01. Colombine Brinebeau

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L'eau froide coule sur ma peau nue, laissant une traînée de frissons sur son sillage. Je me sens sale.
Répugnante...
L'eau qui retombe à mes pieds est pigmentée de marron clair, me donnant la nausée. Comment puis-je porter tant de crasse ?

Je lève la tête vers le pommeau de douche, dont le débit diminue petit à petit. Déjà. Mon corps est à peine humide.

Esclave ! Sors-dont de cette de cabine !

La porte en bois est secouée par les coups. Mon cœur s'accélère, de peur qu'il ne finisse par la casser, et ne me découvre nue.
S'il-vous-plaît... ne cassez pas la porte !
Je coupe l'eau. La porte a cessé de trembler, je m'autorise à respirer. Le silence règne, seulement entrecoupé par ma respiration saccadée et celle de l'Homme.

— Ane t'attends près de la Barrière. Dépêche toi, l'Esclave. Tu n'as pas été achetée pour te prélasser.

Des bruits de pas suivirent sa déclaration. J'ai passé la main sur mon visage.

Me prélasser ?! Mon Dieu... Sortez-moi de cet Enfer...

Mon cœur bat encore la chamade, alors que je m'enroule dans une serviette de jute. J'utilise cette même serviette depuis mon arrivée précipitée ici, il y a quatre ans. Quatre ans... Quatre horribles années de travaux.

N'ayant pas le temps de penser, je sors de l'étroite cabine. Je jette un coup d'œil autour de moi.
Histoire de vérifier qu'il n'y ai personne.

***

Une corde est nouée autour de mes bras,  serrée jusqu'au sang. Mes poignets me font atrocement souffrir. Et la femme qui me tient en laisse n'y est pas pour rien. Elle n'hésite pas à resserrer sa prise. Je suis au bord des larmes.
Qu'ai-je fais pour mériter cela ?

Honnêtement, mes souvenirs restent confus. Je n'ai pour seul souvenir deux visages. Celui de mon géniteur, l'autre de mon bourreau. L'un qui sera vengé, l'autre qui subira.
Je le tuerai. Par vengeance. Justice sera alors enfin rendue.
Mes doigts se crispent sur eux même.

Dormir debout n'est pas au programme, Brinebeau.

Je grimace en entendant mon nom. Il sonne comme une insulte dans la bouche de cette Femme. Qu'elle aille mourir. Elle ne mérite que cela.

Je ne la regarde pas préférant me concentrer sur la silhouette d'Ane, qui entasse des pierres non loin de la Barrière. La pauvre subit depuis plus de dix-sept ans déjà...
Ane Lee est notre doyenne. Elle fait parti des premiers esclaves arrivés au centre, et du haut de ces cinquante-six ans, elle en a vu passer, des esclaves, la plupart morts au travail.
Ane n'a jamais tenté de s'échapper, contrairement à moi, elle accepte son sort, sans une once de résistance.

La femme me tire vers le grand mur de pierres grises. Elle me passa une énorme chaîne autour du crâne, et le fit descendre sans délicatesse autour de mon cou. Il se tordit sous le poids de la chaîne. On me prend pour un animal, pour un objet. Je déteste ça.

Je me suis tournée vers Ane, tandis que le Maître attachait mes chaînes au mur.

Ane Lee s'était approchée de moi le plus qu'elle pouvait; ces chevilles étant entravées par des chaînes semblables aux miennes. Elle m'a lancé un regard peiné. Je n'aime pas cela.

Comment vas-tu, Colombine ? m'a-t-elle lancé en reprenant son travail. Viens donc m'aider !

J'ai poussé un long soupir.  Quelle plaie ! Je me suis approchée d'Ane, qui m'a prise dans ses bras, par surprise.

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