°•. Chapitre X

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Un long frisson me parcoure le dos. Je ne pouvais m'attendre qu'à ça depuis qu'elle m'a décris ses parents.
Elle aussi se fait une couleur chaque mois, se cache derrière des produits pour assurer sa sécurité, a certainement de la haine envers ce pays. C'est la première personne que je connaîs qui me l'avoue, qui dévoile ce secret plus intime et dangereux que tout. Elle me fait donc vraiment confiance, je ne peux plus en douter et je peux surtout plus la briser.
Toutes mes questions réapparaissent alors dans mon esprit mais une seule se distingue, une seule a réellement besoin d'une réponse.

《 Marlisa, qui est l'homme qui t'a agressé ?
- Je ne sais pas. Mais il connaît ma vie et ce secret dont je t'ai fait part. Et toi, t'es rousse ? 》

Elle n'a pas pris de pincettes, la question est telle qu'elle devrait être posée. T'es rousse ? Simple, court et rapide. Comme les lois. Il y a une chose simple à respecter, tu ne la respecte pas, tu meurs.
Je ne peux pas dévier la conversation, je ne peux pas ignorer la question, je lui doit un secret. Elle est orpheline, ses parents étaient contre ce système. Je peux donc lui faire confiance et pourtant j'hésite à lui révéler cette couleur. On nous a tellement rabaissé en criant que les roux étaient laids, leur peau trop claire, leurs tâches de rousseurs trop nombreuses, leurs cheveux trop colorés que je ne m'assume plus, même si cette description ne me correspond pas du tout. Un teint mat, des yeux verts kaki, personne ne pourrait croire mon secret. Mais j'ai été entraîné dans leur idéaux, berné par leur propagande et je voudrais changer le monde. Comment un esprit manipulable comme le mien pourrait réussir ?
Je ne peux pas me cacher plus longtemps, je ressens le besoin de le dire à quelqu'un et tout ce temps j'ai souhaité le partager. Il faut que je tente ma  chance.

Je bouge ma tête de bas en haut pour acquieser, en exagérant le geste pour qu'elle puisse le voir dans la pénombre.  
C'est bon, maintenant j'ai ma partenaire de combat, une âme à qui confier mes secrets et mon passé, mes espoirs et mes craintes.
C'est bon, la machine est en route et elle ne se laissera pas descendre avant d'avoir obtenue un changement.

***

Je me réveille avec un beau mal de crâne, comme si mes pensées et mes plans avaient retournés mon cerveau. Les stores sont relevés, le lit de Marlisa fait et une odeur de croissant flotte dans les airs. Je me lève rapidement en me tenant la tête et pars à la douche, des vêtements dans ma main libre. J'aperçois ma colocataire m'observer pendant que je sèche ma crinière.

《 Tu t'es réveillée tôt ce matin Marlisa, non ?
- Oui, j'avais envie de préparer le petit dej'. 》

Je la regarde, suspecte, cherchant le moindre détail sur sa personne qui pourrait me dire pourquoi elle adopte cette attitude ce matin. Elle a l'air heureuse et épanouie, à l'inverse total d'hier où son ton monotone relevait d'une fatigue et d'une nostalgie pesante.
Nous partons toute les deux vers l'étage inférieur pour retrouver la table du petit déjeuner, magnifiquement dressée. Les chocolats chauds sont déjà prêts, des quartiers de pommes décorent l'assiette dans laquelle le croissant beurré a été disposé et un jus d'orange arbore des couleurs fraîches et attirantes. Ce n'est certainement pas un repas préparé aléatoirement mais peu importe la raison de toute cette présentation, j'ai faim.

Pendant que je croque les parties de la pomme, Marlisa commence. Elle ne détache pas son regard de moi, sa voix est tranquille.

《 J'y réfléchis depuis longtemps ... J'ai tout de suite repéré ton secret et tes intentions, je ne suis pas dupe. Alors comme tu n'oses pas les aborder, je vais le faire. Tu déteste cette société, ça se voit vraiment, et t'aimerais logiquement que cela change, tout comme moi.
- Comment tu l'a deviné ?
- J'ai passé de nombreuses années seules dehors Alessia. J'ai appris à analyser les personnes qui m'entoure pour savoir ce que je dois faire et comment me comporter. Je suis comme toi, je veux que les choses changent et je veux agir mais je ne peux pas le faire seule et toi non plus.
- Mais tu sais bien que deux adolescentes ne peuvent pas changer le monde et ...
- Tu es intelligente, réfléchis. 》

Couleur mortelle [Réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant