Chapitre 12 - Brève tranquilité

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Tous les soirs, Luc m'attend avec ses amis, dans la ruelle près du collège. Je ne peux pas lui échapper. Je sais, au fond de moi, que c'est mal, et que je devrai en parler. Mais je n'y arrive pas. C'est trop dur...

C'est toujours la même histoire. Il me frappe, puis il me laisse partir, et je vais chercher Isobel à l'école avant de rentrer à la maison.

Mais aujourd'hui, quand je le vois adossé contre un mur à m'attendre, je sens que ça va être différent. Déjà, il est seul. Pour la première fois, nous sommes face à face, seule à seul.

Je serre les poings et les desserre. J'ai envie de le frapper. De le frapper jusqu'à ce qu'il aille à l'hôpital, comme moi j'y ai été après ses coups.

- Je suis désolé, murmure-t-il d'une voix rauque. Pour tout à l'heure, et pour toutes les autres fois. Je n'aurais pas dû te faire ça. C'est mal.

Je relève brusquement la tête, surprise par ses excuses. Pourquoi il me dit ça ? Est-ce qu'il le pense vraiment ?

- Je suis sincère, ajoute-t-il, comme s'il avait entendu mes pensées.

Méfiante, je l'observe un moment en silence.

- Comment je peux me racheter ? demande-t-il.

Je serre les dents et danse d'un pied sur l'autre, hésitante.

- Ne te rachète pas, je prononce. Laisse-moi tranquille, c'est tout ce que je demande.

Je fais volte-face et commence à tourner les talons.

- Tu me fais pitié.

La voix de Luc résonne comme un coup de tonnerre et je me fige sur place, avant de me retourner lentement vers lui.

Son sourire arrogant est revenu.

- Pourquoi je te fais pitié ?

Il hausse les épaules.

- Tu devrais le savoir.

Je le toise, la gorge serrée. Il m'a menti et moi, j'ai failli le croire, comme une nouille.

- C'est toi qui me fais pitié.

Cette fois, je cours sans m'arrêter jusqu'à l'école primaire d'Isobel. Il est hors de question que je continue à discuter avec lui, alors qu'il m'a menti, alors qu'il n'a jamais pensé un seul mot qu'il a prononcé.

- Je viens chercher Isobel.

Contrairement à son habitude, ma soeur ne vient pas me serrer dans ses bras. Elle ne me touche pas. Elle murmure simplement, d'une petite voix :

- Est-ce que c'est vrai, que je suis bizarre ?

J'entoure ses épaules d'un bras et la serre contre moi avec précaution. Sans bruit, elle commence à pleurer. Je le sais, car je vous ses épaules tressauter sous ses sanglots.

Nous croisons Luc en rentrant. Je serre Isobel un peu plus fort, mais elle ne remarque rien, continuant de pleurer. Je serre les dents et relève la tête pour regarder Luc bien en face. Je ne me laisserai plus faire. Ma soeur a besoin de moi, et je la soutiendrai, quoi qu'il arrive.

Le reste de l'année se déroule sans que Luc ne vienne m'embêter une seule fois.

Si tu pleures sous la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant