturité et cela l’avait rendu plus fort, plus fier de la personne qu’il était aujourd’hui.

Il rejoignit le pavé du village, laissant son souffle erratique encrassé ses poumons. Il était terrifié de rencontrer l’hideuse créature qui l’attendait derrière cette luminosité qui l’avait toujours accompagnée. Le noiraud serrait les poings fortement, il ne comprenait pas pourquoi son destin l’avait rejeté ainsi comme s’il devait être punis de tous ses faits et gestes. Son corps s’était figé dans le temps devant cette créature immense, ce loup gigantesque qui avait soif de sang et il observait ces crocs jaunis par son dernier repas, Jeongin recula pas à pas. Son pelage était aussi gris que la pleine lune, aussi scintillant que cette chaîne d'argent dans le coup du noiraud. Mourir des crocs de cette créature était une des dernières choses qu’il avait espéré vivre, mais il était prisonnier de cet instant qui s’éternisait. La bave de la bête s’écoulait de sa bouche dans une odeur répugnante, donnant un haut le cœur au petit chaperon rouge. Il ne savait plus par où s'enfuir, bloqué dans l’immense forêt de pins et chênes, qui se retrouvait à être un labyrinthe de danger. Ainsi que fasse à ce loup qui se promenait dans leur village à chaque fois que la nuit tombait, il n’avait plus d’option.