La corde permit aux deux recrues de descendre tout en bas du rempart. Par chance, la chambre de Jack était loin d'être la plus haute de la tour, alors que celle d'Hazel se trouvait juste en-dessous du toit, dans lequel la garde surveillait les alentours. Avant de quitter Castel-Cariad, ils installèrent, dans la chambre de la jeune fille, les sacs de tubercules sous les draps, de telle sorte qu'ils ressemblaient à leur propre silhouettes. Bien sûr, ils avaient pris la peine, pendant le dîner, de prévenir certains de leurs camarades qu'ils dormaient dans la même chambre ce soir. Certains grincèrent des dents, d'autres tentèrent des blagues pochtronnes et manquèrent de se prendre une méchante dérouillée de la part de Hazel, qui ne disait jamais nom à une bagarre avec ses camarades.
Aux premières heures de la nuit, ils posèrent leurs pieds sur l'herbe. Hazel fut plus qu'heureuse de sentir sur sa peau le vent frais et nocturne, la pâle lumière de la lune et les subtils vrombissements des papillons et des lucioles autour d'eux. Jack, lui, grelottait déjà et maugréait à l'idée d'attraper un rhume lors de cette expédition.
— Tu n'avais qu'à emprunter un manteau, en plus du reste ! s'écria Hazel, qui n'aimait guère le caractère rabat-joie de son compagnon. Dépêchons-nous, je ne suis pas sûre que le subterfuge dure plus de quelques heures.
Ils descendirent le talus qui se déroulait aux pieds du château. Jack le fit prudemment, alors que Hazel courut jusqu'à la base de la pente, à la lisière de la forêt. Les immenses chênes se dressaient comme le mur d'un autre monde et, à leurs racines, la jeune fille distinguait déjà les dalles noire et blanche qui pavaient le sol. Cela faisait de longs mois qu'elle n'était pas partie dans la forêt. Cole organisait parfois des entraînements dans le bois pour préparer ses recrues à des conditions plus rudes que celles de la cour du château. Hazel aimait l'odeur de la forêt et la fraicheur qui régnait de l'autre côté de ces arbres. Elle se sentait davantage à sa place dans la forêt qu'entre les murs du fort. La jeune femme passa sa main sur la mousse verdoyante qui poussait sur les troncs, le temps que Jack achève sa descente.
— Je croyais qu'il fallait nous dépêcher, remarqua-t-il en arrivant. Qu'est-ce-que tu fabriques ?
— Eh bien, je t'attends, répondit Hazel, tu ne risques rien à dévaler, tu sais ? Il y a assez de buissons ici pour amortir ta chute.
— Amorti ou non, je n'ai aucune envie de tomber !
Jack tenait la lampe à huile. Il l'alluma et tous deux s'enfoncèrent entre les chênes, avant que la lumière ne soit remarquée par les gardes, qui devaient déjà être postés au sommet des tours et sur les murs. En se retournant, Hazel les vit se dresser sur les remparts, leur lance dans une main, leur rondache dans l'autre. Ces silhouettes disparurent vite derrière le feuillage, remplacées par les yeux d'animaux méfiants et curieux.
Hazel courut après quelques renards et hiboux pour s'amuser à les faire fuir sans vraiment essayer de les attraper. Jack se détendit un peu, comme si l'air de la forêt lui faisait oublier les tracas que leur petite sortie pouvait lui causer. Le bois était magnifique, et même l'étrangeté de son sol lui paraissait plus jolie qu'angoissante. Ce qui l'inquiétait grandement, en revanche, c'était la bête qu'ils cherchaient ici.
Hazel tenait plus que tout à être la première à capturer la créature qui semait le trouble dans la forêt. Tout le monde au château paraissait la craindre alors que personne ne l'avait vu. Comme seuls témoignages, la jeune fille disposait des rumeurs. Des cris lugubres retentissaient parfois entre les arbres, et plusieurs corps dépourvus de tête furent retrouvés, étalés sur le sol. Des spectacles si macabres dans un lieu si tranquille révoltaient Hazel. Elle souhaitait capturer cette bête pour faire cesser de tels massacres qui venaient assombrir la belle forêt. Bien sûr, la jeune fille n'était pas armée. De toute façon, elle se débrouillait bien mieux avec ses mains qu'avec une lame. Jack, en revanche, portait son arc personnel sur les épaules, un cadeau de Cole pour son dix-huitième anniversaire.
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MERVEILLE
ФэнтезиQue se passerait-il si les contes continuaient au-delà de leur fin ? Le royaume de Merveille abrite toutes les fées, princesses, sorcières et tous animaux doués de la parole que l'on peut imaginer. Il y a des décennies de cela, tous ce sont rangés d...