Chapitre 12

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Daireen

L'air froid me percute et accentue mon besoin de me soulager. Je contourne un groupe qui s'agite sur le perron et descends prudemment les marches afin de m'éviter une vilaine chute.

Ces escarpins ont beaux être confortable, ils demeurent de véritables pièges mortels sur des jambes instables. Je me secoue pour reprendre possession de mon corps qui chancelle. Mon cerveau est embrouillé et brumeux.

Des voix éclatent autour de moi et une lueur de raison m'indique que je dois m'éloigner le plus loin possible pour faire mes affaires.

Je contourne la bâtisse, trottinant jusqu'au parc, manquant à plusieurs reprises de me tordre une cheville ou de m'étaler dans l'herbe. Je marque une pause pour me débarrasser de mes talons et accélère en direction des fourrés qui jouxtent un chemin de gravier.

Sans perdre une minute, je me dissimule derrière un épais buisson. Après avoir jeté un œil autour de moi, j'abaisse ma culotte, et m'accroupi. Seule et cachée par le voile de la nuit, je pousse un long soupir de bonheur.

Une folle envie de glousser comme une dinde s'empare de mon être.

Plus légère, je me redresse en vacillant dangereusement. Mais alors que je bataille pour remonter mon foutu sous-vêtement qui joue à la liane autour de mes genoux, des éclats de voix figent mes gestes. Le cœur palpitant, je parviens tant bien que mal à dompter le tissu sauvage pour le ramener à sa place avant de me baisser.

Mon mouvement est si rapide que je perds l'équilibre et chute sur les fesses. Je me redresse à genoux, et rampe un peu plus loin jusqu'à parvenir sur une partie moins fournie. Dans un premier temps, tout ce que je vois est un large portail bordé par des ombres. Puis un déplacement attire mon attention.

Là, entre deux zones obscures, une personne agenouillée se balance d'avant en arrière. Cette situation me laisse perplexe un instant jusqu'à ce que je lève les yeux plus haut et mon cœur bondit dans ma poitrine.

Ce portrait composé de glace, se pare d'une couche plus sévère encore qui m'impose de détourner les yeux, comme si son regard hivernal m'était destiné.

Je me secoue, trouvant ma réaction stupide pour ramener ma vision sur la personne placée plus bas. C'est une fille, la robe qu'elle porte et les mouvements de balancier de son crâne ne laissent place à aucun doute quant à la scène dont je suis témoin.

Les traits de Winter dévoilent sans pudeur une forme de colère qui contraste avec le scenario. Sa main passe vers l'arrière du crâne de la fille agenouillée pour s'enfoncer dans sa chevelure. D'une traction sèche et ferme, il l'attire contre lui et j'assiste à son changement physionomique en une forme d'excitation incontrôlable.

Je peux distinguer ses mouvements rudes tandis qu'il s'engouffre avec force et vitesse dans la gorge de sa partenaire. L'alcool qui réchauffait mes veines, semble agir maintenant sur mes parties intimes qui palpitent. Mon rythme cardiaque adopte une cadence identique à ses va-et-vient qu'il imprègne à la nuque de son amante.

La chaleur s'empare de mon corps, mes cuisses se serrent l'une contre l'autre. Mes mamelons pointent et frottent douloureusement contre l'étoffe épaisse de mon soutien-gorge. Le désir m'enivre encore plus, mon corps bascule en avant. Je m'enfonce dans le buisson avant de reprendre le contrôle et de me retirer, le pouls en branle à la crainte de m'être fait prendre.

Mon regard se jette vers le couple, tout mon corps se gèle quand mes prunelles se confrontent à deux trous noirs à travers le fourré. Comme si le ciel avait décidé de me punir, la nuit s'éclaire d'une lueur pâle.

Je devrais m'enfuir, mais je suis piégée par la toile invisible qu'a tissé ses orbes sombres et le défi qu'il me lance à travers eux.

Un rictus vient ourler ses lèvres alors qu'il jouit visiblement.

Tremblante et fébrile, je ramasse mes talons, me déplie et m'élance dans la nuit, fuyant dans la direction opposée, alors que sa voix déchire le silence :

— J'espère que tu as apprécié le spectacle !

La respiration sifflante, je cours sans me retourner. Je ne crains pas de me perdre, le manoir est comme un phare dans la nuit noire. Je ralentis mes pas, pour reprendre mon souffle.

J'observe attentivement tout ce qui m'entoure, tendant l'oreille. Seules les basses feutrées me parviennent et mes poumons libèrent un long soupir qui se mue en éclat de rire.

OK, Deen. L'alcool n'est pas ton meilleur ami.

Je sursaute quand mon téléphone émet un bip dans ma pochette et je le retire pour ouvrir la messagerie.

Sanaa : Où es-tu ?

Moi : J'ai dû opter pour la solution B

Les trois points clignotent, puis, une nouvelle bulle de message apparaît :

Sanaa : Tu as pissé dans une Bouteille ?

Je glousse, et rédige une réponse :

Moi : (émoticône de dégout)

Sanaa : Dans un Bidon ?

Je ricane incontrôlablement.

Moi : (émoticône qui pleure)

Sanaa : Mon petit agneaux, quoi que tu aies dû faire pour vidanger, ça ne devrait pas faire l'objet de tant de mystère.

Mes joues s'enflamment alors que je prends conscience de ce que pourrait signifier ce « quoi que tu aies fait ».

Je tape rapidement sur l'écran :

Moi : Juste communier avec la nature. J'arrive.

Je referme la boite de messagerie et range le téléphone.

Une fois que j'ai regagné le chemin de gravier, je rechausse mes talons et retrouve l'intérieur du manoir. Du seuil de la pièce surélevé il me sera facile de repérer mes amies, mais alors que je balaye l'endroit d'un regard attentif, l'ambiance change soudainement.

Tous les yeux se portent vers le plafond. Mue par un reflex de cohésion, mon attention se dirige vers le haut.

Là, se tenant au bord d'un long balcon, quatre silhouettes contemplent avec froideur et stoïcisme la foule qui se déchaine à leur apparition. La masse d'étudiant fait une ovation aux quatre hommes comme s'ils étaient leur rock star.

Je me détache du haut pour observer les visages des personnes. L'admiration, l'envie, la luxure et la folie peint les portraits de tous. Ma bouche se tord de dégoût tandis que je suis témoin du phénomène que déclenche les Season parmi une foule entière. 

Vulgata Dominum (En édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant