Chapitre 3

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Audrey

Paris, 1920

Ses yeux se posent sur chacun des clients présent dans mon bar, précisément sur ceux connus pour être des anciens criminels. Je n'arrive pas à comprendre qui est cet homme, je l'ai bousculé, je l'ai revu dans des toilettes puis dans mon bar, mais je ne connais ni son nom ni ses intentions. Ses regards suspicieux envers mes clients ne me plaisent guère.

Je fais le tour de la pièce, en me convainquant que je suis seulement paranoïaque et je me rends au bar. Pierre, mon meilleur ami mais aussi celui qui s'occupe des boissons, me sourit.

- Tout va bien ? Tu as l'air légèrement inquiète.

- Rien, fatiguée, comme chaque jour.

Il acquiesce et je me tourne, dos contre le bord en bois du bar, les yeux rivés sur lui, l'inconnu étrange. Sa peau caramel qui brille sous la lampe jaunies par le temps et son sourire qui s'élargit en voyant arrivé sur la scène une belle et grande femme à la peau bronzée, et aux yeux bleus, me font frissonnés malgré les mètres qui nous séparent.

Angeles approche sa bouche ronde près du micro et sa voix mielleuse, accompagnée du son des instruments de la musique, envoûte toute la salle. A chaque apparition, pourtant tous habitués, chaque personne présente arrête de réfléchir, de parler, de respirer, de vivre, pour pouvoir ouïr le chant de ma meilleure amie.

Mon regard rivé sur elle change de direction pour le regarder, lui. Il ne regarde ni la chanteuse, ni les anciens criminels, mais moi. Ses yeux noir charbon viennent trouver les miens, verts, et il m'aspire toute entière. Je ne suis plus maîtresse de moi même, lui non plus. Comme si le temps s'arrêtait, comme si la foule disparaissait, comme si nous étions seules, nous nous dévorons les yeux de nos propres yeux, l'un et l'autre.

Une main vient soudain se poser sur mon épaule et me sort de cette bulle si réconfortante.

- Audrey ? Tu ne me réponds pas depuis tout à l'heure, m'annonce Pierre.

Je fais volte-face pour le confronter.

- Excuse moi, je rêvassais. Tu disais...?

- Je te disais qu'Angeles était plus que sublime ce soir et que si je pouvais je l'enlèverai pour moi tout seul !

- Elle l'est chaque jour un peu plus.

En parlant d'Angeles, j'aimerais discuter avec elle.

Je sourit à Pierre et me dirige vers les vestiaires. J'ouvre la porte et Angeles est changée.

- Tu étais époustouflante ! crie-je.

- Ma chérie, merci, répond elle en courant vers moi pour m'embrasser sur la joue.

Elle recule et me demande si j'étais venu pour autre chose.

- Effectivement, je voulais parler d'un homme qui est sur une table de l'autre côté, dis-je en montrant de la tête le mur qui cache la pièce où j'étais. C'est le seul homme noir qui est présent aujourd'hui, je ne sais pas si tu la remarqué.

- Oui, je vois où il est.

- Tu ne le trouves pas suspect ? Il n'a fait que regarder les clients ayant été criminel, même Pierre !

- Pourquoi est-ce que tu le regardais autant ?

- Tu te rappelles que je devais porter mon nouveau chapeau aujourd'hui ?

- Oui, mais tu l'as perdu.

- Exactement ! Je l'ai perdu en bousculant cet homme hier.

- Quel hasard, s'exclame-t-elle.

L'ombre des nuits parisiennesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant