Chapitre 6 (Corrigé)

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Je suis gelée.

Pieds nus à travers les bois. Ma robe est déchirée et le vent s'engouffre dans mes cheveux. Des écorchures strient la peau de mes bras et de mes jambes et je sens encore la morsure du verre de la fenêtre dans mon abdomen.

Je cours à travers la forêt sans fin. Je cherche désespérément un échappatoire mais rien. Tout se ressemble dans ce labyrinthe d'arbres enneigés. Mes jambes s'enfoncent de plus en plus dans la neige à peine tombée. J'ai l'impression que le sol va m'avaler tellement je m'engouffre dans la poudre. Mes forces s'épuisent petit à petit et je peine à avancer. Derrière moi des cris résonnent. Ils sont à mes trousses.

Je vois à quelques mètres de moi l'éclat de leurs torches qui illuminent la nuit noir. Il fait tellement sombre. C'est la première fois que j'ai une telle frayeur de la pénombre. Je peine à distinguer les formes devant moi et j'ai l'impression que mon esprit déforme la forêt qui devient de plus en plus effrayante à chaque pas.

Je tente de grimper dans le premier arbre devant moi. Soudainement la hauteur me semble être la meilleure sécurité. Mais mes empreintes dans la neige me trahissent et la peur me paralyse. Ils vont forcément me retrouver !

J'agrippe une première branche et essaie de me hisser. Mais la douleur dans mon ventre me foudroie et mes mains tremblantes de peur n'arrivent pas à avoir de prise. Plus les cris se rapprochent, plus ma peur grandit. Plus j'ai peur, plus mes mains tremblent. C'est un cercle vicieux.

Je me jette à plusieurs reprises sur la branche et parvient à monter dessus. Mais soudain l'arbre se déforme, les branches me paraissent encore plus hautes et plus inatteignables. Je tangue dangereusement du haut de mon perchoir et le sol me semble si loin. Elle n'était pas aussi haute lorsque je suis montée, j'en suis certaine.

Je perds l'équilibre et me sens chuter. Cela semble durer plusieurs minutes et le temps s'étire alors que la sensation de vide me pétrifie. Je heurte le sol et m'enfonce profondément dans la neige. Je ne parviens pas à bouger pendant de longues minutes et lorsque je relève la tête, des bottes arrivent près de moi. Un homme se tient face à moi, vêtue de noir. Seul le symbole de l'armée rouge est planté sur son uniforme. Je ne vois pas son visage que son vêtement cache et cela le rend encore plus inhumain. Sachant que je suis à terre, il me paraît encore plus grand. Mon cœur a cessé de battre, mes mains sont tremblantes et mes dents s'entrechoquent. Je le supplie de me laisser en vie, je l'implore. Mais il semble se délecter de mes suppliques et lorsque son doigt s'approche de la détente, je me recroqueville sur moi même. Derrière mes paupières closes, je ne vois qu'une chose ; les visages sans vie de mes parents et mes frères et sœurs couverts de sang.

La détonation résonne dans la nuit noire et je hurle à m'en décrocher la mâchoire. Je sens l'impact de la blessure dans mon torse, le plomb qui traverse ma chair et mon sang se déverser sur le tapis blanc...au loin une voix m'appelle mais je ne l'entends pas.

Mes cris s'amplifient alors que la douleur m'irradie. La voix d'un homme se fait de plus en plus proche. Plus douce et chaude que celle des soldats, alors je m'y raccroche...

J'ouvre soudain les yeux, l'esprit encore embrumé. Je dégouline de sueur et des gouttes de transpiration perlent de mon front. Les images terrifiantes de mon cauchemar persistent encore derrière mes paupières, me laissant avec une sensation de terreur oppressante.

Soudain, les bras chaud de Dimitri m'entourent et m'attire doucement contre lui. Sa main caresse mes cheveux dans un geste réconfortant. Son odeur boisée envahit mes sens.

- Chut ! je suis là princesse, murmure-t-il doucement, ses lèvres effleurant presque mon oreille.

C'est la première fois que j'entend sa voix grave empreinte de tendresse envers moi et celle-ci agit comme un baume sur mon esprit agité.

Anastasia (En Réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant