☢︎ chapitre 7

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Comme Chan l'avait craint, leur progression fut bien plus laborieuse à mesure qu'ils s'enfonçaient dans cette région montagneuse. Ils parcoururent bien moins de terrain qu'il ne l'aurait voulu et dépassèrent quelques lieux qui auraient pu les accueillir pour la nuit. Ce ne fut qu'après le coucher du soleil, alors que les dernières lueurs rougeâtres s'éteignaient, qu'ils repérèrent un renfoncement dans une paroi rocheuse, comme une alcôve. Il n'était pas raisonnable de continuer plus loin, et Seungmin, Jisung et Changbin avaient déjà trop de fois contesté les décisions de Chan pour qu'il use de nouveau de l'autorité qu'ils lui avaient unanimement confiée. Il avait été le premier à dire qu'il leur fallait un endroit sûr pour la nuit, il ne pouvait pas les forcer à marcher jusqu'à l'aube, et surtout pas sur un terrain présentant autant d'obstacles.

Alors, sans plus les faire languir, il les guida jusqu'à l'alcôve rocheuse et déposa son sac à dos sur le sol. Jisung et Felix se chargèrent aussitôt de rassembler du bois sec pour un feu de camp, sans jamais trop s'éloigner, tandis que Seungmin, Hyunjin et Minho installaient les couchettes. Au vu de l'espace restreint, ils ne purent toutes les déplier ; cela leur servirait d'excuse pour redoubler de vigilance pendant la nuit en multipliant les tours de garde.

Petit à petit, le tas de bois s'agrandit et Changbin parvint à allumer un petit feu. Cette fois encore, il n'allait pas tenir longtemps, mais cela leur suffirait pour un dîner succinct et se réchauffer. L'air se rafraîchissait un peu plus chaque nuit à mesure que l'automne approchait, et si personne n'en disait rien, tout le monde s'inquiétait pour la suite de leur périple. S'ils ne mouraient pas de faim, ils mourraient peut-être d'hypothermie ; il devenait de plus en plus urgent de trouver un refuge, au moins un lieu où ils pourraient passer les jours les plus froids sans trop de craintes et de maux.

Chan s'installa un peu à l'écart du groupe, par précaution, et sortit le journal de son sac à dos. La lumière du feu était suffisante pour lui permettre de lire l'encre noire qui décorait les pages ; la femme qui avait tenu ce carnet avait une écriture élégante, toute en courbes et lignes fines. Il n'allait avoir aucun mal à déchiffrer ses mots, bien qu'il ne puisse nier craindre ce qu'il s'apprêtait à lire. Qu'allaient-ils découvrir ? Ou découvriraient-ils même quelque chose ?

S'éclaircissant la gorge, il tourna les pages pour retourner au début.

— Les entrées sont courtes, nota-t-il. Je vais tout vous lire, même si ça peut paraître inintéressant. Peut-être qu'on ne comprendra pas tous les mêmes choses.

Les garçons demeurèrent silencieux, mais approuvèrent d'un signe de tête. Même si Chan n'avait pas entamé la lecture, ils étaient déjà suspendus à ses lèvres ; Changbin préparait les rations avec une lenteur inhabituelle tandis que les autres, assis autour du feu, ne bougeaient pas d'un cheveu.

27 avril. Ça a commencé tôt, ici... Trop tôt pour que les catastrophes aient progressé du sud au nord, commenta Chan en fronçant les sourcils. Les incendies ont atteint le village ce matin. L'alarme que le maire avait mise en place nous a réveillés. Je me suis empressée de mettre les filles à l'abri ici, comme Jaeyong l'avait ordonné. Il a fait construire ce bunker il y a seulement quelques mois, je n'osais pas le croire lorsqu'il disait que nous en aurions besoin bien plus vite que nous l'imaginions... Et pendant que nous nous cachons, il est sorti aider le village. Les filles ne cessent de demander quand il nous rejoindra, et j'espère surtout qu'il pourra nous rejoindre.

« 28 avril. Jaeyong n'est toujours pas là. Les filles ont arrêté de demander quand il nous rejoindra ; je ne pensais pas qu'elles perdraient espoir aussi vite. Peut-être qu'elles en savaient plus que nous à force de voir des informations circuler sur les réseaux sociaux. Des incendies se déclarent les uns après les autres à travers la région depuis quelques jours. Personne n'envisageait qu'ils puissent se propager aussi vite, si vite que nous n'avons pas eu le temps de rassembler quelques affaires et de partir. Elles m'ont dit qu'ils ne semblaient apparaître que dans les villes et villages, comme s'ils cherchaient à toucher seulement les humains. Il y en a beaucoup trop d'un coup pour qu'ils soient l'œuvre de l'Homme.

Sous les cendresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant