Chapitre 2

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Théodora

Je m'apprête à sortir de mon appartement en direction de l'hôpital, mais mes cheveux refusent de coopérer.

Sachant que je n'ai qu'une simple journée de consultations devant moi, je m'autorise à les laisser détachés, ce qui est plutôt rare. Je veux qu'ils soient parfaits, alors je les ai légèrement bouclés pour faire ressortir mes yeux de la même couleur, un châtain clair qui, aujourd'hui, semble capturer la lumière différemment. Mon maquillage est discret : un peu de mascara pour allonger mes cils et une touche de blush pour cacher mon teint de cadavre.

En arrivant à l'hôpital, je jette un coup d'œil au planning et remarque que le jeune Josh est affecté à mon service aujourd'hui. Cette nouvelle me réjouit, car j'ai hâte de lui transmettre ce que je sais. Les psychiatres hospitaliers se font rares ces derniers temps, alors si je peux en former un de plus, ce serait un vrai soulagement.

Au fond, je ne suis pas si éloignée de Josh en termes d'expérience. Il est interne, et moi, je ne suis qu'en troisième année de résidence. Encore un an et je serai enfin reconnue comme psychiatre à part entière. Mais pour l'instant, aux yeux de l'hôpital, je reste une étudiante, encore soumise à la supervision et aux restrictions dans la prise de décisions cliniques.

— Bonjour, Docteur Stone, me salue Josh en me rejoignant.

— Ne fais pas la tête à l'idée d'être avec moi, tu verras, ça va être super, lui dis-je en souriant, essayant de détendre l'atmosphère.

Je sais que ce n'est pas ce qui le motive le plus ; pour un jeune interne comme lui, la chirurgie semble bien plus palpitante. Mais même le plus renommé des chirurgiens dira que sa spécialité est l'une des plus éprouvantes. Nombre d'entre eux, s'ils en avaient la possibilité, ne feraient peut-être pas le même choix.

Les premières consultations de la journée sont sans surprise : de simples renouvellements d'ordonnances. Rien qui ne sorte de l'ordinaire. Après mon cinquième patient, je me tourne vers Josh pour recueillir ses impressions.

— Alors ? lui demandai-je.

Il me regarde, un peu décontenancé, ne sachant visiblement pas quoi répondre. Je précise alors ma question :

— Tes impressions, tes diagnostics ? Bon, d'accord, tu n'as pas vraiment eu l'occasion de poser un diagnostic puisque nous n'avons eu que des patients réguliers, mais tout de même, qu'en as-tu pensé ?

— Je ne sais pas comment vous faites, dit-il finalement, l'air pensif.

Sa remarque me surprend, et je l'encourage à continuer, intriguée.

— C'est tellement... difficile, ajoute-t-il, comme s'il cherchait les bons mots.

Sans blague.

— Et puis, je... je crois que ça me fait peur.

— Qu'est-ce qui te fait peur ? lui demandai-je doucement, en m'efforçant de garder un ton rassurant.

— Les patients sont atteints de troubles parfois très graves et dangereux... même pour vous, finit-il par avouer, son regard trahissant une certaine inquiétude.

Je comprends ce qu'il veut dire, mais je le laisse s'exprimer davantage.

— Ils pourraient s'en prendre à vous, ajoute-t-il, comme pour justifier son appréhension.

Après une profonde inspiration, je lui réponds calmement :

— Tu sais, ces gens n'ont pas choisi d'être comme ça. Contrairement aux criminels dangereux qui commettent des actes terribles de leur plein gré, eux... c'est pathologique. Ils ont besoin d'aide, de soutien, de personnes qui ne les jugent pas. Si tu n'es pas prêt à offrir cela, alors peut-être que cette spécialité n'est pas faite pour toi.

NémésisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant