nous sommes au mois de mai et il pleut dehors.
le prochain fantômes qu’il me faudra célébrer arrive vite et fort et bruyamment,
cette fois ci impossible de me soustraire à sa présence.
juillet en haut du grenier de la maison de mes cousins.maison de mes onze ans
décès de mes onze ans
allumette de mes onze ans
plaque de marbre de mes onze ansalors cette année je ne veux pas rester impassible —
ne plus bouger de peur de faire trop de bruit
cette fois ci je veux,
je veux que l’été me brûle la peau fort et solidement,
ne plus rester silencieuxse en haut des collines
ne plus se laisser faire
devenir costaud-e.premier de mes enterrements, cette année je veux l’écrire.
il me faut dire sa violence,
la lâcheté dont j’ai fait preuve pour l’avorter si rapidement,
parler de lui et de ses faux airs de repos.
car qu’on le saches,
creuser sa propre tombe,
façonner sa propre maison,
son abris son terrier son trou de rat terrier de lapin,
tout cela fatigue,
la preuve en est,
tout un mois d’acharnement je m’y suis adonné-e
nuit et jour,
jusqu’à ne plus pouvoir.je scanderai haut et fort
désolé pour l’absence, j’étais trop occupé-e à m’inhumer,
ou du moins juste m’en souvenir
cette fois ci fleurir la pierre,
garder trace
créer les vestiges de cette mort-ci que j’ai omis de garder avec moi.j’inviterai du monde beaucoup de monde plus de monde que je n’ai jamais vu dans ma vie pour toustes ensemble se dire que quelque part il peut être beau aussi de se souvenir de sa mort, ses morts, aussi nombreuses soient elles, et de décorer chacun de leurs fantômes.
je dresserai une grande table ornée d’une nappe brodée de quelques poèmes
grand banquet dans la forêt,
je lirais duras fort en criant presque et écouterai le cliquetis des horloges.
toustes nous aurons à la main notre boîte d’allumette bien à nous,
toustes suspendu-es à un fil,
l’air de dire que cela ne tient pas à grand chose,
mais qu’il faut quand même s’y accrocher.avec l’opinel de papa je sculpterai un morceau de bois à faire brûler à la place de mon corps,
à la place de ma mort,
se substituer à la présence de mon propre fantôme,
lui parmi tant d’autres qui me suit depuis six ans bientôt,
le premier de tous le suivre le laisser prendre la parole pour une fois parler à ma place et dire haut et fort tout ce que je n’ai jamais osé pleurer.
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désolé pour l'absence j'étais trop occupé-e a m'inhumer
Poetryhistoires de morts et de toutes autres fêtes. parce que cueillir les fleurs a la racine ne suffit plus pour célébrer l'abandon de soi - la chute de ses héros - la mort de ses yeux.