Chapitre 6 : Un étonnant duo
- Vendredi 23 septembre 2029 - proximité de Pittsburgh
Arabella demeura sur ses gardes quelques minutes, jetant des regards en biais en direction de Sullivan, principalement sur ses mains, qu'elle voyait caresser le volant et manier tranquillement le levier de vitesse. Elle n'aurait jamais imaginé que la vision d'une paire de mains puisse le rendre aussi fébrile. Comme s'il l'avait senti, Sullivan la surprit en train de l'épier et pinça un sourire amusé. Sourire qui disparut à l'instant où il sentit l'ébauche du désir nager dans son propre ventre. Ah putain non, pensa-t-il. Je suis vraiment en chien, va falloir que je baise. Arabella voulait éviter tout moment d'embarras et entreprit de faire la conversation cependant, ses compétences sociales laissaient à désirer et ses centres d'intérêts demeuraient très éloignés de ceux de Sullivan.
— En fait les fourmis sont toutes stériles, disait-elle, mais les mâles et les futures reines sont ailées, parce que l'accouplement se passe dans les airs.
— Ah oui... passionnant.
— Après l'accouplement, les mâles ne survivent jamais, parce qu'ils ne savent pas se nourrir eux-mêmes. Un peu comme les hommes, quoi !
— On est arrivés, lui indiqua Sullivan qui souhaitait abréger la conversation.
— Super !
L'air frais fouetta ses cheveux lorsqu'elle sortit du véhicule. Le restaurant en question s'appelait « l'Altius », un lieu chic offrant une vue imprenable sur la rutilante cité et l'Ohio, à la surface duquel se reflétaient les gratte-ciels illuminés. Les deux jeunes gens marchèrent en direction de l'établissement.
— Les fourmis sont des insectes hyménoptères, continua Arabella et Sullivan retint le plus long soupir de sa vie. Elles appartiennent au sous-ordre des apocrites ce qui se caractérise principalement par une partie très mince au niveau de l'abdomen, comme les guêpes. Tu sais on dit « avoir une taille de guêpe ». Elles appartiennent elles-mêmes au superordre des holométaboles, ce qui signifie qu'elles ont un cycle de vie complexe passant d'un état larvaire à celui de lymphe avant d'atteindre leur forme adulte. Enfin, ce n'est que de la phylogénie de base, je ne connais pas tout.
J'ai envie de crever, songea-t-il. Elle n'avait fait que parler d'insectes pendant l'intégralité du trajet, la soirée risquait d'être horriblement longue. Il lui ouvrit la porte et elle entra dans le restaurant en lui adressant un sourire ravi. Le serveur les installa et jeta un regard par-dessus son épaule lorsqu'il s'éloigna de leur table, sans doute dérouté par leur étonnant duo. Arabella s'était complètement détournée de Sullivan pour observer la vue à travers la baie vitrée, ses longs cheveux chocolat cascadaient jusque dans le bas de son dos. Son nez ne lui semblait plus si disgracieux, ni sa bouche en cœur trop fine. Un nœud noué au niveau de son col cachait en partie sa gorge, sa robe boutonnée serrait le rebond massif d'une poitrine opulente. Sullivan entreprit d'en redessiner mentalement les contours, puis il imagina leur texture sous sa paume et mordilla involontairement sa lippe. Soudain, il réalisa qu'il lorgnait ouvertement et qu'Arabella s'était tournée vers lui. Il comprit à l'instant où leurs regards se croisèrent qu'elle l'avait surpris.
— Voilà les menus, leur dit le serveur en leur tendant les cartes.
Arabella le remercia et l'homme s'éclipsa. Elle avait effectivement surpris Sullivan à fixer sa poitrine mais ne fit aucun commentaire. Au lieu de ça, elle chercha immédiatement un nouveau sujet de conversation, comme chaque fois qu'elle voulait sortir de l'embarras.
— Tu savais que les araignées buvaient leurs proies ?
Oh pitié... ! supplia-t-il intérieurement.
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Veritas
ParanormalUn recueil de bonus (one-shot et quelques nouvelles) consacré à l'Univers que j'ai créé et dans lequel se trouve la prestigieuse école de Magie "Véritas".