Angeles
Paris, 1920
Marie, qui est en colocation avec moi, est au téléphone avec sa mère. Elle a l'air heureuse et j'entends ses nombreux rires dans le salon depuis ma chambre.
Elle a de la chance d'avoir une aussi belle complicité avec sa mère. Nous, nous nous sommes toujours disputés pour des choses futiles, ce qui nous a séparé petit à petit. Je me souviens évidemment de quelques bons souvenirs en compagnie de ma mère, même s'il n'y en a pas énormément.
Ce soir, je chante au bar d'Audrey. Je préfère me préparer ici et arriver là bas directement habillé pour me produire sur scène.
Après avoir enfiler ma robe à frange en satin noir, je décor ma tenue à l'aide bijoux de perles. Je marque ma taille par une une ceinture en or et je porte mes escarpin noir. Comme ma coiffure est déjà faite - des ondulations marcel - il ne me manque plus que la touche de maquillage.
Je m'avance vers mon miroir et utilise de l'ombre à paupière sombre puis du rouge à lèvre rouge pour illuminer la tenue.
J'admire le résultat et tourne sur moi même, faisant tournoyer le bas de ma robe qui arrive jusqu'à mes genoux.
J'aime tellement chanter, j'ai l'impression de m'envoler dans les airs, d'être applaudis par le monde entier, d'être heureuse. Mis à part les moments où je chante, je ne me sens pas joyeuse, je ne me sens pas non plus triste, juste vide. J'ai un vide, un creux, il me manque quelque chose et ce manque n'a pas l'air de vouloir se combler. Je me couche chaque soir avec l'esprit nu, troué et insignifiant.
J'essaye continuellement de percevoir ce manque qui assombri mes plus beaux jours mais le vide, si grand, me dévore.
Je souffle, agacé d'avoir gâché le peu de bonne humeur en moi. Je ferme les yeux, me positionne au milieu de ma chambre et je commence à mouvoir ma tête et à remuer les épaules.
Mon corps se balance comme par automatismes et je danse sensuellement au rythme du bruit de l'horloge qui se situe en face de moi.
Je souris, comme si je reprends vie, comme si le bonheur revenait à moi, comme si la danse était le seul remède au rude virus que j'ai attrapé.
Un cris strident vient briser le silence qui m'accompagnait lors de ma danse.
Mon corps s'immobilise et mes pensées s'entremêlent.
— Marie, demande-je doucement, inquiète.
Je prononce son prénom une seconde fois, légèrement plus fort, en me dirigeant vers la porte de ma chambre pour aller à la rencontre de mon amie.
J'avance, peureuse et tremblante, dans la pièce où se trouvait, il y a peu, mon amie au téléphone avec sa mère.
— Marie ?
Seule une mouche se fait entendre, accroissant mon inquiétude.
On dit que c'est le cerveau qui contrôle nos mouvements, pourtant je l'entends me crier de ne pas y aller. Seul mon cœur n'est pas de cet avis. Je crois même qu'il a pris possession de mes jambes pour l'aider à réaliser ce qu'il souhaite.
— Marie, répète-je en criant.
Je m'arrête pour écouter sa réponse. La mouche de tout à l'heure n'est soudain plus solitaire lorsque j'entends un reniflement derrière la table.
Je cours vers le bruit et je découvre une jeune femme à la peau rouge, habituellement olive, aux cheveux brun, court et ébouriffés et aux joues innondés de larmes, recroquvillée sur elle même.
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L'ombre des nuits parisiennes
Mystère / ThrillerAprès la guerre, en 1920 à Paris, tous pensaient pouvoir revivre normalement, malgré les traumatismes créés durant cette terrible période et ces étranges disparitions de ce bar : Nuits parisiennes. Audrey, qui tient cet établissement, avec son espri...